http://www.anti-k.org/2016/11/26/ce-que-je-sais-que-fut-loci-livre-temoignage-de-420-p
http://www.luttedeclasse.org/dossier44/oci_112016.pdf
Ce que je sais que fut l’Organisation Communiste Internationaliste (OCI), témoignage de quatre cent vingt pages de Pierre Salvaing
Jeudi 3 Novembre 2016
Voici comment Pierre Salvaing se présente
« J’ai milité à l’OCI, puis à ce qui s’est appelé le Parti Communiste Internationaliste (PCI) à partir de 1968, durant plus de vingt ans. J’avais commencé à militer très activement au Comité de Liaison des Etudiants Révolutionnaires (CLER) et aux groupes Révoltes quelques mois seulement après mon arrivée à Paris en septembre 1965, où j’étais étudiant à la Sorbonne. Le 12 février 1966, j’ai demandé à Claude Chisserey, qui dirigeait alors tout le secteur jeune, de faire partie du CLER. J’étais alors dans ma vingtième année.
Par la suite, après mon départ volontaire du PCI en juin 1989, après quelques années de flottements, de recherches, de discussions et de combats politiques, j’ai été coopté en 1992 au comité construit et dirigé par Stéphane Just. Après la mort de Stéphane Just, le 12 août 1997, j’ai continué de militer dans un comité qui a aussitôt commencé à éclater, à se diviser et à se combattre férocement. J’ai participé à la direction d’un petit noyau intitulé regroupement pour la construction du Parti Ouvrier Révolutionnaire (POR) et de l’Internationale Ouvrière Révolutionnaire (IOR) entre 2002 et 2005. Je l’ai quitté au mois de septembre 2005, non par désaccord, mais parce que j’étais épuisé physiquement et psychiquement par un combat dont je ne voyais pas l’issue positive.
Ce n’est qu’à la fin de 2014 que je me suis senti avoir reconstitué assez de forces pour tenter d’élucider les raisons pour lesquelles le combat entamé par l’OCI avait été un échec ».
Table des matières du témoignage de Pierre Salvaing
Introduction
Première partie, analyses justes et pronostics faux
Une erreur de rythme jamais corrigée, les thèses de 1972 et de 1973
De 1968 à 1981, les congrès de l’OCI et la Vérité annoncent la tempête
La situation française à partir de 1968
Le Chili entre 1971 et 1973 et la Bolivie
Europe et Amérique
La révolution portugaise
Autre pronostic discutable, l’Espagne
L'Italie, la Grande-Bretagne et l'Allemagne
Qu’est devenue la révolution iranienne ?
Le Nicaragua
Qu’est devenue la révolution politique ?
Deuxième partie, l'OCI aux prises avec sa construction
L’hypothèse de la Ligue Ouvrière Révolutionnaire (LOR)
L’alternative de la LOR est envisagée
Au commencement étaient les principes, le centralisme démocratique
L'affaire Varga
L’organisation de jeunesse, moteur de la construction de l'OCI
Rencontres avec d’anciens dirigeants étudiants
La marche à la crise
Le rapport Sorel sur l’organisation
L'affaire Berg
Pierre Lambert face au comité central, la mise au pas de l'OCI
Le cas de la Corrèze
Ombres et lumières sur la marche en avant
La question des cotisations
L’OCI, l’Union Nationale des Etudiants de France (UNEF) Indépendante et Démocratique et l'élection de François Mitterrand
Troisième partie, le basculement
Deux lettres de mlilitantes étudiantes
Le grand tournant
L'OCI de 1974 à 1981
Ce qu'écrivait Stéphane Just en 1984
L'OCI comme conseiller spécial de François Mitterrand
La fausse proclamation du PCI
Les laborieux débuts du PCI
La question de la laïcité, comme cheval de Troie dès la proclamation du PCI
La question de la laïcité et la destruction de la Fédération de l'Education Nationale (FEN)
Deux exemples d'indépendance réciproque entre le PCI et les syndicats
Quatrième partie, vers la liquidation
Comment est né le Mouvement Pour un Parti des Travailleurs (MPPT) ou comment est mort le PCI
Stéphane Just à propos de la démocratie
George Orwell avait raison
Lettre de l'ancien camarade Mazel
Les premiers pas du MPPT
Extinction définitive de la flamme de la révolution prolétarienne
Conclusion du témoignage de Pierre Salvaing
A y avoir ainsi plongé dans le cours tumultueux de ses années, les méandres de ses textes, les catastrophes de ses chutes et l’égarement de ses bras, nous voyons que le rivière OCI n’a pas atteint la mer. Je m’autorise cette seule métaphore parce que c’est la fin de ce travail. Ce ne sont pourtant pas des réflexions sentimentales que m’occupent en terminant, c’est la suite, ce qui vient. L’entreprise si valeureuse, entamée à une cinquantaine vers le milieu des années 1950, a échoué, la quatrième internationale est définitivement morte. Et la disparition de la perspective de la révolution politique oblige à considérer que le programme de transition de 1938 demande certains aménagements d‘importance.
