Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
16 mars 2015 1 16 /03 /mars /2015 21:59

http://www.lemonde.fr/europe/article/2015/03/14/l-europe-s-inquiete-d-un-grexit-par-accident_4593538_3214.html

L’Europe s’inquiète d’un « Grexit » par accident

Par Cécile Ducourtieux, correspondante du Monde à Bruxelles, et Frédéric Lemaître, correspondant du Monde à Berlin

Lundi 16 Mars 2015

Et si la Grèce sortait de la zone euro « par accident », à la suite d’une faillite incontrôlée ?

L’hypothèse d’un « Grexident », échafaudée dès la mi-février par les experts de l’Institut Notre Europe-Jacques Delors, gagne chaque jour un peu plus de crédibilité, en raison du blocage persistant entre le gouvernement grec et ses créanciers de la zone euro. Jeudi 12 Mars 2015, en déplacement en Autriche, Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des finances, ne l’a pas écartée. « Dans la mesure où la Grèce, seule, a la responsabilité et la possibilité de décider ce qui se passe, et comme nous ne savons pas exactement ce que les responsables grecs font, nous ne pouvons pas l’exclure », a-t-il déclaré dans un entretien télévisé.

Manifestement, le ministre des finances n’avait aucune envie de montrer la moindre empathie avec les dirigeants grecs. Avant de répondre à cette question, il en avait éludé trois autres qui sont pourtant essentielles. Il a refusé de dire s’il faisait partie des quatre-vingt-deux pour cent d’allemands qui pensent que le gouvernement grec ne va pas réaliser les réformes annoncées pour faire des économies, ou des quatorze pour cent qui pensent le contraire. Il n’a pas non plus voulu dire « s’il y a une autre possibilité qu’une faillite de la Grèce fin avril 2015 ».

Enfin, il n’a pas voulu commenter les propos d’un dirigeant de l’union chrétienne sociale bavaroise (CSU) selon lesquels le retour de la drachme serait la meilleure des solutions pour Athènes.

Que Wolfgang Schäuble n’ait à aucun moment indiqué qu’il faisait confiance au gouvernement grec pour résoudre la crise actuelle en dit long sur son exaspération, la tension étant à son comble entre Berlin et Athènes. Le premier ministre Alexis Tsipras a insisté cette semaine sur les réparations de guerre que l’Allemagne devrait payer, selon lui, à la Grèce.

Quant à l’ambassadeur grec à Berlin, il s’est plaint officiellement que Wolfgang Schäuble ait pu qualifier son homologue grec, Yanis Varoufakis, de « naïf ».

Désormais, nombre d’allemands ont l’impression d’être devenus les boucs émissaires de la gauche radicale au pouvoir à Athènes et pensent qu’il vaut mieux laisser la Grèce sortir de l’euro. Selon un sondage réalisé du 10 au 12 mars 2015 pour la chaîne de télévision ZDF, quarante-sept pour cent des allemands pensent que cela n’affecterait pas beaucoup l’économie allemande et onze pour cent sont même d’avis que cela n’aurait aucun impact. Du coup, quatre-vingt pour cent des allemands estiment que la Grèce ne doit pas recevoir d’aide supplémentaire si elle ne fait pas les efforts annoncés.

Photographie précise

Si le scénario du « Grexident » monte à nouveau, c’est parce que l’accord obtenu lors de l’Euro-groupe du 24 février 2015 n’a en réalité rien réglé. Il a juste été acté, par les dix-neuf ministres des finances concernés, qu’Athènes s’engageait à respecter les termes du deuxième plan d’aide au pays. Le gouvernement d’Alexis Tsipras a affirmé qu’il allait négocier une liste de réformes, attendues par ses créanciers. Ce n’est qu’une fois que cette liste aura été agréée que la dernière tranche de prêts du deuxième plan d’aide, sept milliards deux cent millions d’euros, sera déboursée.

Pour boucler la négociation de ces réformes, les créanciers du pays, la Banque Centrale Européenne (BCE), le Fonds Monétaire International (FMI) et l’Union Européenne, veulent une photographie précise des finances grecques. Et aussi, que le gouvernement d’Alexis Tsipras chiffre précisément ses propositions de réformes. Or, ce travail concret n’a vraiment commencé, sur le terrain, que Jeudi 12 Mars 2015. Et il va prendre plusieurs semaines.

La Grèce pourra-t-elle, dans l’intervalle, faire face à toutes ses échéances de remboursement ?

La question inquiète de plus en plus. Athènes doit régler environ six milliards d’euros de remboursements de prêts en mars 2015, dont un milliard cinq cent millions au FMI. Or, elle a dégagé en janvier 2015 un excédent primaire, hors charge de la dette, d’un milliard deux cent quarante-trois millions d’euros, contre deux milliards soixante-trois millions d’euros sur la même période un an plus tôt.

Un « Grexident » ne serait pas pour déplaire, selon plusieurs sources bruxelloises haut placées, à certains conservateurs européens, qui disent n’avoir plus confiance dans le gouvernement d’Alexis Tsipras, à peine deux mois après son arrivée au pouvoir. Confronté à ce risque, le président de l’Euro-groupe, le social-démocrate néerlandais Jeroen Dijsselbloem, a une position jusqu’à présent très claire, « la place de la Grèce est dans la zone euro ». D’où ces propos tenus sur une chaîne de télévision néerlandaise, Vendredi 13 Mars 2015, « nous devons maintenant tous avoir une attitude constructive et essayer d’achever le programme avec la Grèce ».

Conséquences considérables

Le président de la commission européenne, Jean Claude Juncker, défend lui aussi sans ambiguïté le maintien de la Grèce dans la zone euro. Il veut tout faire pour éviter une sortie qui aurait des conséquences négatives considérables pour l’union monétaire. C’est bien pour éviter cette issue que Jean Claude Juncker a demandé à Alexis Tsipras, lors de leur entretien à Bruxelles Vendredi 13 Mars 2015, que les pourparlers sortent enfin de l’impasse.

Si Athènes donnait un signal sans ambiguïté de sa volonté d’avancer, alors peut-être, comme l’a laissé entendre Jeroen Dijsselbloem il y a quelques jours, la possibilité d’un versement par anticipation des prêts restants pour la Grèce pourrait être discutée. A condition, cependant, que Berlin se persuade enfin de l’engagement réel des grecs, ce qui est loin d’être gagné.

Partager cet article
Repost0

commentaires