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14 décembre 2018 5 14 /12 /décembre /2018 16:12

 

 

https://www.liberation.fr/planete/2018/12/12/espagne-une-hausse-du-salaire-minimum-pour-calmer-les-ardeurs-catalanes_1697401

 

Une hausse du salaire minimum pour calmer les ardeurs catalanes

Par François Musseau, correspondant permanent de Libération à Madrid

Pedro Sánchez a annoncé Mercredi 12 Décembre 2018 une hausse de vingt deux pour cent du salaire minimum. Une annonce forte qui vise à obtenir le soutien des partis indépendantistes catalans pour rester au pouvoir.

Sous la pression des Gilets Jaunes, Emmanuel Macron, entre autres mesures, a décidé d’augmenter le Salaire Minium Interprofessionnel de Croissance (SMIC) de cent euros. Pris dans la nasse catalane, Pedro Sánchez s’est résolu Mercredi 12 Décembre 2018 à l’augmenter du double. En d’autres termes, le président du gouvernement espagnol s’emploie ainsi à élever le salaire minimum espagnol de vingt deux pour cent, soit la hausse la plus importante depuis 1977. A partir du premier janvier 2019, le salaire minimum espagnol passera de huit cent cinquante huit à mille cinquante euros, soit un déboursement de trois cent quarante millions d’euros pour les caisses de l'état. « Un pays riche ne peut avoir des travailleurs pauvres », a déclaré Pedro Sánchez qui évoque cette mesure depuis l’été dernier. Celle-ci a aussitôt été saluée par son rival politique, quoique actuellement son grand allié parlementaire, Podemos, par son leader Pablo Iglesias, « il était temps que notre pays fasse un geste social, à la fois réel et symbolique, pour montrer qu’il se préoccupe des couches les plus défavorisées ». Et un des porte-parole de cette formation de la gauche radicale, la troisième de la chambre des députés, de fustiger, sur la deuxième chaîne de la télévision espagnole,  « l’indifférence sociale d'Emmanuel Macron, une des causes de l’explosion contestataire des Gilets Jaunes, une rébellion que nous voulons éviter en Espagne ».

Si Pedro Sánchez n’a pas, lui, à affronter une pareille fronde, il doit faire face à une menace permanente de la part des indépendantistes catalans, au pouvoir dans la région, et dont les leaders les plus notoires se trouvent en prison, dans l’attente d’un jugement pour rébellion ou sédition contre l'état espagnol, une charge qui tient à l’organisation du référendum illégal et interdit du premier octobre 2017. Sa décision de rehausser au plus vite le salaire minimum est directement liée à l’épée de Damoclès sécessionniste qui pèse au-dessus de son fragile mandat.

Avec seulement quatre vingt quatre députés, le président du gouvernement espagnol est sur la sellette alors qu’il doit impérativement boucler sans tarder son budget annuel. Or, avec la féroce opposition de la droite du Parti Populaire et de Ciudadanos, le seul soutien en la matière des radicaux de Podemos lui est insuffisante.

Il lui faut l’appui des deux formations catalanes séparatistes, Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) et Parti Démocrate Européen de CATalogne (PDECAT), le parti de l’ancien président du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, réfugié en Belgique pour éviter les sanctions de la justice espagnole. Quant aux nationalistes basques du Partido Nacionalista Vasco (PNV), ils conditionnent leur vote du budget à l’assentiment des catalans.

Les partis catalans approuvent théoriquement le budget à forte coloration sociale de Pedro Sánchez, mais à la seule condition que le pouvoir central se soumette à leur revendication incessante, la tenue d’un référendum d’auto détermination en Catalogne. Une requête relancée la semaine dernière avec insistance par Quim Torra, l’actuel président du gouvernement catalan, au vu d’enquêtes d’opinion accordant une légère majorité en Catalogne aux partisans du divorce avec l’Espagne. Or, étant donné que le gouvernement espagnol du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) ne peut accéder à une telle exigence, le blocage politique est total. « En décidant d’augmenter le pouvoir d’achat des couches populaires, Pedro Sánchez essaie de mettre les indépendantistes catalans au pied du mur afin qu’ils acceptent de voter son budget », souligne le site Infolibre. De manière stratégique, Pedro Sanchez officialisera la hausse de vingt deux pour cent du salaire minimum lors du conseil des ministres du 21 décembre 2018 qui, une fois n’est pas coutume, aura lieu à Barcelone.

La conjoncture catalane pourrait être favorable au pouvoir central. Depuis une marche sociale à Barcelone, le 29 novembre 2018, réunissant médecins, personnel sanitaire, professeurs et fonctionnaires administratifs, la région est sur les charbons ardents. Ces secteurs dénoncent des coupes claires dans les budgets de l’enseignement et de la santé depuis 2011 et ils réclament une amélioration de leurs conditions, notamment la récupération des heures supplémentaires non payées en 2013 et 2014.

Les fonctionnaires de Catalogne étant les seuls des dix sept régions espagnoles à ne pas avoir touché ce manque à gagner. A en croire le gouvernement du PSOE, à Madrid, l’approbation du budget souhaité supposerait aussi la hausse des retraites de deux cent mille catalans. En face, les indépendantistes emmenés par Quim Torra, qui a mis le feu aux poudres en se réclamant de la voie slovène, une nation qui a obtenu son indépendance en 1991 dans le sang, rétorquent que, en cas de sécession, la Catalogne récupérera sa souveraineté fiscale et donc sociale. Si au mois de janvier 2019 Pedro Sánchez ne réussit pas à arracher le soutien des séparatistes catalans pour l’approbation de son budget, il sera obligé d’annoncer des élections générales anticipées, certainement pour le mois de mai 2019.

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