À Paris, les manifestants posent la première pierre d’une lutte d’ensemble contre les licenciements
Samedi 23 Janvier 2021 à Paris, plusieurs milliers de manifestants étaient présents à l’appel des salariés de Travel Union International (TUI) France et de différentes organisations politiques et syndicales pour manifester contre les licenciements. Des raffineurs de Grandpuits, des salariés de Svenska Kullager Fabriken (SKF), de Cargill et de General Electric, étaient notamment présents. Une première date de coordination de secteurs confrontés à des plans sociaux qui appelle d’autres initiatives en ce sens.
« Il y a quelques semaines, nous avons dit que pour vaincre ces plans sociaux il fallait nous mettre tous ensemble. Nous avons donc téléphoné aux salariés de Cargill, d'Auchan et de Grandpuits », au micro de Révolution Permanente, Lazare Razkallah, délégué de la Confédération Générale du Travail (CGT) de TUI France, revenait Samedi 23 Janvier 2021 sur l’initiative à l’origine de la manifestation pour l’interdiction des licenciements et contre les suppressions d’emplois. Au départ de l'assemblée nationale, celle-ci s’est déroulée dans les rues du septième arrondissement de Paris, passant par le ministère du travail pour finir à quelques mètres des locaux du mouvement des entreprises de France (MEDEF)
Deux mille manifestants ont répondu à l’appel. Dans le cortège, la présence remarquée des raffineurs de Grandpuits, venus à une vingtaine en tenues et équipés de leurs désormais fameux barils. A leurs côtés d’autres travailleurs d’entreprises confrontées à des licenciements telles que Nokia, Cargill, Sanofi ou encore SKF. Les travailleurs du site situé à Avallon dans l’Yonne sont en grève et ils refusent le Plan Social d'Entreprise (PSE) que tente d’imposer la direction. « Nous sommes en grève permanente, nous sommes dans le combat. La lutte contre les licenciements va être un combat difficile contre le patronat et c’est tous ensemble qu’il va falloir le mener », dit Lhoussaine Amchi, délégué de la CGT Force Ouvrière de SKF. Les politiques ont également répondu à l’appel, comme Olivier Besancenot du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), Jean-Luc Mélenchon et des militants du Parti Communiste Français (PCF), présents dans la manifestation.
Si toutes les entreprises présentes ne sont pas en grève, de nombreux manifestants insistent sur la nécessité de la coordination comme levier dans la lutte contre les licenciements. D’autres dénoncent la passivité des directions syndicales. Militant de la CGT et membre du Collectif Aéro, Gaëtan Gracia note ainsi que « les directions syndicales nous laissent face à l’hécatombe. Nous attendons depuis longtemps un plan de bataille conséquent, mais il n’y a rien à part une date isolée le 4 février 2021 et des dates de fédérations, sans plan de bataille conséquent ». Expression claire de cette attitude, la direction de la CGT n’a pas appelé à la manifestation du Samedi 23 Janvier 2021, dont était totalement absent Philippe Martinez.
Corollaire de cette absence de plan de bataille coordonné, de nombreuses entreprises choisissent la voie de la négociation et évitent l’épreuve du rapport de forces. Une logique qu’une partie des manifestants était bien décidée à battre en brèche, Samedi 23 Janvier 2021. « Je ne suis pas content de voir ce qui s’est passé à Bridgestone à Béthune, qui ont signé un accord et se félicitent de ne pas avoir brûlé de pneus. Il n’y a aucune prime, aucun PSE quel qu’il soit, qui ne vaudra notre emploi. Partout où l’employeur veut licencier, il faut qu’on se lève et qu’on se mette debout », expliquait ainsi Michaël Wamen, figure de la lutte des Goodyear au micro de Révolution Permanente. « Ne tombez pas dans la farce du dialogue social, prenez la rue, mettez-vous en grève et occupez vos usines. Ils ne comprennent que le rapport de forces », lançait de son côté Adrien Cornet de la CGT de la raffinerie de Grandpuits.
En définitive, cette première manifestation coordonnée aura constitué un point d’appui pour avancer dans la construction d’un front uni contre les licenciements et elle aura permis de visibiliser la volonté de combat de différents secteurs, en dépit de la passivité des directions syndicales. Il s’agit désormais de continuer ce travail en coordonnant les secteurs en grève et en mettant en avant la nécessité de lutter non seulement contre les suppressions d’emplois, mais aussi pour l’interdiction des licenciements, revendication qui ne pourrait être imposée que par une lutte de très grande ampleur.
Une perspective que craint d’ailleurs plus que tout le gouvernement. Comme l'écrivait le Monde du Vendredi 22 Janvier 2021, la majorité et le gouvernement s’inquiète en effet que la colère s’agglomère et qu'elle donne lieu à un printemps social. Une crainte incarnée très concrètement Samedi 23 Janvier 2021 par le dispositif policier massif déployé pour encadrer le cortège et pour tenter d’étouffer la contestation dans l’œuf. De quoi poser la question d’un mouvement d’ensemble qui, à partir de la lutte contre les licenciements, prenne également en charge la question de la répression et des violences policières en lien avec les mobilisations contre la loi de sécurité globale.