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12 mars 2022 6 12 /03 /mars /2022 17:50

 

 

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Quelques éclairages historiques sur la Russie de Vladimir Poutine

Par Michel Capron

Lundi 7 Mars 2022

Un impérialisme ne peut être justifié par le rejet d’un autre impérialisme.

La notion de social-impérialisme avait été forgée au début du vingtième siècle par des marxistes de la sociale démocratie allemande pour distinguer les organisations ou les états qui étaient socialistes dans les mots et impérialistes dans les actions, comme l'écrivait Vladimir Lénine dans l'Etat et la Révolution en 1916. La phrase a été utilisée pour la première fois dans les cercles marxistes au cours des discussions du début du vingtième siècle au sein de la Deuxième Internationale ouvrière concernant l’imminence de la première guerre mondiale.

L'usage de cette notion s’est retrouvé plus tard dans la critique maoïste de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS). Pour Mao Tsé Toung, l'URSS était elle-même devenue, après la mort de Joseph Staline, un pouvoir impérialiste tout en maintenant une façade socialiste. L’expression fut reprise par l’Albanie socialiste d’Enver Hodja pour qualifier à la fois l’URSS et la Chine de Mao Tsé Toung.

Aujourd’hui, aux côtés de l’impérialisme dominant mais déclinant des Etats Unis et des impérialismes secondaires britanniques et français avec leur bras armé de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), un impérialisme plus national-impérialiste que social impérialiste cherche à s’affirmer à travers la politique de Vladimir Poutine, un impérialisme nationaliste russe qui, emboîtant le pas au social-impérialisme de l'URSS, renoue avec l’impérialisme tsariste des siècles antérieurs au vingtième siècle.

Nous avons, en effet, trop vite oublié ou pas suffisamment mis l’accent dans l'histoire mondiale sur le fait que la Russie a été un grand pays colonisateur qui a opprimé beaucoup de peuples n’ayant rien à voir avec la civilisation russe.

Du dix-septième siècle jusqu’à la fin du dix-neuvième siècle, elle a conquis progressivement la Sibérie, des terres à l’est de l’Oural, habitées par des peuples asiatiques, les tatars, les iakoutes et les koriaks, qu’elle a asservi grâce à sa puissance militaire. Elle n’a achevé cette conquête sur les bords de l’Océan Pacifique qu’au début du vingtième siècle avec une guerre avec le Japon, qu’elle a perdu. Après la défaite japonaise en 1945, l’URSS s’empara de l’île Sakhaline et des îles Kouriles au nord du Japon qui font encore l’objet en partie d’un contentieux entre les deux puissances.

En Asie centrale, pendant le dix-neuvième siècle, ce sont des peuples musulmans, kazakhs, turkmènes, ouzbeks, kirghizes et tadjiks, qui ont été colonisés avant de devenir des républiques soviétiques, portées par le premier congrès des peuples d’Orient organisé par l’Internationale Communiste à Bakou au mois de septembre 1920, mais rapidement inféodées à Moscou par Joseph Staline. Dans le Caucase, la Géorgie et l’Azerbaïdjan avaient été conquises au début du dix-neuvième siècle.

A l’Ouest, en Europe, la Russie a conquis la Finlande et les pays baltes au dix-huitième siècle avant de les perdre après la première guerre mondiale, puis les trois états baltes ont été intégrés de force dans l’URSS en 1944. La Moldavie, l'ancienne Bessarabie, à popula1on majoritairement roumaine, a suivi à peu près le même sort. La jeune république d’Ukraine a aussi été intégrée dans l’URSS en 1922 et la moitié de la Pologne, déjà annexée en partie au dix-huitième et au dix-neuvième siècle, a été annexée après le pacte germano-sovié1que de 1939.

La Russie a guerroyé contre les impérialismes britanniques et français autour de la Mer Noire pour tenter de récupérer une partie de l’empire ottoman en décomposition à la fin de la première guerre mondiale. C'est ainsi que l’Arménie, après le génocide perpétué par les turcs, a été intégrée en 1920, avant même la constitution officielle de l’URSS au mois de décembre 1922.

L’ambition de Vladimir Poutine, avec la guerre de Géorgie, conduisant à l’indépendance autoproclamée de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, la guerre de Tchétchénie, l’annexion de la Crimée, la vassalisation de la Biélorussie, la répression féroce du récent mouvement populaire par l’armée russe au Kazakhstan et maintenant l’invasion de l’Ukraine, n’est pas de reconstruire l’URSS dont il est si éloigné idéologiquement, mais de reconstituer la Grande Russie des tsars, en étant encouragé par le repli américain et poussé par un ressentiment nationaliste du à l’effondrement de l’URSS, vécu comme une humiliation du peuple russe.

Pour l’instant, Vladimir Poutine n’a réussi qu’à isoler le peuple russe de la communauté internationale et à raviver l’OTAN. Même la Suède et la Finlande, si attachées à leur neutralité, commencent à s’interroger sur leur adhésion à l’OTAN.

Partout dans le monde ont lieu des manifestations de soutien au peuple ukrainien. Nous n’avons pas vu de manifestations de soutien à l’armée russe, surtout pas en Ukraine. Mais c’est peut-être une censure des médias occidentaux dépendants de Cable News Network (CNN).

« Le travestissement de l’agression en victimisation est le piège tendu par la propagande poutinienne qui y dissimule sa volonté de puissance en nécessité défensive. La supposée menace militaire de l’OTAN est brandie pour étouffer l’aspiration démocratique des peuples d’Europe centrale et orientale », écrit Edwy Plenel, que nous ne pouvons pas soupçonner d’être un agent de l’OTAN.

« La gauche internationaliste, qui n’a l’habitude de combattre que l’impérialisme occidental, devrait repenser sa stratégie », écrit le Mouvement Social, une organisation de la gauche ukrainienne.

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