Guerre géorgienne contre les civils ossètes
Du point de vue strictement militaire, l’armée géorgienne c’est : des "conseillers" militaires américains et israéliens, et des armes israëliennes + des armes lourdes ukrainiennes.
Faut-il s’étonner si les russes voient "rouge" ?
http://mai68.org/ag/1428.htm
http://cronstadt.org/ag/1428.htm
http://kalachnikov.org/ag/1428.htm
Source
Notes de Tskhinvali par Rouslan Yarmoluk
Un journaliste du canal ukrainien « Inter », témoin du conflit géorgeo-osséte, se trouvant à l’épicentre des combats, raconte ce qu’il a vécu.
Premiers jours et, visiblement, pas le dernier
Nous avons loués une voiture à Vladikavkaz, et pour 4000 roubles russes nous sommes arrivés à Tskhinvali (capitale de l'Ossétie du Sud) Nous avons roulés plus de 4 heures. À chaque poste de
contrôle on nous demandait des éclaircissements sur notre venue, nos passeports et tous nos documents. En arrivant non loin de la ville, des militaires de l’armée sud-ossétes nous ont arrêtés.
Quand ils ont su que nous venions d’Ukraine, ils n'ont tout simplement plus voulu nous parler, nous reprochant que nos tanks et nos lance-roquettes « Grad » tuaient maintenant de paisibles
civils. Ce qui nous a sauvés c’est qu’avant de partir, j’avais téléphoné à Tskhinvali et ai pu obtenir une autorisation.
Après plusieurs coups de téléphone et de longues explications, nous sommes arrivés à Tskhinvali. Le seul hôtel de la ville est dans le centre, à moins d’un demi-kilomètre de la caserne des
soldats de la paix, nous nous y sommes installés. Nous n’avons pratiquement pas dormi de la nuit, aux alentours grondait l’artillerie. Le matin avec le même taxi et son chauffeur, nous sommes
sortis de la ville en direction du sud, pour filmer. Ce fut une grosse erreur. Un feu croisé se déclencha. De la route où était notre voiture et jusqu’au village géorgien il y avait 44 mètres. De
là-bas, tiraient des BTR, les ossètes répondaient à coup de kalachnikovs.
Nous nous sommes jetés à terre et en roulant sur nous même, nous avons rampés sous les arbres. Combien de temps, sommes-nous resté ainsi allongés, je ne sais pas. Nous comptions les impacts au
dessus de nos têtes, filmant la ville et les explosions. À l’instant où il y eu une accalmie, nous nous sommes précipités vers la voiture et on a foncé. Arrivés en ville, le taxi nous a
abandonnés. Nous avons couru jusqu’à l’hôpital. Il y avait 17 blessés. Le bâtiment avait été mitraillé à l’arme automatique et au canon.
Sur la place centrale il y a un grand brouhaha, on évacue les enfants. Certains partent avec leurs parents, d’autres tout seul. Une "Gazelle" (minibus et taxi collectif) arrive, les gens se
précipitent vers la voiture. Il y a plus de gens voulant partir que prévu et que peut en contenir la "Gazelle". C’est le vice-premier ministre d’Ossétie du sud, Iouri Morosov, qui installe
personnellement les enfants « 2000 enfants ont déjà eu le temps de partir, il en reste encore 1000 environs » raconte le fonctionnaire. Tout le monde attend une seconde voiture.
« Nous combattons pour la patrie »
Jeudi 7 août 2008 à 21 heures – Au poste des combattants sud-ossétes à la frontière est, pour l’instant tout est calme. De jeunes gars, soldats de dix-huit ans, montrent les trous faits dans la
terre par les mortiers. Ils ont, dans leur local, une église peinte sur un mur.
« Les gars l’ont dessiné » dit Aslan. Beaucoup d’entre eux sont chrétiens et ne peuvent aller à l’église en raison des événements militaires. Cela fait déjà trois jours qu’ils sont en faction,
sans relève. « Nous combattons pour la patrie », dit Rouslan presque triste, le plus jeune parmis ses camarades, il a 18 ans.
« Et eux, ils combattent pour quoi, La bas ? » montre le mitrailleur avec sa main, à 400 mètres c’est déjà le territoire géorgien. « Devriez partir d’ici, les gars, cela va commencer bientôt,
c’est vraiment trop silencieux. » Nous avons fait quelques prises de vue, et sommes partis. Deux heures après, ses gars-là, étaient déjà tous morts.
