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17 août 2022 3 17 /08 /août /2022 13:20

 

 

https://www.hrw.org/fr/news/2022/08/16/israel-liberer-un-defenseur-des-droits-humains-franco-palestinien

 

Libérer un défenseur franco-palestinien des droits humains

Menacé d’expulsion, Salah Hamouri est maintenu en détention administrative prolongée

Les autorités israéliennes devraient immédiatement remettre en liberté Salah Hamouri, défenseur franco-palestinien des droits humains, actuellement maintenu en détention administrative, et elles devraient annuler la décision de révoquer son statut de résident dans sa ville natale de Jérusalem, a déclaré Human Rights Watch (HRW), mardi 16 août 2022.

Le 7 mars 2022, les autorités israéliennes ont arrêté Salah Hamouri, un avocat qui travaille avec l’organisation de défense des droits des prisonniers palestiniens Addameer, que les autorités israéliennes ont interdite l’an dernier, et elles le maintiennent depuis en détention administrative en l’absence de procès et d’inculpation, sur la base de preuves non divulguées.

Le 17 octobre 2021, le ministère israélien de l’intérieur a révoqué le statut de résident de Salah Hamouri pour manquement à l’allégeance envers Israël, ce qui pourrait entraîner son expulsion de Jérusalem-Est occupée. Or, le droit international humanitaire interdit expressément à une puissance occupante de contraindre les populations sous occupation à lui prêter allégeance. Les révocations de résidence font partie des politiques constitutives des crimes contre l’humanité, d’apartheid et de persécution, commis par les autorités israéliennes contre des millions de Palestiniens.

« Les autorités israéliennes détiennent Salah Hamouri sans procès ni inculpation depuis des mois, elles ont déclaré hors la loi l’organisation de défense des droits humains pour lequel il travaille et elles ont révoqué son statut légal à Jérusalem », a déclaré Omar Shakir, directeur d’HRW pour Israël et la Palestine, « le sort de Salah Hamouri est emblématique de la lutte des défenseurs palestiniens des droits humains qui défient l’apartheid et la persécution perpétrés par Israël ».

Tôt dans la matinée du 7 mars 2022, les forces israéliennes ont arrêté Salah Hamouri, un Palestinien de Jérusalem âgé de trente-sept ans possédant aussi la nationalité française, à son domicile à Jérusalem-Est. Les parents de Salah Hamouri ont déclaré à HRW que l’armée israélienne avait confisqué trois téléphones cellulaires et un ordinateur portables qui, selon eux, attestent de son implication dans les activités du Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), un mouvement politique palestinien doté d’une branche armée. Les autorités israéliennes n’ont pas publiquement fourni de preuves pour étayer cette allégation. Même si de telles preuves existent, le fait de détenir Salah Hamouri pour sa simple association ou son activisme politique avec l’organisation en question, sans aucune preuve de son implication dans un acte de violence, viole son droit à la liberté d’association.

Au cours des premiers mois de sa détention, Salah Hamouri s’est joint à des centaines d’autres détenus pour boycotter les procédures devant les tribunaux militaires en raison du recours massif des autorités israéliennes à la détention administrative. Les détenus ont suspendu leur boycott le premier juillet 2022, Salah Hamouri a fait appel et une cour d’appel militaire a confirmé son ordonnance de détention administrative, jeudi 4 août 2022.

Selon Addameer, Salah Hamouri a déclaré que les autorités israéliennes l’ont classé au mois de juillet 2022 comme un détenu de haute sécurité à la suite d’une lettre ouverte sur sa situation critique qu’il a adressée au président français Emmanuel Macron. À la suite de cette désignation, il a été transféré de la prison d’Ofer, en Cisjordanie occupée, à celle d’Hadarim, en Israël, bien que le droit humanitaire international interdise le transfert de résidents en dehors du territoire occupé. Selon Addameer, les forces israéliennes l’ont enchaîné et fouillé à plusieurs reprises pendant le transfert qui a duré plusieurs heures et elles lui ont fait passer la nuit dans une cage métallique mal ventilée à la prison de Ramleh, dans le centre d’Israël.

Le ministère israélien de l’intérieur a révoqué l’autorisation de résidence de Salah Hamouri en vertu d’un amendement de 2018 à la loi israélienne de 1952 sur l’entrée, qui autorise la révocation de la résidence permanente de toute personne soupçonnée de manquement à l’allégeance à Israël. Dans une lettre adressée à Salah Hamouri dont HRW a pris connaissance, le ministère de l’intérieur pointe du doigt l’appartenance et les activités présumées de Salah Hamouri au FPLP pour justifier la révocation de la résidence, affirmant qu’il se livre à une activité hostile, dangereuse et importante contre l’état d’Israël.

Au mois de décembre 2021, l’Agence Nationale de Sécurité Sociale d’Israël a résilié son assurance maladie parce qu’il avait quitté le pays et qu’il n’avait pas de preuve de résidence.

Salah Hamouri a contesté la révocation et il a demandé une injonction pour bloquer l’expulsion jusqu’à la fin de la procédure. Toutefois, le 10 mars 2022, la Cour Suprême Israélienne (CSI) a confirmé le rejet de la demande d’injonction par un tribunal inférieur, invoquant des informations secrètes selon lesquelles Salah Hamouri représentait une menace sécuritaire. Cette décision lève tout obstacle juridique à son expulsion par le gouvernement israélien.

