LE MONDE | 20.06.08 | 11h08 • Mis à jour le 20.06.08 | 12h15
Burlington, envoyée spéciale
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Au-delà de la campagne présidentielle, les membres de Democracy for America travaillent à ranimer le militantisme de base. Encourager "une culture de militants plutôt que de sortants".
D'ailleurs, on ne les trouve pas à Washington, mais à Burlington, dans le Vermont, entre lac et sapins.
Ils sont aux avant-postes de la réforme du Parti démocrate et ils n'ont pas été pour rien dans la chute de la maison Clinton. Leurs bêtes noires : les centristes, qu'ils appellent les "Bush
Democrats", la "triangulation" (façon Bill Clinton) et les élus qui ne tiennent pas leurs promesses. "Pour certains démocrates, c'est comme si rien ne s'était produit aux
élections de 2006, dit Arshad Hasan, le directeur exécutif. Ils continuent à donner à Bush tout ce qu'il veut."
Mal leur en prend. Le standard de Harry Reid, le chef de file démocrate au Sénat, a été pris d'assaut il y a quelques semaines jusqu'à ce qu'il enterre le projet de loi sur les écoutes
téléphoniques présenté par George Bush. La dernière campagne de Democracy for America vise Joe Lieberman, ex-démocrate et désormais acolyte du candidat républicain, John McCain. Si nécessaire,
DFA n'hésite pas à susciter des candidatures alternatives quand le candidat désigné par le parti est trop mou, ou trop proche des lobbies, comme "celui du Nouveau-Mexique qui est à moitié
financé par l'industrie pétrolière".
Democracy for America a d'abord été le mouvement d'Howard Dean, le candidat malheureux à l'investiture démocrate en 2004. Ancien gouverneur du Vermont, résolument hostile à la guerre en Irak,
M. Dean avait été le premier à utiliser l'Internet pour récolter des fonds sur une grande échelle (au dernier trimestre 2003, il avait recueilli 15millions de dollars : la presse avait alors
parlé de "révolution").
700 000 MEMBRES DANS 50 ETATS
Après l'échec de novembre, Howard Dean a réussi à s'installer à la tête du parti, grâce au soutien de sa jeune garde. C'est son frère, Jim Dean, qui a repris Democracy for America. Tous les
deux ont pour objectif d'asseoir le parti dans les 50 Etats, au lieu de considérer que les endroits fortement républicains sont perdus d'avance et que rien ne sert d'y dépenser de l'argent.
Après les primaires, Barack Obama a aussi adopté cette stratégie tous azimuts. "Obama poursuit le travail qui avait été entrepris par Howard Dean, notamment en amenant de nouveaux votants
dans le processus électoral", dit Arshad Hasan. Democracy for America compte maintenant 700 000 membres et 850 groupes, répartis dans les 50 Etats.
En quatre ans, le mouvement a formé 16 000 futurs élus ou directeurs de campagne lors de week-ends de "candidature clés en main". Pour 60 dollars, les intéressés bénéficient des
conseils de consultants nationaux que les campagnes paient habituellement très cher. "On a beaucoup parlé du fait que la campagne de Barack Obama est très bien organisée, mais il se trouve
aussi que les activistes sont beaucoup plus malins et expérimentés, explique Jim Dean. En 2003, je me souviens de discussions d'une demi-heure pour savoir si on devait former un comité
d'action politique pour faire 100 photocopies !"
Jim Dean et ses amis pensent déjà à l'après-élection. Ils savent qu'à Washington les élus sont des proies faciles pour les lobbies. "Tous les nouveaux le racontent : dès leur premier jour,
ils ont rencontré un lobbyiste qui leur a tendu une carte de visite en leur disant : je veux organiser une réunion de collecte de fonds pour vous!" Democracy for America veut mettre
en place un "système de soutien" qui montre aux élus qu'ils "n'ont plus besoin d'écouter" les lobbyistes. Jim Dean prévoit que la bataille sera rude. "La couverture
médicale pour tous, ça ne va pas être facile. On ne pourra pas se contenter d'envoyer des e-mails au Congrès. Il va falloir qu'on se montre là-bas." Sur la guerre en Irak, il prévoit aussi
qu'il faudra "pousser les élus à prendre des risques et à dire : ça suffit. On s'en va. On ramène les troupes à la maison". A cinq mois des élections, les citoyens-lobbyistes se
préparent déjà à envahir Washington.