La guerre
À 11 heures du soir, jeudi, les fusées "grad" et l’artillerie, ont commencé à frapper. Les premières fusées sont tombées sur le territoire des unités des forces de paix unies. Juste au moment où
arrivaient les journalistes ; Le commandant de la base devait annoncer quelque chose d’important. Tout le monde s’était rassemblé sur la place d’arme, et là, à trois cent mètres, une roquette est
tombée sur du matériel militaire. Sous les cris des soldats, tout le monde a courut dans le bâtiment de l’état major, où, dans une toute petite pièce, était assis un général fatigué.
« C’est la guerre ; la Géorgie vient de déclarer le début d’une opération militaire à grande échelle » dit Marat Koulakhmetov, responsable des forces de paix unies dont font partie les géorgiens,
les ossètes et les russes. Toutefois, avant le commencement du bombardement, les géorgiens avait simplement quittés leur unité. La deuxième et la troisième salve a transformé le cantonnement
militaire en ruines.
Les journalistes étaient couchés par terre dans le poste de garde, lorsque les "grads" frappèrent la quatrième salve. Du verre et du plâtre se déversèrent sur les têtes. Au commandement, tout le
monde se jeta vers la sortie(…) Sous une grêle d’éclats et de balles, des groupes se précipitaient à l’hôtel. J’ai rampé jusqu’au quatrième étage, dans le noir j’ai attrapé ce qui me tombai sous
la main, puis je suis descendu à la cave. À Ce moment, il y avait dans la cave prés de 70 personnes en y incluant des miliciens locaux.
Les "grads" ont continué à frapper jusqu‘a 4 heures du matin. Des combats se sont engagés dans la ville : Les premiers détachements de spetsnaz géorgiens sont entrés dans Tskhinvali. Des
miliciens par groupe de 5 ou 6 personnes venaient à l’hôtel prendre des munitions, bander les blessées, puis s’en allaient.
Vendredi, À 4h30 du matin, les journalistes décident de se rendre dans la zone des unités des soldats de la paix. Avec les caméras, et tout notre matériel, nous sortons dans la rue. Des tirs de
mortiers éclatent. Je n’avais encore jamais couru aussi vite : plié en deux derrière des murets, un sac à dos sur les épaules, nous courons sous le feu vers les soldats de la paix russes. Le
cantonnement est détruit, il n’y a nulle part où se cacher des fusées. On pousse tous les journalistes dans un semblant de bunker ; c’est un trou recouvert d’une coupole sphérique d’une épaisseur
de 3 millimètres elle même recouvertes de 30 centimètres de terre. Sur le territoire du cantonnement il n’y pas âme qui vive, tous les postes ont été abandonnés. Nous filmons en marche. À
l’endroit de la place d’arme, il n’y a plus que des trous, des obus non explosés traînent à terre.
En fait, tous les soldats sont depuis longtemps dans le bunker. Quand nous y sommes descendus, il y avait déjà prés de cent personnes, les gens, assis ou debout, sont étroitement sérés les uns
contre les autres, par manque de place, au point qu’il est impossible de bouger la main ou le pied… Et voilà qu’arrivent des civils.. Les femmes et les enfants accourent des maisons voisines vers
les militaires à la recherche d’une protection. Dans l’abri, les gens se couchent les uns sur les autres. Les enfants sont dans les bras des journalistes. Tout les portables son éteints afin de
ne pas servir au pointage des armes [Note de do : rappelez-vous ce qui est arrivé à Raúl Reyes des farc (cliquable)].
À 10 heures, vendredi matin, il y a une accalmie de cinq minutes. Nous sortons à l’extérieur, afin de respirer un peu et filmons ce qui reste du cantonnement des soldats de la paix. Nous allons à
la cellule servant de prison préventive ; le sol est en béton la porte est en métal, la cellule fait 4 mètres sur 4. Et voila qu’arrive se dont tout le monde avait peur : Une femme branche son
portable pour appeler des parents à Vladikavkaz et elle leur dit qu’elle se cache dans un bunker sur le territoire du cantonnement des forces de la paix. Alors commença le plus effrayant : à
peine cinq minutes après, des fusées "grads" ont commencé à frapper. Les obus tombaient tellement serrés que les gens ont commencé à se dire mutuellement adieu ; Les enfants se serraient
convulsivement dans les bras de leurs parents. Les tirs ont continué durant deux heures, mais cela sembla à tout le monde l’éternité.
