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17 juin 2017 6 17 /06 /juin /2017 14:26

 

https://www.defenseurdesdroits.fr/fr/communiques-de-presse/2017/06/visite-des-services-du-defenseur-des-droits-le-lundi-12-juin-a-calais

 

Visite des services du défenseur des droits à Calais

 

Le défenseur des droits dénonce une nouvelle fois les conditions de vie inhumaines que subissent les exilés à Calais

 

Très préoccupé par les faits portés à sa connaissance, le défenseur des droits, Jacques Toubon, a demandé à ses services de se rendre sur place, Lundi 12 Juin 2017. A cette occasion, ses agents se sont longuement entretenus avec de nombreux exilés et les associations leur venant en aide.

Le défenseur des droits demande dès à présent que soit mis un terme aux atteintes aux droits fondamentaux les plus élémentaires dont sont victimes les exilés, notamment les mineurs, et qui demeurent à ce jour sans précédent.

Des atteintes aux droits fondamentaux d'une exceptionnelle et inédite gravité

La volonté de ne plus voir de migrants à Calais conduit à ce que plus aucun abri ne soit toléré. Les personnes, entre cinq cent et six cent selon plusieurs informations croisées, dont des mineurs, dorment à même le sol, quelles que soient les conditions climatiques, parfois avec un sac de couchage donné par les associations. Ils disent être traqués jour et nuit dans plusieurs sous-bois de la ville. Les migrants ne peuvent dès lors plus dormir, ni même se poser ou se reposer et restent constamment sur le qui-vive. Ils sont visiblement dans un état d'épuisement physique et mental.

Tous les points d'eau ayant été supprimés, les migrants ne peuvent pas se laver, ni même boire. Se laver et boire de l'eau est leur principale demande.

Alors que le tribunal administratif de Lille a considéré le 22 mars 2017 que l'interdiction de distribution de repas par les associations était constitutive d'un traitement inhumain ou dégradant, une seule distribution associative est tolérée le soir, pendant une heure, ce qui ne permet pas de nourrir tous ceux qui le souhaiteraient. Les autres sont empêchées par les forces de l'ordre, au motif de consignes préfectorales quel que soit le public concerné, familles et jeunes enfants. Une association procède à des distributions itinérantes, cherchant ainsi à accéder aux exilés qui n'osent plus se rendre sur les lieux de distribution, de peur de se faire interpeller. Depuis une semaine, parce qu'un prêtre s'est ouvertement opposé à la présence policière sur le parvis de son église, une distribution peut y avoir lieu tous les midis.

Un impact particulier sur les femmes et les enfants

Les femmes, qui ne bénéficient plus d'aucune structure dédiée depuis le démantèlement du Centre Jules Ferry, sont susceptibles de faire l'objet de viol et d'exploitation sexuelle.

Certaines femmes ont des nourrissons et plusieurs bébés sont à naître dans les prochaines semaines. Aucun dispositif d'accueil ou d'hébergement ne leur semble accessible alors même que la protection maternelle et infantile impose une telle prise en charge.

Parmi les enfants non accompagnés présents, certains sont primo arrivants, d'autres reviennent de Centres d'Accueil et d'Orientation pour les Mineurs Isolés (CAOMI) avec l'idée persistante de se rendre en Grande-Bretagne. Ils indiquent subir le même traitement. La prise en charge par l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) implique, le soir et la nuit, un passage par le commissariat, ce qui rend particulièrement dissuasive la démarche.

Des associations sous pression

Lorsqu'elles tentent de mettre en œuvre des dispositifs qui devraient l'être par les pouvoirs publics, douches et distribution de repas et d'eau, les associations sont entravées et menacées, verbalisation des véhicules garés devant les locaux associatifs, injonction de mettre aux normes la cuisine d'une association présente de très longue date à Calais et menaces de poursuites pour aide au séjour irrégulier. Le défenseur des droits mène d'ailleurs des investigations s'agissant des entraves qu'auraient subies les associations et les mineurs dans l'accès au dispositif de douches mis en place jusqu'au mois de mai 2017 par le Secours Catholique.

Il est par ailleurs difficile à ces associations de conseiller les migrants sur des démarches d'accès au droit. A cet égard, le défenseur des droits regrette que les départs vers les Centres d'Accueil et d'Orientation (CAO) depuis Calais ne soient plus organisés, de même qu'il ne soit plus possible de déposer une demande d'asile dans la ville, la préfecture située à Lille dissuadant d'entreprendre de telles démarches.

Tout en réitérant ses recommandations générales, notamment à l'égard des mineurs, le défenseur des droits demande dès à présent la fin de cette sorte de traque, l'autorisation des distributions de repas, la mise à l'abri des mineurs sur place et la mise en place d'un lieu où les personnes peuvent se reposer, se ressourcer et envisager la suite de leur parcours migratoire.

Dans son rapport du mois d'octobre 2015, le défenseur des droits écrivait que « depuis les années 2000, c'est la crainte du risque d'appel d'air que pourrait provoquer un traitement digne et respectueux des droits des migrants qui est à l'œuvre dans la gestion de la situation du Calaisis. Pour ne pas prendre ce risque, les pouvoirs publics ont d'abord cherché à rendre le moins visible possible le regroupement de migrants et à ne pas créer de points de fixation ».

Plus récemment, à l'occasion d'observations présentées devant le tribunal administratif de Lille dans le cadre du démantèlement de la Lande, il précisait que « le défaut d'anticipation de ces opérations d'expulsion est contre productif puisqu'il ne fait que déplacer le problème vers un autre site, imposant aux exilés un nomadisme forcé ».

Le défenseur des droits regrette que les faits constatés aujourd'hui lui aient à ce point donné raison. Il exhorte les pouvoirs publics à ne pas s'obstiner dans ce qui s'apparente à un déni d'existence des exilés qui, présents sur notre territoire, doivent être traités dignement, conformément au droit et aux engagements internationaux de la France.

 

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