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24 avril 2009 5 24 /04 /avril /2009 20:37

Je suis une fille têtue. Ce n’est pas nouveau.

Mais depuis le temps que je tourne autour je pense que j’ai trouvé un argument assez irréfutable qui me permet de conclure ma recherche sur les liens que les communistes devraient entretenir avec la nation (de mon point de vue, aucun), en dehors du cas de l’agression impérialiste stricto sensu, évidemment, mais là c’est une autre question et Lénine en a parlé mille fois mieux que moi.

Si on exclut de nos débats ce qu’on appelle en philosophie politique le concept romantique (et allemand) de "la nation" ( cf Fichte "discours à la nation allemande"), qui équivaut grosso modo à une vision ethniciste du peuple (communauté humaine installée sur un même territoire, possédant une unité historique, linguistique, culturelle et économique ) mais qui n’a jamais eu d’existence politique autre que dérivée en "Etat-nation", on se retrouve avec le concept moderne de la nation, celui qui est techniquement issu de la période des Lumières et prend son plein essor en 1789 en France, et plus tard en Allemagne (milieu du 19ème siècle).

Mais il se trouve que ce concept là, ce concept de nation comme équivalent de peuple, ne correspond plus à aucune réalité, en tout cas en France, de nos jours (depuis longtemps en réalité, je dirais au moins depuis la Restauration) .

Ni politique. Ni constitutionnelle. Ni philosophique.

La nation est la représentation politique du peuple - mais encore faut il savoir de quel peuple ! Ce qu’on entend alors par "peuple".

Pourquoi avoir choisi "nation" si ce que l’on voulait dire c’est "peuple"? Voilà une question intéressante non?

C’est l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 qui pose clairement le principe de la Souveraineté nationale pour toute notre théorie constitutionnelle moderne : "Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément".

Dans ce cadre, la Souveraineté ne peut être exercée par un despote, ni divisée entre plusieurs fractions du peuple : elle est détenue par un être collectif et indivisible, distinct des individus qui la composent.

Aucune fraction du peuple ne peut s’approprier la souveraineté. Aucun corps composant la nation ne peut se l’approprier .

Mais ce qui dans la bouche d’un juriste bourgeois s’appelle "corps" ou "fraction", pour nous marxistes, cela doit être traduit par "classe", je pense.

Autrement dit, si on reconnait la validité du concept de lutte des classes, cet article 3 de la Déclaration de 1789, fondateur politiquement de notre concept de nation fait tout simplement obstacle à la dictature du prolétariat ( que j’appelle "démocratie prolétarienne") !

Pourquoi? Parce que techniquement parlant, la lutte des classes, et surtout, la dictature du prolétariat, visent, SONT l’appropriation de la souveraineté par une "fraction de la nation" ! Cette fraction qu’on peut appeler "peuple -classe".

Encore, accepter la lutte des classes, donc, reconnaître la validité de la division de la société en classes antagonistes, cela implique nécessairement et absolument de se défaire de la nation puisque celle-ci est réputée être "une et indivisible", et que notre combat vise quand même à donner le pouvoir à une classe, celle qui contient la majorité du peuple.

La nation, en tant que concept politique moderne, issue de la Révolution française, qui fondera notre "modernité constitutionnelle" est donc bien un concept bourgeois, car tant qu’on s’y tient on admet, au moins implicitement, de se soumettre à l’idée que "bourgeois et prolos sont dans le même panier" - et on entretient le mythe de l’égalité des membres individuels de la Nation...absolument incompatible avec ce que nous pensons de la société capitaliste !

Si nous communistes nous avons au moins un devoir à l’égard de notre classe (devoir qu’auparavant nous remplissions bien mieux) c’est bien de "traduire", de "démasquer" les paroles bourgeoises et de faire apparaître au grand jour la réalité qu’elles recouvrent.

Tout ceci est lié : souveraineté populaire, dictature du prolétariat, lutte des classes, nation, violence révolutionnaire.

Définitivement, donc, je ne donnerai pas dans la défense de "la nation" et surtout je me garderais bien de m’acharner comme beaucoup tentent de le faire, à effacer 200 ans d’histoire constitutionnelle, juridique, et politique qui firent de la nation ce qu’elle est aujourd’hui.

D’autant que nous avons un "concept" fait pour nous et qui nous tend les bras : celui de peuple, que nous devons expliciter, développer, dans les perspectives de la démocratie prolétarienne, de la démocratie directe, et surtout, articuler avec celui de classe.

http://osemy.blogspot.com




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