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19 mai 2016 4 19 /05 /mai /2016 18:05

http://www.essonneinfo.fr/91-essonne-info/92021/proche-sd-bounouara-15-ans-ferme

Proche de Serge Dassault, Younès Bounouara prend quinze ans de prison ferme

Par Maxime Berthelot

Jeudi 19 Mai 2016

Jugé depuis le Mardi 10 Mai 2016 pour tentative d’assassinat et violence volontaire avec arme, Younès Bounouara, relais de Serge Dassault dans les quartiers de Corbeil-Essonnes, a été condamné Mercredi 18 Mai 2016 à quinze ans de réclusion criminelle par la cour d’assises d’Evry. Une peine supérieure à ce qu’avait requis le parquet.

Des cris, des larmes et des insultes, à l’annonce du verdict, la famille et les proches de Younès Bounouara n’ont pu retenir leurs émotions, les uns invectivant la partie civile et les journalistes et les autres se précipitant vers le box des accusés pour tenter d’étreindre le prévenu désormais condamné.

Il faut dire que le jugement prononcé par la cour d'assises d'Evry en a surpris plus d’un, quinze ans de réclusion criminelle pour tentative de meurtre avec préméditation et violence avec arme, alors que l’avocat général avait requis douze ans de réclusion criminelle lors de son réquisitoire.

Un verdict que Marie Dosé, avocate de la victime, interprète comme le désaveu « d’un système de défense qui visait à poursuivre ce qu’il se passe à Corbeil-Essonnes devant une cour d’assises ».

Avec ou sans préméditation, telle était la question

« Ce qu’il se passe à Corbeil-Essonnes », c’est ce qui n’a cessé d’apparaître en toile de fond de ce procès, à savoir « le système Dassault », la suspicion d’achats de voix lors des élections municipales de 2008 et 2009 et les conflits que cette distribution d’argent aurait entraîné.

Si Younès Bounouara, quarante trois ans, n’a jamais caché avoir tiré sur Fatah Hou le 19 février 2013, il a expliqué avoir agi après plusieurs années « de harcèlement, de menaces et de tentatives de racket » de la part de la bande à Fatah Hou. Il aurait même été « passé à tabac ». Des pressions qui trouveraient leur origine dans les deux millions d’euros versés en 2011 par Serge Dassault à l’accusé pour le remercier des services qu’il lui rendait dans le quartier des Tarterêts depuis 1995, « cela a fait des jaloux au sein de personnes qui ont grandi dans le même quartier que moi », a déclaré le prévenu au cours du procès.

C’est précisément sur ces éléments que s’est bâtie toute la défense du prévenu, notamment les plaidoiries de ses avocats réclamant l’abandon des charges concernant la préméditation et l’intention de tuer, « il faut parler des violences à Corbeil-Essonnes, a martelé Karine Bouden, l’avocate de l’accusé. Sinon, comment voulez-vous contextualiser ce qu’il s’est passé ? ».

Son client serait en effet passé à l’acte après une altercation avec la victime. « Poussé à bout », il aurait « craqué », tirant sur la voiture de Fatah Hou pour lui « faire peur » et pour qu’il « le laisse tranquille ». Il l’aurait alors touché accidentellement au thorax et à la colonne vertébrale, « je n’ai pas de problème avec le fait qu’il soit coupable de violence volontaire avec arme puisque c’est un fait », a poursuivi l’avocate, « mais cela ne suffit pas à conclure à la préméditation, il n’avait rien organisé ».

« L’intention de donner la mort »

Mardi 17 Mai 2016, l’avocat général avait en effet requis douze ans de prison pour tentative de meurtre avec préméditation. A la suite de l’altercation avec Fatah Hou, les écoutes téléphonique ont révélé que le prévenu a appelé plusieurs amis pour leur dire qu’il allait « crever et canarder » la future victime, demandant notamment à sa femme d’aller lui chercher « son pétard », « il a tiré calmement avec l’intention de donner la mort », a donc estimé le parquet.