Une Internationale ouvrière révolutionnaire demeure plus que jamais nécessaire et à mes yeux la seule issue possible pour la survie de l’humanité. Celle-ci paraît à brève échéance sérieusement menacée. Il me paraît douteux, voire impossible, que la future Internationale, pour peu qu’elle ait le temps de se former, ressemble formellement à ce que fut le parti victorieux de la révolution d’octobre 1917 et le fonctionnement qu’il impulsa internationalement.
Ce qui a permis, au début des années 1960, à l’OCI de sortir de ce tout petit groupement de militants rescapés, c’est la jeunesse. Quand la direction de l’OCI et du PCI sacrifia sa jeunesse, à commencer par sa jeunesse étudiante, au profit de manœuvres d’appareil et de combinaisons dites politiques, elle se condamnait avec certitude.
La prise de l’UNEF engagea ce sacrifice dès 1971, mais c’était alors une nécessité impérieuse, totalement justifiée. Par la suite, la direction de l’OCI fit de cette nécessité vice. C’est pourquoi la direction jeune n’est pas directement responsable de la corruption politique et matérielle pour certains où une grande partie d’entre elle sombra.
Le petit groupe qui survécut de la crise pabliste des années 1950 dut une grande part de sa survie aux alliances que Pierre Lambert sut passer avec des morceaux d’appareil, notamment dans la Confédération Générale du Travail (CGT) Force Ouvrière. Sans quoi il aurait été écrasé à la fois par l’appareil stalinien, le secrétariat unifié de la quatrième internationale et les pressions de l’ensemble de la société bourgeoise.
Alexandre Hébert et sa région nantaise furent très probablement le vecteur central de ce sauvetage. Cela s’est retourné ensuite dans son contraire. On ne laisse pas dans le corps d’un opéré les instruments, corps étrangers, qui ont servi à le sauver.
Peut-être que, pour n’avoir pas su rompre avec des méthodes qui avaient été nécessaires à une époque donnée, la direction de l’OCI, ramenée à Pierre Lambert, s’est empêchée de résoudre le problème, capital au sens propre, de l’évolution nécessaire de son organisation, la construction d’une véritable direction.
Il y a eu hésitation, durant des années, puis décision, décision d’isolement, durant d’autres années, de la décision à la réalisation, puis de destruction accélérée.
De même, dans les années 1960, l’OCI, pour résister à la terreur politique instaurée par l’appareil stalinien, dut se muscler et faire un usage politique de la force physique.
Par la suite, cet usage fut souvent dénaturé, jusqu’à servir dans et contre ses propres rangs. C’est pourquoi aussi certains appareils, surtout celui de la CGT Force Ouvrière, s’en louèrent et louèrent ses services, qui peuvent se prolonger encore aujourd’hui.
L’histoire de l’OCI et du PCI est donc à bien des égards celle d’une corruption. Je n’entends pas ici ce terme dans le sens qu’il a pris aujourd’hui, celui de la corruption matérielle. Je pense à la corruption des métaux et à leur oxydation.
L’OCI et le PCI se sont oxydés pour n’avoir pas su construire leur revêtement protecteur, leur direction collective, leur véritable liberté d’élaboration et de discussion et leur véritable démocratie interne. Ils se sont corrompus par la tête.