Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 décembre 2015 4 24 /12 /décembre /2015 19:32

http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/12/24/la-decheance-de-nationalite-provoque-un-malaise-a-gauche_4837458_823448.html

La déchéance de nationalité heurte la gauche

Dans la majorité, la mesure crée un profond malaise, au delà de ceux qui critiquent d'habitude le gouvernement

Par Nicolas Chapuis et Raphaëlle Besse Desmoulières

Christiane Taubira n’est pas la seule à être tombée de sa chaise en découvrant que l’extension de la déchéance de nationalité aux binationaux nés en France et condamnés pour terrorisme figurait bien dans le projet de révision constitutionnelle préparé par François Hollande et Manuel Valls. Dans la majorité, beaucoup de responsables socialistes croyaient cette mesure définitivement enterrée. Ils ont découvert avec stupéfaction à la sortie du conseil des ministres, Mercredi 23 Décembre 2015, qu’ils allaient devoir en débattre après les fêtes. La discussion promet d’être houleuse.

Le cercle des mécontents dépasse cette fois largement l’habituel groupe des frondeurs du Parti Socialiste. Pour l’ancien ministre de la ville François Lamy, il est hors de question de voter un tel texte. « C’est une mesure inefficace contre le terrorisme, cela n’a donc qu’une valeur symbolique et le symbole qui est derrière, c’est la remise en cause du droit du sol », estime le député de l’Essonne et conseiller de Martine Aubry.

Grand écart idéologique

Devant son entourage, la maire de Lille a exprimé sa vive opposition à cette réforme. « C’est tout simplement inacceptable comme réforme », renchérit Olivier Faure, député de Seine-et-Marne et porte-parole du Parti Socialiste. « C’est une mesure inefficace qui a un effet symbolique dévastateur pour une partie de la population qui va se sentir citoyenne de seconde zone ». La maire de Paris, Anne Hidalgo, a également indiqué sur twitter être « fermement opposée » à la déchéance de nationalité.

Signe du malaise ambiant, peu de dirigeants de la majorité se sont pressés pour soutenir la décision de l'exécutif.

Jeudi 24 Décembre 2015, seul Jean Marie Le Guen, secrétaire d'état aux relations avec le parlement, avait été dépêché pour faire le service après vente sur BFM TV. Il se voulait « confiant » sur le vote de la mesure, « cette réforme de la constitution ne heurte en rien nos valeurs essentielles ». Et de balayer les hésitations, « on va avoir tous les indignés habituels ».

Mercredi 23 Décembre 2015, plusieurs responsables joints par le Monde arguaient de leur départ en vacances de Noël pour justifier leur absence de réaction. Difficile de se renier quand, sur les réseaux sociaux, tournent des vidéos datant de 2010 et dans lesquelles François Hollande, Ségolène Royal ou Manuel Valls éreintent l’extension de la déchéance de nationalité alors proposée par Nicolas Sarkozy.

Jean Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti Socialiste, s’est quant à lui contenté d’un communiqué ésotérique qui renvoie au débat parlementaire. « Malgré les multiples injonctions de l’extrême droite et de la droite dite républicaine, le président de la république a choisi de respecter les paroles qu’il avait prononcées devant le congrès et décidé de suivre strictement l’avis et les réserves du conseil d’état », écrit-il. C’est un grand écart idéologique pour celui qui expliquait, au début du mois de décembre 2015, que la déchéance de nationalité n’était « pas une idée de gauche ».

« Je n’ai pas compris ce communiqué », lâchait un dirigeant du Parti Socialiste déboussolé. « Il faut proposer le poste de premier secrétaire du Parti Socialiste au vice président du conseil d’état puisque maintenant, quand celui-ci dit quelque chose, le Parti Socialiste s’aligne », rajoutait Karine Berger. La députée des Hautes Alpes propose pour sa part une solution intermédiaire, « dans la lutte contre le terrorisme, il faut trouver une mesure symbolique qui toucherait tous les français, comme la peine d’indignité nationale », une voie explorée en début de semaine par Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste à l’assemblée nationale. Mais les socialistes ont déjà réfléchi à pareille mesure. Un rapport de Jean Jacques Urvoas, le président de la commission des lois de l’assemblée nationale, au mois de mars 2015, avait conclu à son inefficacité.

Pour faire voter sa réforme par une majorité des trois cinquièmes du parlement, François Hollande va devoir faire les comptes et espérer la collaboration de la droite. Car le chef de l’état risque de perdre le soutien d’une bonne partie de sa majorité et il n’a pas grand-chose à attendre de ses partenaires de gauche. Si le coprésident du groupe écologiste au sénat, Jean Vincent Placé, approuve cette mesure, sa position ne devrait pas être majoritaire. « Je trouve positif que le président de la république applique son discours de Versailles », note le sénateur de l’Essonne, désormais membre d’un petit parti écologiste. S’il reconnaît que ce n’est pas « une mesure fondamentale », il loue sa « symbolique. Nous sommes dans un pays où, pour être français, on ne peut pas être un ennemi de la France », estime-t-il.

Avant même la présentation du projet de loi en conseil des ministres, Mercredi 23 Décembre 2015, la coprésidente du groupe écologiste à l’assemblée nationale, Barbara Pompili, représentante des députés écologistes qui soutiennent le gouvernement, indiquait ne pas être favorable à cette disposition car elle n’en voyait pas « l’utilité ». L’autre coprésidente du groupe écologiste à l’assemblée nationale, Cécile Duflot, a annoncé, Jeudi 24 Décembre 2015, dans Libération, qu’elle s’opposerait à cette mesure, refusant de mêler sa voix « à celles des parlementaires du Front National sur cette question. Voter contre s’impose », indique l’ancienne ministre. « J’appelle toutes les consciences républicaines à se réveiller et à refuser cette pente glissante ». Elle ajoute « qu’à force de vouloir couper l’herbe sous le pied du Front National, on risque d’appliquer son programme ».

Danielle Auroi, députée d’Europe Ecologie Les Verts (EELV) du Puy de Dôme, fera le même choix, elle qui critique « une manœuvre politicienne » de la part de l’exécutif pour « mettre la droite en difficulté. Le président de la république joue plus sa prochaine candidature aux élections présidentielles que l’intérêt de la France », dénonce-t-elle.

Le Front De Gauche (FDG) devrait aussi être sur cette position. « Une fois de plus, le gouvernement souhaite donner des gages à la droite, bafouant ses propres valeurs et ignorant ceux qui l’ont mené au pouvoir », critique André Chassaigne, président communiste du groupe de la Gauche Démocrate et Républicaine à l’assemblée nationale. Pour le député du Puy de Dôme, ce sera « contre, sans hésiter ».

Partager cet article
Repost0

commentaires