Accusé par son ancienne compagne et démissionnaire, Julien Bayou déballe sa vie privée pour se défendre
Le secrétaire national d'Europe Écologie-Les Verts (EELV), désormais démissionnaire, entend se défendre des accusations de violences psychologiques de son ancienne compagne et rendues publiques par Sandrine Rousseau. Dans une conférence de presse donnée par son avocate, il dresse le portrait d'une rupture douloureuse et d'une ancienne compagne particulièrement virulente.
Une affaire kafkaïenne, Lundi 26 Septembre 2022, le secrétaire national d’EELV a officiellement démissionné de ses fonctions, dont la charge était devenue intenable depuis que Sandrine Rousseau, députée d'EELV, a rapporté en direct sur le plateau de C à Vous les accusations formulées par une ancienne compagne de Julien Bayou. En cause, précisait l'écologiste féministe, des faits de nature à briser la santé morale des femmes, mais, indiquait-elle une fois hors antenne au journaliste Patrick Cohen, qui n'ont rien de pénal. Lundi 26 Septembre 2022 à 16 heures, au Café de la Mairie du Troisième Arrondissement de Paris, c'est l'avocate de Julien Bayou, Marie Dosé, qui a donné une conférence de presse pour revenir sur la situation. L'objectif était d’expliquer la démission de l'écologiste, une décision prise, rapporte l'avocate, afin de pouvoir se défendre librement des accusations rapportées dans la presse.
Pour la première fois depuis que les faits ont été évoqués dans le Figaro au mois de juillet 2022, l'avocate a apporté des éléments matériels et chronologiques sur ce qui oppose Julien Bayou et son ancienne compagne. « Julien Bayou s'est séparé de sa compagne dans le courant du mois de novembre 2021 », a expliqué l'avocate, « une décision qui fut très difficile, car il avait conscience de la fragilité psychologique de sa compagne, que Sandrine Rousseau a choisi de rendre publique ». Au cours des mois qui suivirent la rupture, le comportement de son ancienne compagne a été pour le moins fluctuant. Se sont succédé des épisodes de tension, de pression et de chantage, ainsi que des menaces et des moments plus apaisés au cours desquels celle-ci lui apportait tout son soutien, notamment pendant la campagne des élections législatives. Elle aurait également insisté sur son désir de pacifier leur relation.
« Le 30 juin 2022, soit quelques jours avant les révélations du Figaro, l’ancienne compagne de Julien Bayou lui a adressé un message pour lui proposer de garder la maison qu'ils avaient acquise ensemble, maison qu'elle occupe encore. Deux heures plus tard, elle transmettait à la famille et aux amis de Julien Bayou, à Sandrine Rousseau et à la cellule de signalement d'EELV, un mail qualifiant son ancien compagnon de manipulateur lâche et évoquant son intention de mourir pour protéger les autres » a dit Marie Dosé. Ce mail a été consulté par l'avocate, qui a assuré à Marianne qu'il ne contenait aucun fait précis. C'est ensuite, le 30 juin 2022 vers 22 heures, que l’ancienne compagne de Julien Bayou lui aurait écrit qu'elle avait absorbé des médicaments afin de se suicider. « Celui-ci alerta aussitôt les pompiers qui semblaient déjà avoir été informés de la situation, elle fut rapidement prise en charge et hospitalisée », a dit l'avocate.
Enfin, ainsi que Julien Bayou l'avait déjà expliqué au Figaro, il a reçu, quelques jours après la tentative de suicide, un message de cette ancienne compagne qui, selon lui, lui intimait de s'inquiéter, « je vais revenir en force ». Marie Dosé précise que, dans ce courriel, « elle l'assure de sa volonté de le mettre hors d'état de nuire et elle lui prédit une chute douloureuse ». Le courriel se termine par les mots suivants, « ta mère te vomit d'où elle est ». Il faut rappeler que la mère de Julien Bayou est morte lorsqu'il avait cinq ans à peine. L'avocate de Julien Bayou a assuré à la presse avoir de nombreux éléments matériels, notamment écrits, qui prouvent la version de l’ancien secrétaire national d'EELV. Comme le texto suivant, que son ancienne compagne aurait envoyé en 2020, « je crois avoir tout fait pour que Julien me quitte, parce que je ne suis pas à la hauteur et parce qu'il n'est pas en sécurité avec moi ».