S.M.S D’adieu
Les tanks géorgiens sont entrés dans Tskhinvali. Deux d’entre eux prennent en enfilade la rue centrale à 100 mètres de nous ; L’infanterie avance derrière les tanks. Autour de la ville, toutes
les hauteurs sont occupées par l’armée géorgienne. Sous le couvert de l’artillerie, ils engagent le combat. Des T-64 ukrainiens avec des tankistes géorgiens déversent leur puissance de feu sur
les rues et les maisons. Sans gilet par balle ni casque, nous restons couchés sur le sol. Nous ne pouvons relever la tête ; les balles et les éclats sifflent. Le hurlement des chenilles se
rapproche. Un tank géorgien est entré dans le cantonnement. Il tire à bout portant sur les bâtiments encore intactes. À côté de moi sont allongés deux journalistes et un cameraman, sans se
consulter, tous ont branchés leurs portables pour envoyé un SMS. J’en ai envoyé un à ma femme : « Elève bien notre fille » et, de nouveau, à plat ventre
Cette canonnade, je ne l’oublierai jamais, les collègues russes qui étaient couchés à côté de moi, non plus. Ce sont les miliciens sud-ossètes qui nous ont sauvés ; ils ont engagé le combat dans
la rue et ont détruits deux tanks au RPG. L’un a explosé tout de suite, le second a carrément décollé du sol à cause du stock de munitions.
De petite taille, avec deux lances-grenades dans le dos, une kakatchnikov en bandoulière, il s’appelle Nikolaï.
« On tirait sur eux avec des lances-grenades et des mortiers » dit le soldat ayant détruit le premier tank.
« Comment une chose pareille a pu arriver ? Ce ne sont que de simples civils qui vivent ici – il ne comprend pas - Faisons comme de vrais hommes, sortons et battons-nous face à face, chacun pour
sa patrie. Ils y sont pourquoi les enfants, dans cette histoire ? »
Des tankistes géorgiens ayant pu s’échapper de leurs tanks en feu n’ont pas le temps de fuir, ils sont achevés à coup de crosse par les miliciens qui ont vu ces mêmes tankistes mitrailler la
voiture d’une famille avec deux enfants en bas âge. Dans la rue voisine, les combats battent leur plein. Là-bas, trois tanks tirent sur une école où se sont barricadés des soldats sud-ossétes,
deux tanks sont touchés, le troisième s’éloigne accompagné de fantassins géorgiens.
Ville fantôme
Vendredi 18 heure. Nous restons dans la ville et filmons : Des tanks en feu, des cadavres de soldats et de civils, des maisons mitraillées et détruites. Nous courons vers une rue parallèle où on
vient de détruire deux tanks. Des soldats ossètes nous rattrapent et nous obligent à nous abriter dans la cave d’un collège. Dans cette cave il y a des blessés et des civils.
« Voilà, regardez - nous dis Rouslan, le milicien - dans quelle condition vivent ici les gens ». Contre le mur, sur la terre humide, sont assis des enfants, des femmes, des vieilles. Certains
dorment, d’autres sont assis, dos appuyé contre le mur. Une petite fille tente d’enflammer de l’alcool. Dans cette cave cela fait déjà trois jours que personne n’a mangé, les réserves d’eau sont
quasiment épuisées.
Nous retournons au cantonnement, nous utilisons la parabole de nos collègues russes pour transmettre à Kiev nos vidéos. La nuit, personne ne ferme l’œil. L’artillerie géorgienne matraque la ville
depuis ses positions. Le samedi matin l’armée géorgienne tente à nouveau de prendre la ville. Des tanks sont entrés à nouveau dans Tskhinvali, les combats de rue ont repris.
Les tanks géorgiens ont commencé le bombardement de la station de radio, où se cachent les journalistes et des civils. Dans le ciel on entend des bruits d’avions. On ne sait si ce sont des
chasseurs russes ou géorgiens. Nous filmons le tir d’un avion, les missiles s’en vont exploser dans la montagne. Cela veut dire que se sont les russes qui tirent sur les positions géorgiennes.
Mais, à peine une heure plus tard, un avion d’attaque peint en gris s’apprête à bombarder la station radio d’où nous envoyons nos vidéos. Les journalistes s’égaillent dans tous les sens.
L’avion descend à basse altitude, sort d’un virage et se positionne pour un deuxième virage, et là apparaît un Soukhoï russe. Le Soukhoï mitraille l’avion géorgien, lui transperçant l’aile, il
tombe avec toutes ses bombes à quelques kilomètres de là. Des soupiraux, là ou il reste encore du verre, tombent des éclats.
Dans le ciel règnent les chasseurs et les bombardiers russes, attaquants les positions de l’artillerie géorgienne, qui, durant trois jours, effaçaient sans pitié la ville de la surface de la
terre.
