Philippe Poutou ou le droit à l'irrespect
Par David Carzon
Mercredi 5 Avril 2017
Les limites ont semble-t-il été franchies par Philippe Poutou lors du débat grandeur nature de mardi soir sur BFM Télévision et CNEWS. Pensez-donc. Il a osé refuser de poser pour la photographie de famille avec tous les autres candidats. « Ce ne sont pas des collègues », s’est-il justifié le lendemain.
Imaginez, il a interpellé ses concurrents et pas du tout amis uniquement par leur nom de famille. Jugez par vous-même, il s’est présenté aux téléspectateurs en tenue débraillée, comme l’a qualifiée Luc Ferry, philosophe du bon goût. Sans compter qu’il n’arrêtait de tourner le dos à la caméra pour parler avec son camp et de s’asseoir sur un tabouret quand les autres restaient droits derrière leur pupitre, le corps habité par la fonction dont ils pensent être dignes. Regardez encore, il n’a pas hésité à s’en prendre directement à François Fillon et à Marine Le Pen sur leurs ennuis judiciaires, obligeant même le candidat des Républicains, poussé à bout, à maugréer un « je vais lui foutre un procès ».
Dans la bouche de certains éditorialistes, Philippe Poutou aurait donc été irrespectueux et indigne, même un amuseur. Arrêtons le délire. Il faudra nous sortir le code de bienséance auquel aurait dû se référer le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA). Il s’agit de politique et d’une élection présidentielle qui engage l’avenir de tous. Il ne s'agit pas d’un goûter organisé par Nadine de Rothschild.
L’irrespect est un droit et un devoir quand il s’agit de défendre ses idées ou de dénoncer une injustice flagrante. Il faudrait plutôt remercier Philippe Poutou d’avoir fait le job à la place des autres politiques et même des journalistes à ce moment du débat qui abordait la morale en politique, arrêter de tourner autour du pot et balancer les questions qui s’imposent.
Alors même que l’on fustige l’hypocrisie de la comédie humaine que représente une élection présidentielle, on ne peut pas reprocher à un candidat d’être lui-même. On ne peut pas le critiquer pour être venu dans cette arène télévisée avec son authenticité pour seule arme.