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31 octobre 2016 1 31 /10 /octobre /2016 19:03

 

http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/10/31/turquie-arrestation-du-redacteur-en-chef-du-quotidien-d-opposition-cumhuriyet_5022900_3214.html

 

Arrestation du rédacteur en chef du quotidien d’opposition Cumhuriyet

Plus de dix mille fonctionnaires sont par ailleurs mis à pied.

Par Marie Jégo, correspondante permanente du Monde à Istanbul

La police turque a fait une descente, Lundi 31 Octobre 2016 à l’aube, aux domiciles de plusieurs journalistes du quotidien d’opposition Cumhuriyet. A Istanbul, le rédacteur en chef, Murat Sabuncu, a été arrêté. A Ankara, le journaliste Güray Öz a été interpellé. En revanche, les policiers n’ont pas trouvé chez lui Akin Atalay, le président du directoire, qui séjourne actuellement à l’étranger.

Treize mandats d’arrêt ont été émis contre les journalistes du quotidien soupçonnés, selon le procureur d’Istanbul, de connivence avec deux organisations terroristes, le mouvement de Fethullah Gülen, accusé d’avoir fomenté la tentative de coup d’état du Vendredi 15 Juillet 2016, et le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), interdit en Turquie.

Cumhuriyet est un quotidien à faible tirage, cinquante deux mille exemplaires, mais très respecté en Turquie. Axé sur les valeurs républicaines transmises par Mustapha Kemal Atatürk, il a fait sienne la défense de la laïcité, notamment en publiant, en 2015, les caricatures parues dans Charlie Hebdo. Le 6 mai 2016, Can Dündar, l’ancien rédacteur en chef, ainsi qu’Erdem Gül, le correspondant du journal à Ankara, ont été condamnés, en première instance, à cinq ans de prison ferme pour avoir publié une enquête sur la livraison d’armes, par les services turcs, à la rébellion contre Bachar al Assad, en Syrie. Victime d’une tentative d’assassinat devant le tribunal ce jour-là, Can Dündar vit aujourd’hui en exil en Europe.

Recteurs nommés par Recep Tayyip Erdogan

Ces arrestations s’inscrivent dans le cadre d’un nouveau tour de vis déclenché Samedi 29 Octobre 2016, le jour où la fondation de la république est célébrée dans toute la Turquie.

Depuis le putsch manqué du Vendredi 15 Juillet 2016, l’état d’urgence est en vigueur dans le pays, ce qui permet à l’exécutif d’agir sans entraves, sans passer par le parlement, encore moins par les instances judiciaires, ravagées par les purges après l’éviction de plus de quatre mille magistrats.

Selon le nouveau décret publié Samedi 29 Octobre 2016 environ dix mille fonctionnaires ont été mis à pied, quinze médias ont été fermés, les droits des avocats ont été limités et les recteurs d’université seront dorénavant nommés par le président Recep Tayyip Erdogan. Les décrets précédents avaient permis, au nom de la lutte contre le « terrorisme », de limoger cent mille fonctionnaires et d’arrêter plus de trente mille personnes. Le dernier en date met donc à pied dix mille cent trente et une personnes, dont deux mille cinq cent trente quatre au ministère de la justice, trois mille quatre cent quatre vingt six au ministère de l’éducation, deux mille sept cent soixante quatorze au ministère de la santé et cent une personnes au ministère de la défense.

Le nouveau décret porte surtout un rude coup à l’exercice du métier d’avocat. Dorénavant, leurs conversations avec leurs clients soupçonnés de « terrorisme » seront enregistrées, la présence d’un gardien sera obligatoire et les documents écrits échangés devront être visés par les autorités. Si le juge l’estime nécessaire, les visites de l’avocat pourront être supprimées pendant six mois. Les partis d’opposition et les défenseurs des droits de l’homme reprochent au gouvernement de profiter de l’état d’urgence, prolongé jusqu’en janvier 2017, pour museler toute forme d’opposition sous couvert de lutte contre le terrorisme.

Les quinze médias fermés Samedi 29 Octobre 2016 sont des médias kurdes connus, tels l’agence de presse Dicle et le magazine mensuel Evrensel Kultur.

Dimanche 30 Octobre 2016, Gültan Kisanak et Firat Anli, les deux maires de Diyarbakir, la capitale du sud est à majorité kurde, qui avaient été interpellés quelques jours plus tôt, ont été inculpés pour « soutien logistique à une organisation terroriste ». Politiciens respectés, les maires sont accusés, entre autres, d’avoir fourni des véhicules municipaux pour les enterrements de rebelles du PKK.

 « Tout vient d’une seule personne. On nous traîne vers le régime présidentiel à poigne, comme un fait accompli. Il s’agit d’un abus du régime d’état d’urgence », a dénoncé la députée Lale Karabiyik, du parti républicain du peuple (CHP), premier parti d’opposition au parlement, à l’agence Anadolu.

Le président Recep Tayyip Erdogan, qui a réitéré Samedi 29 Octobre 2016 sa volonté de rétablir la peine de mort, veut une réforme constitutionnelle, soumise au parlement « dans les plus brefs délais », a annoncé récemment le premier ministre, Binali Yildirim. Comme le parti de la justice et du développement (AKP), fondé par Recep Tayyip Erdogan, ne possède pas la majorité nécessaire au parlement, un référendum pourrait être convoqué avant le mois d’avril 2017.

 

 

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