C’est justement pour pouvoir présenter ces éléments de défense que Julien Bayou demande à son parti de pouvoir être entendu. « Julien Bayou attend de son parti qu'il ne cède ni à la suspicion, ni à l'intimidation, encore moins à l'instrumentalisation des souffrances », a dit Marie Dosé, assurant qu'elle n'avait pas été mandatée pour déposer des plaintes pour diffamation, atteinte à la vie privée ou dénonciation calomnieuse. Mais Julien Bayou et son avocate critiquent férocement la cellule de lutte contre les violences sexistes et sexuelles d’EELV, à laquelle Julien Bayou assure avoir adressé par quatre reprises des demandes afin d'être entendu.
« On le lui a refusé à quatre reprises, estimant que ce n'était pas le moment. La cellule d'enquête sur les violences sexuelles et sexistes d'EELV s'est autosaisie à la suite du courriel envoyé par son ancienne compagne. Nous ne savons rien des progrès de cette enquête ni même si elle a commencé. Julien Bayou est délibérément tenu dans l'ignorance des faits qui lui sont reprochés et des accusations portées contre lui. Cette procédure paralysante n'offre aucune garantie et ne respecte en rien les principes démocratiques élémentaires des droits de la défense et du contradictoire, faisant de Julien Bayou un présumé coupable. En l'absence de procédure judiciaire, Julien Bayou attend de pouvoir présenter sa version et les preuves qu'il dit avoir en sa possession au cours d'une procédure contradictoire », a répété Marie Dosé à Marianne. Celle-ci ne peut donc se faire que devant le parti, seule instance saisie à ce jour des faits largement rapportés.
Cette polémique sur sa vie conjugale doit être particulièrement amère pour l'écologiste, très engagé dans le mouvement Me Too et contre les violences sexistes et sexuelles ces dernières années. La dernière affaire en date est la suivante. Il y a quelques mois, le candidat du Mouvement de la France Insoumise (MFI) aux élections législatives Taha Bouhafs était écarté du MFI et devait retirer sa candidature pour des soupçons de violences sexuelles. La même semaine, à l’annonce de sa candidature aux élections législatives, Taha Bouhafs avait souffert de messages racistes, s’attirant le soutien unanime de ses camarades de gauche, dont Julien Bayou. Mais après la révélation de l’affaire des violences sexuelles, le secrétaire national revenait sur ses propos et il effaçait son tweet de soutien, « j’ai soutenu Taha Bouhafs contre le racisme. Je prends connaissance des accusations de violences sexuelles contre lui. Soutien aux victimes, nous vous croyons. Aussi, je supprime mon tweet de soutien à Taha Bouhafs pour éviter toute mauvaise interprétation ».
Les deux affaires partagent quelques points communs. Taha Bouhafs et Julien Bayou ont été visés par des accusations qui n’ont pas été, à ce jour, suivies de plainte judiciaire. Avec une différence majeure, Taha Bouhafs est accusé d’agression sexuelle, voire de viol, selon les informations du Monde. Les faits de nature à briser la santé morale des femmes rapportés par Sandrine Rousseau, et visant Julien Bayou, n'ont, de son propre aveu, rien de pénal. Mais les deux affaires ont été instruites par les cellules contre les violences sexistes et sexuelles de leurs partis respectifs, EELV et le MFI, et les deux concernés ont été très critiques du caractère opaque et de leur fonctionnement incertain. Surtout, les deux hommes se plaignent de n’avoir pas pu se défendre devant lesdites commissions.
Le Julien Bayou d’aujourd’hui condamnerait-il de manière aussi claire l’éviction de Taha Bouhafs ? La démission de Julien Bayou rappelle un principe. A EELV, le soupçon suffit. C'est en tout cas la ligne telle qu'elle a été assumée par Yannick Jadot pendant la campagne des élections présidentielles. Interrogé sur le plateau de France Info au mois de décembre 2021 sur les accusations de violences sexuelles et sexistes visant les ministres d’Emmanuel Macron, le candidat d’EELV déclarait que, s’il était élu, dans son gouvernement, il n’y aurait aucun ministre accusé de ces violences, le soupçon suffit.