Nous restons
Samedi, 16 heure : les géorgiens enfoncent la défense, et de nouveau attaquent la ville avec l’appui de l’artillerie et des mortiers. L’ancienne base militaire, où s’abritent des journalistes et
des civils, se retrouve en première ligne. Alors, les journalistes, par l’intermédiaire de leurs rédactions, s’adressent aux Géorgiens, leur demandant de laisser un corridor pour l’évacuation des
civils, des blessés ainsi que des journalistes. Mais personne ne réagit à cette demande : le feu géorgien ne s’est pas arrêté !
Alors, les reporters se décident pour une action désespérée : ceux qui ont une voiture décident de forcer le passage à travers la ville vers Djava en direction de Vladikavkaz. Les fenêtres des
voitures sont protégées par des gilets pare-balles. Il n’y a pas de place pour tous. Des femmes et des enfants s’installent dans les voitures. Nous restons. NTV et le 1° canal restent aussi.
Les journalistes font leurs adieux avec ceux qui partent et prient pour qu’ils réussissent. La colonne s’en va. Nous sommes allongés par terre dans la cuisine, sales et affamés. Personne ne fait
plus attention aux tirs dans la nuit. La peur est partie. Il ne reste qu’une indifférence totale et l’apathie. De toute façon, nous ne pouvons rien faire.
L’hôpital
Dimanche matin - Nous n’en croyons pas nos yeux, dans la ville des tanks et des BMP russes avancent : le salut, cela ressemble vraiment à cela ! Nous nous dirigeons vers l’hôpital. L’hôpital a
été détruit par des tirs directs de "grads" ; tous les malades et le personnel médical sont descendus dans la cave.
« Voila, c’est le bloc opératoire improvisé », dit le docteur Vladimir Midove, montrant une cave pleine de toiles d’araignée au milieu de la quelle trône une table avec des instrument
chirurgicaux posés à côté, « On nous amenait toutes les heures, jusqu’à trente personnes. On a opéré tous ceux que l’on pouvait. Malheureusement on n’a pas pu aider certains. »
Dans le couloir de la cave, il y a des lits que l’on a pu descendre des étages. Dessus sont couchés des hommes et des femmes, certains conscients, d’autres pas. Prés du mur, il y a deux jeunes
gens, des journalistes géorgiens. Ils sont arrivés dans les bagages de l’armée géorgienne et n’ont pas eu le temps de partir.
« Nous étions quatre, raconte Taïmour Guiougadze un tbilissite âgé de 23 ans, quand la fusillade à commencé, nous nous sommes cachés sous un porche et sommes tombés sur des miliciens ossètes. Un
journaliste ukrainien vivant en Géorgie et travaillant pour une agence internationale, a, par erreur, pris les soldats sud-ossétes pour des géorgiens et s’est adressé à eux en géorgien, ne tirez
pas, nous sommes journalistes. Il y eut une rafale. Deux sont morts, les deux autres ont été blessés.
Dans la salle de réanimation, au premier étage ont entasse les morts, civils et militaires mélangés. Il y a beaucoup de corps. Tina Zakharova les examine.
« Presque tous ont des orifices au niveau de la tête, faits par des balles, c’est le travail des snipers », raconte le médecin urgentiste. Sous l’effet de la chaleur, les corps se décomposent, il
n’y a pas de chambre froide, et évacuer les morts est impossible. C’est pourquoi, ceux qui sont identifiés, sont enterrés directement dans la cour. Il est impossible d’emmener les corps au
cimetière. On tire là-bas.
Le départ
Nous demandons une voiture aux soldats de la paix russes. Il n’y en a pas. Alors, nous ramassons nos affaires et, ensemble avec mon cameraman, nous quittons la base vers la sortie de la ville,
faire du stop. Rapidement, un camion VAZ avec des miliciens s’arrête, il nous prend. Quand ils apprennent que nous sommes ukrainiens, ils ont les yeux qui sortent de leurs orbites. Mais personne
n’a même essayé de dire quelque chose de méchant. Au contraire, ils nous donnent à chacun une mitraillette, nous devons traverser un col, et là-bas tout peut arriver.
Grâce à Dieu, rien n’est arrivé, nous avons traversés la zone de tir. Nous entrons dans Djava, où il y a déjà des milliers de militaires russes : Toute la 58° armée avec son matériel, avance vers
Tskhinvali.
P.S. Déjà à Vladikavkaz, nous avons rencontrés les journalistes qui sont partis un jour avant nous. Ils sont passés, Cependant, un journaliste a été blessé. Nous sommes restés assis au bord du
fleuve et silencieusement regardions l’onde. L’eau lavera tout, mais pas l’Histoire. Elle remettra tout à sa place et dira qui est responsable dans cette guerre.
Traduction : S.P.S.