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4 octobre 2015 7 04 /10 /octobre /2015 19:15

https://www.ensemble-fdg.org/content/grece-solidarite-avec-les-dispensaires-sociaux-solidaires

Solidarité avec les dispensaires sociaux solidaires

Par Benoît Borrits

Un meeting de deux cent personnes s'est tenu à Paris en solidarité avec les dispensaires sociaux solidaires de Grèce. Celui-ci atteste de la montée en puissance de l'organisation de la solidarité en France. Une occasion de faire le point sur ce mouvement qui existe désormais depuis quatre ans face à la nouvelle donne du troisième mémorandum.

Bonne affluence, Mardi 29 Septembre 2015, à la bourse du travail de Paris, deux cent personnes présentes dans la salle, quel symbole que d’avoir choisi la salle Ambroise Croizat, un des fondateurs de notre sécurité sociale et ministre du travail de 1945 à 1947, pour tenir un meeting de solidarité avec les dispensaires sociaux solidaires de Grèce qui combattent au jour le jour le démantèlement du système public de santé dans leur pays. Pour mémoire, l’application des mémorandums d’austérité de la part de la troïka de l’Union Européenne, du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Centrale Européenne (BCE), ont exclu du système de santé les chômeurs tout en diminuant le personnel en poste par non renouvellement des départs à la retraite. En réponse à cette situation, les dispensaires sociaux solidaires autogérés de Grèce sont des structures de bénévoles qui assurent les premiers soins à tous les exclus tout en exigeant la prise en charge des pathologies plus importantes dans le cadre de l’hôpital public.

Myrto Bolota, responsable de « Solidarité pour tous », a rappelé que trois cent cinquante structures de résistance auto-organisées existent à ce jour en Grèce et, parmi celles-ci, quarante dispensaires sociaux de solidarité. Sur les seize dispensaires de l’Attique, la région d’Athènes, une moyenne de quarante six bénévoles sont mobilisés par dispensaire, chacun d’entre eux accueillant deux mille patients par mois. « Solidarité pour tous » est une structure qui veut faciliter la communication des réseaux et des structures de solidarité et rendre accessible et visible la présence de cet univers de solidarité partout dans le pays.

« Solidarité pour tous » se veut une petite pierre de plus dans l’édifice de la lutte pour une vie sans mémorandum, sans pauvreté, sans exploitation de l’homme, sans fascisme et sans racisme, dans la perspective de créer les conditions nécessaires à un renversement radical politique et à une transformation sociale.

Theodoros Zdoukos, médecin au dispensaire de Thessalonique, a rappelé l’augmentation des syndromes de « pathologie sociale » dans le pays, augmentation que l’on retrouve dans tous les pays qui ont été « secourus » par le FMI. Il a rappelé que le rôle des dispensaires est double, assurer les premiers soins et organiser avec les patients l’offensive contre une « politique assassine » et pour un service public de santé de qualité. Il se refuse de parler de « crise humanitaire » en Grèce mais préfère parler de « politique volontairement imposée ».

En rappelant que, en septembre 2011, les frais d’hospitalisation à la charge des patients ont subitement été multipliés par sept, il démontre que la dégradation du système de santé touche aussi ceux qui en sont encore bénéficiaires. A ce titre, une des actions de son dispensaire est de revendiquer un accès gratuits aux soins.

Matina Triantaphylllou, bénévole du dispensaire social et autogéré de Peristeri, a remercié les collectifs parisiens de solidarité du quatorzième, du cinquième et du treizième arrondissement, pour les collectes qu’ils ont réalisées au bénéfice de son dispensaire. Ce dispensaire fonctionne sur la base de médicaments collectés par les gens du quartier et d’une assemblée mensuelle des bénévoles. Elle est inquiète des effets du troisième mémorandum signé cet été, tout en voyant dans l’activité des dispensaires un exemple d’émancipation des citoyens.

Apostolos Kokkinis est dentiste au dispensaire de Thessalonique. Il a rappelé que ce dispensaire est parti d’une initiative des salariés de la santé consécutive à une grève de la faim de réfugiés. Le 7 novembre 2011, le dispensaire ouvrait dans une salle de la bourse du travail de Thessalonique mise à leur disposition, avec des dons de matériels médicaux de personnes partant à la retraite et de médicaments en provenance de particuliers et de pharmacies. Quatre ans après, le dispensaire est toujours actif et n’est pas avare en matière de communication, concerts, expositions photographiques, films, campagne de dons financiers et intervention dans les écoles. Son action politique est claire, appel à la désobéissance des personnels médicaux pour refuser l’exclusion dans l’accès aux soins, refus de toute discrimination dans l’accès au dispensaire et actions contre le parti néo nazi Aube Dorée dont les officines ne s’adressent qu’aux seuls grecs. Le rôle des dispensaires n’est-il pas au final de briser la solitude pour organiser l’offensive ? « Quand une personne tombe, les autres le font tenir debout », résume la philosophie de son activité.

Une grande partie de la discussion a porté sur le nouveau gouvernement et l’application du troisième mémorandum signé en juillet 2015. Tout le monde s’accorde à constater que les promesses de rétablir le système de santé public ne seront évidemment pas tenues. Theodoros Zdoukos estime cependant que « le gouvernement de Syriza est plus susceptible d’entendre la revendication » et qu’en retour « le mouvement met plus de pression à son égard ». Il rappelle d’ailleurs malicieusement que l’actuel ministre de la santé est un ancien fondateur du dispensaire de Rethymno en Crète. Un autre participant a rappelé que cette lutte concerne l’ensemble des pays européens comme en témoigne l’existence du réseau européen contre la privatisation et la commercialisation de la santé et de la protection sociale. Une participante du collectif de l’Yonne, qui a parrainé le dispensaire du Pirée et a récemment visité celui-ci, a indiqué à quel point les grecs « pensent que les autres peuples ne doivent pas vivre cela ». En intervenant sur les marchés de sa région, elle a été touchée par le nombre de gens qui apportaient des médicaments ou du matériel médical, actuellement stockés dans son garage, et espère que, rapidement, un camion partira pour la Grèce.

On le voit, l’expérience des dispensaires sociaux solidaires est loin de s’éteindre, une bonne nouvelle dans un environnement funeste.

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