actualité politique nationale et internationale
Il est urgent de changer de stratégie sanitaire contre le coronavirus
Dimanche 27 Septembre 2020
Dans cette tribune, près de trois cent scientifiques, universitaires et professionnels de santé, critiquent la dérive de la politique sanitaire du gouvernement français. Ils estiment qu'elle conduit à des interprétations erronées des données statistiques et à des mesures disproportionnées et ils demandent d'évaluer nos connaissances réelles pour définir démocratiquement une stratégie sanitaire.
Avis au lecteur, cette tribune devait initialement paraître dans le Journal Du Dimanche (JDD) du Dimanche 27 Septembre 2020. Acceptée Samedi 26 Septembre 2020 par le journaliste en charge de la rubrique Tribune Opinion, elle devait paraître intégralement sur le site internet du journal et faire l'objet d'un article dans la version papier du Dimanche 27 Septembre 2020. Le journaliste nous disait s'en féliciter car cela allait permettre un débat contradictoire avec d'autres opinions très alarmistes exprimées dans ce journal. Samedi 26 Septembre 2020 à 16 heures, ce journaliste nous a pourtant prévenu que sa rédaction en chef interdisait la publication. Certitude de détenir soi-même la vérité, couardise ou volonté de ne pas déplaire au gouvernement, nous ignorons les raisons de cette censure que personne n'a jugé utile, ou tout simplement courtois, de nous expliquer.
Tandis que le gouvernement prépare une nouvelle loi, la quatrième en six mois, prolongeant le régime d’exception qui a remplacé l’état d’urgence sanitaire, le ministère de la santé a encore annoncé Mercredi 23 Septembre 2020 des mesures restrictives des libertés individuelles et collectives qu'il prétend fondées scientifiquement sur l'analyse de l'épidémie de coronavirus. Cette prétention est contestable. Nous pensons au contraire que la peur et l’aveuglement gouvernent la réflexion, qu'ils conduisent à des interprétations erronées des données statistiques et à des décisions administratives disproportionnées, souvent inutiles voire contre-productives.
Que savons-nous de cette épidémie et de son évolution ? Le coronavirus menace essentiellement les personnes dont le système immunitaire est fragilisé par le grand âge, la sédentarité, l'obésité, des comorbidités cardio-respiratoires et des maladies sous-jacentes de ces systèmes. Il en découle que la priorité sanitaire est de protéger ces personnes fragiles. Le respect des gestes barrières et le lavage des mains en sont deux des clés.
Le coronavirus circule dans le monde depuis environ un an. Il continuera à circuler, comme l'ensemble des autres virus qui vivent en nous et autour de nous et auxquels nos organismes se sont progressivement adaptés. L'espoir de faire disparaître ce virus en réduisant à néant la vie sociale est une illusion. D’autres pays, en Asie comme en Europe, n’ont pas eu recours à ces pratiques médiévales et ne s’en sortent pas plus mal que nous.
Quant à l’évolution, l’idée d’une deuxième vague reproduisant le pic du mois de mars et du mois d'avril 2020 n’est pas un constat empirique. C’est une théorie catastrophiste issue de modélisations fondées sur des hypothèses non vérifiées, annoncée dès le mois de mars 2020 et ressortie des cartons à chaque étape de l’épidémie. Au mois d'avril 2020 lors du soi-disant relâchement des français, au mois de mai 2020 avant le déconfinement, au mois de juin 2020 pour la fête de la musique, en été pour les clusters de Mayenne ou les matchs de football et à nouveau cet automne face à une augmentation des cas certes significative, mais lente et grevée d’incertitudes diagnostiques. Au final, cette prétendue deuxième vague est une aberration épidémiologique et nous ne voyons rien venir qui puisse être sérieusement comparé à ce que nous avons vécu au printemps dernier.
Nous ne comptons pas les mêmes choses. Nous voyons que, pour des raisons difficiles à cerner, panique et pression politique ou médiatique, les autorités sanitaires françaises ne parviennent pas à stabiliser une communication honnête sur les chiffres de l'épidémie. Elles ont surtout abandonné l'indicateur fondamental, la mortalité, pour ne retenir que celui de la positivité de tests pourtant incapables de distinguer les sujets malades des personnes guéries.
Cette politique du chiffre appliquée aux tests conduit à une nouvelle aberration consistant à s'étonner du fait que nous trouvons davantage aujourd'hui ce que nous ne cherchions pas hier. Elle conduit par ailleurs à des classements des départements ou des régions en zones plus ou moins dangereuses auxquelles nous donnons de jolies couleurs qui cachent la fragilité et l’arbitraire du comptage, telle région se retrouvera en zone rouge alors qu’il y a moins de dix patients en réanimation, une autre verra tous ses restaurants fermés sans que l’on ait la preuve que ce sont des lieux de contamination majeurs. Tout cela n’est guère cohérent.
Les autorités sanitaires ne s'interrogent pas non plus sur la surmortalité à venir des autres grandes causes de décès, cancers et maladies cardio-vasculaires, dont la prise en charge est délaissée, ni sur le fait qu'une partie des sujets classifiés parmi les personnes mortes du coronavirus sont en réalité mortes en raison d’une autre pathologie mais classifiées coronavirus parce qu’elles étaient également porteuses du virus. Or des études récentes montrent que ce groupe pourrait constituer jusqu’à trente pour cent des morts au Royaume Uni ces dernières semaines.
Cette façon de compter de plus en plus comme morts du coronavirus des personnes en réalité atteintes avant tout d’autres maladies est probablement l’explication principale du fait que, comme cela est écrit en toutes lettres sur le site de l'Institut National des Statistiques et des Etudes Economiques (INSEE), « depuis le premier mai 2020, nous ne constatons pas en France d’excédent de mortalité par rapport à 2019 ».
Il découle de tout ceci qu'il n'y a pas de sens à paralyser tout ou partie de la vie de la société en suivant des raisonnements qui sont parfois erronés dans leurs prémisses mêmes. Il est urgent d'arrêter l’escalade et d'accepter de remettre à plat nos connaissances scientifiques et médicales pour redéfinir démocratiquement une stratégie sanitaire actuellement en pleine dérive autoritariste.
Premiers signataires
Laurent Toubiana, Jean-François Toussaint, Laurent Mucchielli, Jean Roudier, André Comte-Sponville, Christian Perronne, Marc Rozenblat, Alain Wurtz, Catherine Gire, Bernard Dugué, Jean-Louis Rouvillain, Philippe Brouqui, Isabelle Vinatier, Marnix Dressen-Vagne, Bruno Péquignot, Marianne Bordenave-Jacquemin, Dominique Andolfatto, Dominique Labbé, Bernard Marsigny, Martine Wonner, Thierry Gourvénec, Farhad Khosrokhavar, Florent Gaudez, Gérard Delépine, Nicole Delépine, Roland Pfefferkorn, Raphaël Liogier