Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
19 mai 2016 4 19 /05 /mai /2016 18:36

https://www.paris-luttes.info/pourquoi-un-so-dans-le-cortege-5715

Pourquoi un service d'ordre dans le cortège étudiant ?

Dimanche 15 Mai 2016

Pendant le mouvement contre la loi travail, le cortège autonome de tête de manifestation est devenu, malgré les tentatives de la préfecture de police, une tradition. Depuis peu, on trouve dans celui-ci beaucoup de monde, notamment souvent un black bloc assez significatif mais aussi au fond, le cortège de la coordination étudiante et son service d'ordre souvent assez mal vu par les autres participants. Un point d’explication sur ce service d'ordre semblait nécessaire.

La coordination étudiante solidaire de toutes les pratiques de luttes

Depuis le Jeudi 17 Mars 2016, sur Paris, il existe une coordination des assemblées générales et des comités de mobilisation des universités d’Île-de-France, version Île-de-France des coordinations nationales étudiantes, pour rappel, lors de cette première coordination, l’Union Nationale des Etudiants de France (UNEF) était partie en déclenchant une alarme à incendie. Sa principale utilité depuis le début a été d’organiser un cortège inter universitaire, autonome du cortège « jeune » de « l’intersyndicale des organisations jeunes », cortège quant à lui organisé par les services d’ordre de l’UNEF et du Mouvement des Jeunes Communistes de France (MJCF).

La coordination a toujours affirmé son refus de se désolidariser des pratiques de manifestation plus offensives que les siennes, rappelant que « cette violence, pour nous, elle ne vient que d’un seul côté, c’est la violence qu’on dit légitime de l'état, nous la rejetons en bloc ». Après la coupure d’une partie du cortège autonome par la police lors de la manifestation du Jeudi 28 Avril 2016, la coordination francilienne a voulu passer de la parole aux actes et se placer devant le carré de tête syndical, en soutien au cortège « autonome » en tête de manifestation. C’est ce qui s’est passé le Dimanche Premier Mai 2016, avec les certains succès que nous avons pu observer, une tête de manifestation joyeusement hétérogène.

Cela devait être réitéré le Jeudi 12 Mai 2016, mais la police a verrouillé la tête de manifestation. Le cortège de la coordination s’est donc placé juste derrière le carré de tête syndical, là où se placent habituellement l’UNEF et le MJCF, malgré les coups de pression de ces deux organisations. C’est finalement notamment cela qui a permis la formation d’un black bloc juste derrière le carré de tête syndical, nous imaginons William Martinet, le chef de l'UNEF, dire que « je me désolidarise des gens qui se sont infiltrés juste derrière moi », en empêchant l’installation des cordes et du camion des organisations de « jeunesse » en tête de manifestation.

Bref, même s’ils existent des divergences stratégiques et pratiques et que ce cortège est, il est vrai, pas mal animé par des personnes d’un parti d’extrême-gauche en trois lettres, il reste un cortège d’étudiants auto-organisés plutôt enclin à la solidarité dans les discours comme dans la pratique avec les copains et copines qui vont à la castagne.

« Nous ne cèderons pas face aux violences policières, qui ne font que renforcer notre détermination à lutter aux côtés de celles et ceux dont on voudrait nous éloigner », écrivait l’appel de la coordination nationale étudiante du Samedi 30 Avril 2016.

Pourtant, Jeudi 12 Mai 2016, les copains et copines du service d’ordre de la coordination étudiante, après s’être fait attaquer par l’UNEF et le MJCF énervés de ne pas avoir le leadership de la contestation étudiante, ils ont été repoussés, se sont faits copieusement insultés par des participants du cortège « autonome ». La même chose s’était produite le Dimanche Premier Mai 2016. Plus largement, en discutant avec des amis et autres personnes croisées dans la tête de manifestation, je me suis rendu compte qu’il existait une incompréhension totale par rapport au cortège de la coordination, ou plutôt une sur interprétation de ce cortège.

En effet, l’existence d’une ligne de service d’ordre qui s’arrête quand les gens sont en train de se battre avec les flics était interprétée comme une marque de désolidarisation et d’un refus politique de cautionner les tentatives de déborder les dispositifs policiers. Parce que c’est vrai que comme dit le slogan, « flics, services d’ordre, même combat ».

Alors, pourquoi un service d’ordre ?

D’aucuns diront que c’est par volonté de diviser et que c’est encore un dispositif de bureaucrates et une modalité de gouvernement. D’abord, il faut savoir qu’un service d’ordre a des mandats et des cultures différentes selon qui l’organise. La coordination étudiante, c’est un lieu d’auto-organisation des étudiants qui vont en assemblée générale et en comité de mobilisation, il n’y a pas que des lanceurs de cocktails Molotov et des virtuoses du pavé, pas que des courageux qui saignent sous leur cagoule, il y en a, mais il y a plein d’autres personnes déterminées mais qui pour un tas de raison sont beaucoup moins résistantes à la violence d’état. Beaucoup de personnes qui ont peur et que cette peur paralyse.

Et parce que s’auto-organiser, c’est aussi se prendre chacun comme il est, avec de la bienveillance, d’en prendre acte et de s’organiser. Le service d’ordre apparaît ainsi comme une méthode, peut-être en qu’il en existe d’autres et j’invite tout le monde à contribuer à trouver des solutions, pour se tenir ensemble en manifestation et se rassurer.

Il n’a bien sûr aucune prétention à une quelconque hégémonie sur l’ensemble des manifestants. Il s’agit juste d’une manière d’aller soutenir la conflictualité tout en créant un lieu, à savoir un cortège, où celle-ci se vit moins frontalement.

Respect de la diversité des tactiques et des radicalités de chacun

S’il faut le rappeler, le « respect de la diversité des tactiques », cela va dans les deux sens. Pour que toutes les composantes de la lutte puissent chanter comme les No TAV, « si parte, si torna insieme, siamo tutti black bloc », « nous partons, nous revenons ensemble, nous sommes tous des black bloc », il faut aussi que les composantes les plus radicales de celle-ci prennent soin des autres et des niveaux de conflictualité que chacun est prêt à vivre. « Nous n’avons pas pour habitude d’obéir à des ordres braillés par qui que ce soit, à plus forte raison quand c’est pour aller au carton à sa place », disait dans un texte sur le Jeudi 28 Avril 2016 le groupe Regard Noir. Cette phrase, il me semble que la coordination étudiante pourrait la reprendre à son compte. Si ceux pour qui offrir le cortège « joyeux et déterminé » de la tête de manifestation aux étudiants qui ont fait le choix de s’en solidariser mais avec leur propre pratique, par exemple celle de faire un cortège, ne reçoivent que du mépris et aucune considération pour leurs désirs de lutte, il est fort à parier que ces rencontres et cette puissance trouvées en tête de manifestation finissent par décroître tristement. Respecter la diversité des tactiques, cela ne veut pas dire se mettre en danger à la place de celles et ceux qui débordent courageusement.

Un étudiant proche d’étudiants qui font parfois le service d’ordre de la coordination étudiante mais aussi de personnes dont la cagoule marque l’opacité face au pouvoir.

Partager cet article
Repost0

commentaires