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15 mars 2017 3 15 /03 /mars /2017 20:26

 

http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/03/13/catalogne-l-ex-president-independantiste-artur-mas-condamne-a-deux-ans-d-ineligibilite_5093734_3214.html

 

L'ancien président indépendantiste du gouvernement catalan, Artur Mas, condamné à deux ans d’inéligibilité

 

La justice espagnole l’a sanctionné pour avoir organisé, en 2014, une consultation, considérée comme illégale, sur l’indépendance de la région.

 

Par Sandrine Morel, correspondante permanente du Monde à Madrid

 

« Nous avons été condamnés pour défendre des idées qui ne plaisent pas et dans l'état espagnol les gens sont poursuivis pour leurs idées ».

Prompt à se poser en martyr de la cause indépendantiste catalane, Artur Mas n’a pas tardé à dénoncer sa condamnation, Lundi 13 Mars 2017, par le Tribunal Supérieur de Justice de Catalogne (TSJC), pour désobéissance.

L’ancien président du gouvernement catalan pendant cinq ans entre 2010 et 2015 a été condamné à deux ans d’interdiction d’exercer toute fonction publique élective et à une amende de trente six mille cinq cent euros pour avoir organisé, le 9 novembre 2014, une consultation populaire sur l’indépendance de la région, malgré l’interdiction prononcée, cinq jours plus tôt, par la cour constitutionnelle espagnole.

Saisie par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, la plus haute instance judiciaire du pays avait estimé que, selon la constitution, l’unité de l’Espagne ne pouvait être débattue que par l’ensemble des espagnols.

Près de deux millions trois cent mille catalans avaient toutefois participé à ce référendum, sans valeur légale, organisé dans des écoles et gymnases. Le oui à l’indépendance avait emporté quatre vingt un pour cent des suffrages.

L’ancienne vice-présidente du gouvernement catalan, Joana Ortega, et l’ancienne ministre régionale de l’éducation, Irene Rigau, ont également été condamnées à des peines légèrement inférieures en tant que coopératrices nécessaires. Tout comme Artur Mas elles déposeront un recours devant le tribunal suprême espagnol. Artur Mas a aussi avancé qu’il porterait ensuite l’affaire « jusqu’aux dernières instances de la justice européenne, à Strasbourg, s’il le faut. Et il le faudra ».

Bien que la peine infligée à Artur Mas soit nettement inférieure aux dix ans d’inéligibilité requis par le parquet, les réactions enflammées des indépendantistes, qui ont saisi l’occasion pour recharger leurs munitions contre Madrid, n’ont pas tardé. Injuste, absurde, une erreur et une peine politique, les commentaires ont fleuri sur les réseaux sociaux et aux micros des journalistes.

« Ce qui s’est passé aujourd’hui, c’est une défaite de plus de l'état et un motif de plus pour nous » de nous séparer, a déclaré le porte-parole d'Esquerra Republicana de Catalunya (ERC).

De son côté, l’actuel président du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, a ironisé sur la concordance entre la condamnation d’Artur Mas et l’annonce par l’Ecosse de sa volonté d’organiser un nouveau référendum d’indépendance en 2018. « Quelles différences avec les démocraties consolidées et saines », a-t-il publié sur Twitter.

Au contraire, le porte-parole du Parti Populaire, Pablo Casado, s’est félicité du verdict. « Les espagnols doivent avoir la certitude que l’impunité n’existe pas et que personne n’est au-dessus des lois ».

Quant au porte-parole du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE), Antonio Hernando, il a souligné que la peine était « la conséquence logique du non-respect et de la désobéissance à la cour constitutionnelle et aux règles du jeu démocratique ».

Pour Aïtor Esteban, porte-parole du parti nationaliste basque (PNV), « nous sommes face à une question politique qui n’aurait jamais dû arriver devant les tribunaux et qui doit se résoudre par le dialogue ».

Une réflexion similaire à celle de la maire de Barcelone, l’ancienne militante pour le droit au logement, Ada Colau, pour qui « la judiciarisation d’un conflit politique le cristallise », et à celle du député de Podemos Iñigo Errejon, pour qui le verdict « ajoute de l’huile sur le feu ».

Les graves tensions politiques entre Barcelone et Madrid remontent à 2010, quand la cour constitutionnelle a raboté le nouveau statut d’autonomie catalan. Elles se sont exacerbées en 2012, au plus fort de la crise économique, quand, après le refus du gouvernement de Mariano Rajoy de négocier une autonomie fiscale pour la région, Artur Mas a assumé un virage en faveur d’un état souverain catalan. Et elles ne se sont pas apaisées après le faux référendum de 2014, au contraire.

En 2016, les indépendantistes de gauche et de droite, qui s’étaient regroupés dans une liste commune aux élections régionales, Ensemble pour le Oui, et les séparatistes radicaux, europhobes et anticapitalistes de la Candidature d'Unité Populaire (CUP), forts d’une majorité absolue de députés, mais de seulement quarante huit pour cent des voix, ont fixé une feuille de route pour se séparer de l’Espagne en dix-huit mois.

Avant l’été, ces députés régionaux entendent voter des lois de transition pour passer de la légalité espagnole à une nouvelle légalité catalane de façon à organiser, au plus tard au mois de septembre 2017, un véritable référendum d’autodétermination aux conséquences légales, avec ou sans l’accord de Madrid.

Le 6 mars 2017, les indépendantistes ont décidé de changer le règlement du parlement catalan pour que les lois de déconnexion puissent être approuvées en urgence, sans débat préalable, afin d’éviter le recours de Madrid.

Pour la vice-présidente du gouvernement, Soraya Saenz de Santamaría, le gouvernement catalan vit dans une réalité parallèle qui n’a rien à voir avec les désirs des catalans et s’est empêtré dans une fuite en avant. La proportion des catalans favorables à l’indépendance, quarante cinq pour cent, est en recul. Ils sont moins nombreux que ceux qui y sont opposés, quarante sept pour cent, selon le dernier sondage du centre d’études d’opinion catalan.

Madrid assure que tous les moyens seront utilisés pour empêcher la tenue du référendum annoncé et parie sur un nouveau recul des catalans et de nouvelles élections régionales anticipées, les troisièmes en cinq ans.

A moins qu’il ne soit trop tard pour stopper la fuite en avant des indépendantistes.

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