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7 août 2016 7 07 /08 /août /2016 16:59

https://lundi.am/Sur-la-police-une-opinion-minoritaire-par-Eric-Hazan

http://tendanceclaire.org/breve.php?id=18627

Sur la police, une opinion minoritaire

Enfonçons des coins dans les contradictions, évitons les mots d’ordre qui soudent l’adversaire en une masse indifférenciée. Crier « tombez les casques, la police avec nous », c’est préparer notre victoire.

Par Eric Hazan, écrivain et éditeur français, fondateur des éditions de la Fabrique

Lundi 18 avril 2016

Ce n’est pas un hasard si de nombreux articles parus sur notre site ces dernières semaines traitent du problème que constitue la police.

Aujourd’hui, Éric Hazan prend le contre-pied de ce chant de ralliement que nous entendons lors de chaque manifestation, « tout le monde déteste la police ».

Lors des manifestations de ces jours derniers, le mot d’ordre le plus souvent repris parmi la jeunesse était « tout le monde déteste la police ».

C’est émotionnel, c’est compréhensible mais ce n’est pas intelligent. Quelle que soit la forme que va prendre le soulèvement qui s’annonce, il y aura de la police pour garder la télévision, les data centers, les gares et les dépôts de carburant. Or, dans toutes les insurrections victorieuses, depuis la prise de la Bastille jusqu’à la mise à bas de Zine Ben Ali et d’Hosni Moubarak, le moment décisif a été celui où les forces de l’ordre ont fait défection. Et inversement, chaque fois que ces forces ont fait bloc pour défendre le régime, les insurgés ont été vaincus et massacrés. C’est comme une loi, il n’y a pas d’exceptions.

Ici et maintenant, si nous signifions à la police que nous la détestons en bloc, nous ne faisons que souder ses rangs et nous rendons sa défection plus difficile et plus improbable. Or, ses rangs sont moins homogènes, moins serrés que peuvent le laisser penser les lignes de boucliers. Il y a quelques années, nous avons publié à la Fabrique le journal d’un gardien de la paix d’Eric Blondin. Ce livre montrait que dans le commissariat de police de l’avenue du Maine régnait une atmosphère conflictuelle assez semblable à celle qu’on peut trouver dans le personnel d’un centre Leclerc, haine de la hiérarchie, sentiment de subir une exploitation sans fin et efforts des gradés pour monter les uns contre les autres. Croit-on qu’aujourd’hui la paix et la concorde règnent dans les rangs d’une police suremployée et démoraiisée ?

Bien sûr, il n’est pas question de discuter avec les policiers de la Brigade Anti Criminalité (BAC), ni devant les rangs de robocops dans la fumée des grenades lacrymogènes. Mais Jeudi 14 Avril 2016, au métro Ménilmontant, un groupe de très jeunes avait monté une micro manifestation que la police, plus nombreuse qu’eux, contrôlait de très près. Les hommes en bleu, non casqués, étaient dispersés au contact direct de ceux qui distribuaient des tracts à la sortie du métro. Ils se parlaient, ils discutaient et ils se disputaient comme des êtres humains.

Pourquoi ne pas être intelligents ? Pourquoi ne pas nous tenir au courant des mouvements de ras-le-bol qui couvent en ce moment dans la police et ne pas leur signifier que nous les soutenons ? Ces mouvements, ces sections syndicales oppositionnelles et ces cas isolés sont minoritaires dans une police qui vote à cinquante pour cent pour le Front National. Oui, et alors, ne sommes nous pas nous aussi minoritaires ? Et depuis quand attendons-nous qu’un mouvement soit majoritaire pour le soutenir ?

Enfonçons des coins dans les contradictions et évitons les mots d’ordre qui soudent l’adversaire en une masse indifférenciée. Crier « tombez les casques, la police avec nous », c’est préparer notre victoire.

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