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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 16:07

 

Le camp de réfugiés syriens qui ne dit pas son nom

 

ARSAL, Liban (Reuters) - Les tentes blanches siglées UNHCR (Haut-Commissariat de l'ONU pour les Réfugiés) et battues par le vent sont installées à l'extérieur de la bourgade d'Arsal, dans la Bekaa libanaise, à la frontière de la Syrie en guerre.

 

Les enfants courent devant les latrines et les points d'eau.

 

Il s'agit, à ne pas s'y méprendre, d'un camp de réfugiés. Sauf que les autorités vous interdisent de l'appeler ainsi.

 

Le site d'Arsal abrite environ trois cent cinquante personnes qui ont fui les combats dans leur pays natal, c'est, en fait, le premier terrain officiellement géré au Liban par l’ONU pour syriens déplacés qui comporte eau courante, WC et autres aménagements.

 

Mais pour ménager l'extrême susceptibilité au Liban sur le sujet des réfugiés, les autorités font tout ce qu'elles peuvent pour minimiser l'idée selon laquelle Arsal serait un site établi pour des résidents de longue durée.

 

« Ce n'est pas un camp, c'est un site de transit temporaire », insiste un travailleur humanitaire faisant visiter le camp Vendredi 29 Novembre 2013 à un groupe de journalistes.

 

Les états limitrophes de la Syrie redoutent le nombre accru de syriens qui quittent leur pays pour s'installer chez eux, alors que ces pays manquent de ressources et craignent des tensions avec les autochtones.

 

Les libanais ont, il est vrai, des raisons bien particulières de s'inquiéter, eux qui ont accueilli pendant des décennies des milliers de palestiniens venus en 1948 après la nakba (la catastrophe) consécutive à la création de l'état d'Israël.

 

Bon nombre de ces réfugiés ont participé à la guerre civile qui a ravagé le Liban pendant quinze ans et, en 2007, l'armée libanaise a dû intervenir pour séparer combattants sunnites et chiites retranchés dans un camp de réfugiés palestiniens.

 

La guerre civile, de 1975 à 1990, a exacerbé et approfondi la méfiance entre les communautés, sunnites, chiites, druzes et maronites, qui composent le patchwork politique, démographique et confessionnel libanais.

 

Aujourd'hui, certains responsables libanais n'hésitent pas à imputer une montée de la criminalité à la présence des déplacés syriens.

 

À QUAND LE FEU VERT?

 

« Notre système politique est confessionnel, d'où la méfiance à l'idée même d'évaluer la viabilité de camps », explique Makram Malaeb, qui dirige la cellule de réponse à la crise syrienne au ministère libanais des affaires sociales.

 

« La question de la sécurité se pose également, ce sont des endroits où les activistes peuvent vivre ».

 

Le Liban a déjà été le théâtre d'affrontements armés entre partisans et adversaires des belligérants syriens. Les responsables craignent que les rebelles transforment les camps de réfugiés en camps de recrutement et d'entraînement, entraînant un peu plus le pays dans la spirale du conflit.

 

Jusqu'à la construction du camp d'Arsal, les réfugiés syriens s'étaient installés dans des bâtiments inachevés, chez des amis ou dans des tentes et des abris de fortune.

 

Le nouveau site de transit est un luxe en comparaison. Le terrain a été aplani, les tentes sont uniformes et ceux qui y vivent affirment avoir l'eau courante et bénéficier d'une nourriture correcte. Les toilettes en dur sont même équipées de brosses de nettoyage.

 

« Nous continuons à respecter la politique dite du non camp mais ceci est une exception », explique Makram Malaeb. Les réfugiés devraient être accueillis dans de nouveaux logements au Liban dans un délai de deux semaines après leur arrivée, dit-il.

 

Mais il n'existe pas de date-butoir stricte et les réfugiés avec lesquels Reuters a pu s'entretenir disent n'avoir aucunement l'intention de décamper.

 

Obeida al Zahouri, un adolescent de quinze ans, affirme être arrivé il y a deux semaines avec cinq membres de sa famille après le bombardement de leur ville syrienne de Yabroud. « Nous ne savons pas ce que nous allons faire. Il y a soixante dix familles dans le camp et personne ne bouge », dit-il en se protégeant du froid sous une épaisse veste en cuir.

 

Ninnette Kelley, déléguée du HCR au pays du cèdre, explique que l'agence onusienne a identifié des terrains et dégagé des fonds pour dix sept projets de sites similaires dans le pays.

 

« Le problème n'est pas de savoir si le HCR est prêt ou non. La question est de savoir quand le gouvernement donnera le feu vert », souligne-t-elle.

 

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