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22 juillet 2012 7 22 /07 /juillet /2012 17:50

 

http://www.liberation.fr/economie/2012/07/20/la-rigueur-de-rajoy-met-l-espagne-en-rogne_834677

La rigueur de Rajoy met l’Espagne en rogne

Vendredi 20 Juillet 2012

Le pays s’est massivement remobilisé contre l’austérité jeudi à Madrid

Par Diane Cambon

Julia Castro a défilé avec tout son attirail de manifestante : tee-shirt vert des professeurs en colère, pancartes marquées d’un «No» barré d’une paire de ciseaux et, dans l’autre main, un sifflet. Fonctionnaire depuis trente ans, cette quinquagénaire madrilène participe chaque jour, depuis une semaine, aux rassemblements spontanés devant le ministère de la Culture et de l’Education contre les coupes budgétaires. Jeudi soir, elle a rejoint l’impressionnant cortège de plusieurs dizaines de milliers de manifestants rassemblés à la Puerta del Sol, dans le centre de Madrid, contre la politique d’austérité du gouvernement conservateur.

Unisson. «Ceci n’est pas une crise, c’est une arnaque», «Touche pas à ma santé», «Rajoy démission», pouvait-on entendre tout le long de la marche. Un cortège compact, où tous les collectifs professionnels étaient représentés. Professeurs, médecins, pompiers, artistes, professions libérales ont pour une fois répondu à l’unisson à l’appel lancé par les syndicats. «Cela fait chaud au cœur de voir parmi la foule d’autres corporations, on sent une solidarité entre les victimes de la crise», assure Noemi, employée au palais de justice, payée au Smic, soit sept cent douze euros brut, et qui va perdre sa prime de Noël. «Nous sommes les dindons de la farce, ceux qui payent pour les erreurs du grand capital», enchaîne Pablo, pompier.

Depuis 2010, les fonctionnaires endossaient les restrictions budgétaires sans trop broncher. L’ex-chef du gouvernement, le socialiste Zapatero, avait baissé de cinq pour cent le salaire des agents publics lors d’un premier plan d’austérité imposé par Bruxelles. Alors que leur traitement est gelé depuis, la suppression de la prime de Noël, qui va entraîner une chute de sept pour cent de leur revenu annuel, a mis le feu aux poudres. Cette mesure a été d’autant plus mal accueillie que le coût de la vie devrait augmenter dès le premier septembre.

Plus tôt jeudi, la majorité conservatrice avait approuvé au Parlement les réformes les plus sévères qu’ait connues la démocratie espagnole. Les députés du Parti populaire ont donné leur feu vert au nouveau plan de rigueur soufflé par Bruxelles, dont l’objectif est d’économiser soixante cinq milliards d’euros d’ici deux ans, pour ramener le déficit public de 8% à 3% d’ici à 2014. Un plan qui s’ajoute à celui du début de l’année, quand l’exécutif de Mariano Rajoy avait adopté un budget permettant de réduire les dépenses publiques de 27,3 milliards d’euros. Un effort de rigueur alors jugé insuffisant par la troïka (Banque européenne, FMI et Bruxelles), surtout après l’aide promise en juin par l’Eurogroupe au secteur bancaire espagnol.

Record. Cette fois, aucun secteur n’échappe aux nouvelles exigences d’austérité : prestations chômage réduites au terme de six mois, suppression de l’équivalent d’un mois de paie pour les fonctionnaires et, surtout, hausse de la TVA qui met en danger certaines professions. Jeudi, le monde de la culture était massivement représenté pour dénoncer la hausse des taxes dans la billetterie, qui passent de huit à vingt et un pour cent. «C’est toute une génération d’artistes qui va disparaître», déplorait l’acteur Javier Bardem, dans le cortège.

Le gouvernement, qui a assuré que les caisses de l’Etat ne pouvaient bientôt plus couvrir les salaires des fonctionnaires, espère récupérer vingt deux milliards d’euros avec cette hausse de TVA. Très en colère contre les réformes, la population espagnole ne cache pas non plus son inquiétude face à un avenir plombé par le chômage (vingt cinq pour cent de la population active) et une économie en récession (- 1,5% du PIB en 2012) qui devrait perdurer en 2013. «Le gouvernement ne fait aucune réforme pour relancer l’emploi, sans pour autant que ses mesures rassurent les marchés», fulmine Juan Antonio, un «retraité indigné».

Vendredi, le taux des obligations espagnoles à dix ans (7,2%) frôlait en effet son record historique. Une hausse vertigineuse survenue après que la communauté de Valence, plombée par les dettes, eut émis une demande officielle d’aide financière au pouvoir central, devenant la première région à solliciter l’intervention de l’Etat. Mais sans doute pas la dernière. Après le sauvetage du système bancaire, Madrid va ainsi devoir gérer la banqueroute de régions. Un contexte qui n’est pas prêt de redonner confiance aux investisseurs étrangers.

 

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