« Cela ne constitue en rien la préméditation puisqu’il a agi sous le coup de la colère, après une altercation alors qu’il se rendait à un rendez-vous professionnel », a tenté de justifier l’avocate de l’accusé. « Rien n’était prévu, la preuve, sa femme faisait ses courses au moment du coup de fil ». Avant de faire remarquer que « mon client a ouvert le feu près du café où il avait ses habitudes, en pleine journée et en public, alors qu’il savait son téléphone sur écoute et qu’il n’avait pas prévu sa fuite puisqu’il n’avait même pas d’argent. Vous parlez d’une organisation ».

Marie Dosé s’est de son côté interrogée sur les propos redondants des vingt deux témoins cités par la défense, notamment ceux de la sphère corbeil-essonnoise qui n’avaient « pas de preuves mais ont tous dit la même chose ». Elle s’est également dite surprise d’entendre que Younès Bounouara était victime de harcèlement et de menaces « sans qu’il n’est jamais porté plainte ».

Des allégations qualifiées « d’enfumage » par la défense, accusant la partie adverse de vouloir faire croire à une instrumentalisation de la justice, « on veut laisser penser que l’un est un assassin et l’autre un lanceur l’alerte », a lâché Karine Bouden, faisant allusion au fait que la victime ait déclaré en 2009 aux enquêteurs « avoir touché deux mille euros » pour appeler à voter pour Serge Dassault. Des aveux qui, selon lui, avaient pour but de « dénoncer le système », mais qu’il retirera quelques semaines plus tard après avoir, toujours selon ses dires, « subi des pressions ».

Des arguments qui n’ont visiblement pas suffit à convaincre les jurés, « je pense que la cour d’assises a sanctionné un système de défense mis en place depuis trois ans », a de son côté déclaré Marie Dosé à l’issue du procès. Ils ont tenté de faire entrer en force « la loi de Corbeil et le système Dassault » devant une cour d’assises. Cela n’a pas marché et c’est tant mieux ». Mardi 17 Mai 2016, David Olivier Kaminski, second avocat de Younès Bounouara, avait déclaré, les larmes aux yeux que « par certains aspects, cette affaire est une injustice. Jugez-le bien ».

« Je ne m’explique pas ce verdict »

Mercredi 18 Mai 2016, après une semaine de procès, la cour d’assises a finalement reconnu Younès Bounouara coupable de tentative d’assassinat avec préméditation et de violence volontaire avec arme sur Fatah Hou, mais aussi de violence avec arme n’ayant pas entraîné d’incapacité de travail sur les trois autres personnes présentes dans la voiture de la victime au moment des faits, « vous n’êtes pas cohérent, Monsieur l’avocat général. Vous expliquez avoir des doutes sur le harcèlement dont mon client se dit victime, vous reconnaissez la préméditation, mais vous ne requérez que douze ans de réclusion », avait interpellé Karine Bouden durant sa plaidoirie. Or, vous savez très bien que, quand il y a une réelle préméditation, froide et méthodique, les peines vont de vingt à trente ans. Il faut donc choisir. Il y a-t-il préméditation ou pas ? ».

En condamnant Younès Bounouara à quinze ans de réclusion criminelle, la cour d’assises a tranché. Le condamné devra également verser trente trois mille euros de dommages et intérêts, dont trente mille euros à la victime et trois mille euros, assortis d’un euro symbolique, à René Andrieu, partie civile dans cette affaire.

Ni l’émotion, ni les plaidoiries enflammées des avocats de Younès Bounouara n’auront donc intercédé en sa faveur. « Je ne m’explique pas ce verdict », a conclu Karine Bouden. « Je suis déçue pour Younès Bounouara, nous avons dix jours pour faire appel, nous allons y réfléchir ».

Le condamné, lui, prononcera quelques mots pour tenter de calmer ses proches dévastés par la colère, « arrêtez, cela suffit. Ce n’est pas grave ». Avant d’embrasser une dernière fois les mains de ses proches.

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