L’association israélienne de défense des droits Hamoked, qui représente Salah Hamouri dans cette affaire aux côtés de l’avocate israélienne Leah Tsamel, a déclaré que la CSI avait fixé au mois de février 2023 la date de l’audition de contestation de l’expulsion, le temps de se prononcer sur une autre affaire contestant une loi de 2008 autorisant Israël à révoquer la citoyenneté d’une personne sur la base d’un manquement à l’allégeance à cet état. Au mois de juillet 2022, la CSI a confirmé la loi de 2008.

Le ministère israélien de l’intérieur avait révoqué la résidence de cinq autres Palestiniens de Jérusalem-Est occupée sur la base d’un manquement à l’allégeance à la fin de l’année 2021, selon les données du ministère de l’intérieur fournies à Hamoked.

La quatrième convention de Genève stipule expressément, dans son article soixante-huit, que les populations sous occupation n’ont pas de devoir de fidélité à la puissance occupante. L’article quarante-cinq des résolutions de La Haye de 1907 interdit de contraindre les habitants d’un territoire occupé à prêter serment d’allégeance à la puissance hostile. En forçant effectivement les Palestiniens de Jérusalem-Est à quitter leurs maisons, les révocations de résidence équivalent à un transfert forcé, comme l’a documenté HRW. Prises dans le cadre d’un ensemble de politiques visant à consolider une majorité juive à Jérusalem, les révocations de résidence contribuent à maintenir l’apartheid israélien et la persécution de millions de Palestiniens.

Moins d’une semaine après avoir révoqué la résidence de Salah Hamouri, les autorités israéliennes ont déclaré Addameer et cinq autres organisations importantes de la société civile palestinienne comme des organisations terroristes et illégales, en se basant également sur des preuves secrètes qui, selon elles, attestent de liens avec le FPLP. Au mois de novembre 2021, Front Line Defenders a découvert, ce que Citizen Lab et Amnesty International ont confirmé par la suite, le piratage du téléphone de Salah Hamouri, ainsi que de cinq autres défenseurs des droits palestiniens, avec le logiciel Pegasus conçu par la société israélienne NSO Group.

Au premier août 2022, six cent soixante et onze Palestiniens se trouvaient en détention administrative en Israël, soit une hausse par rapport aux quatre cent quatre-vingt-douze Palestiniens détenus entre le mois d’avril 2021 et le mois de mars 2022, selon les statistiques que l’administration pénitentiaire israélienne a fournies à Hamoked.

Les autorités israéliennes devraient cesser la pratique généralisée consistant à maintenir des Palestiniens en détention administrative en l’absence de procès et d’inculpation, a déclaré HRW. Alors que le droit de l’occupation autorise la détention administrative en tant que mesure temporaire et exceptionnelle, la détention de centaines de Palestiniens, souvent pour des périodes prolongées et indéfinies, dépasse de loin ce que la loi autorise, a constaté HRW. En 2014, le Comité des Droits Humains (CDH) de l’Organisation des Nations Unies (ONU) a appelé Israël à mettre fin à la pratique de la détention administrative et à l’utilisation de preuves secrètes dans le cadre des procédures de détention administrative et à veiller à ce que les personnes visées par une ordonnance de détention administrative soient soit inculpées rapidement d’une infraction pénale, soit remises en liberté.

Les autorités israéliennes avaient précédemment placé Salah Hamouri en détention administrative entre le mois d’août 2017 et le mois de septembre 2018. Elles l’ont également emprisonné entre 2005 et 2011, dont trois ans passés en détention provisoire, avant qu’un tribunal militaire ne le condamne à sept ans de prison pour des accusations liées à un complot présumé visant à tuer l’ancien grand rabbin d’Israël. Il a été remis en liberté dans le cadre d’un échange de prisonniers. En 2011, Alain Juppé, alors ministre français des affaires étrangères, a déclaré que l’affaire de Salah Hamouri manquait de preuves solides. HRW a documenté le fait que les procès militaires israéliens, dont le taux de condamnation est proche de cent pour cent, sont loin de respecter les normes judiciaires.

En 2016, les autorités israéliennes ont expulsé la femme de Salah Hamouri, Elsa Lefort, une ressortissante française, et elles lui ont interdit de revenir en Israël pendant dix ans, invoquant des raisons de sécurité et séparant Salah Hamouri d’elle et de leurs enfants, alors âgés de six ans et d’un an. L’interdiction empêche sa famille de lui rendre visite en détention.

Réfléchissant au harcèlement auquel il a été confronté dans un article publié dans Jacobin la veille de son arrestation au mois de mars 2022, Salah Hamouri a écrit que ces actions avaient pour seul objectif de le contraindre à quitter la Palestine. Au mois d’avril 2022, Salah Hamouri a déposé une plainte pénale en France contre NSO Group pour le piratage de son téléphone portable et, au mois de mai 2022, il a soumis une demande à la Cour Pénale Internationale (CPI) portant sur les actions du gouvernement israélien contre lui. Au mois de mai 2022, HRW et onze autres organisations de la société civile ont appelé la France à faire pression contre Israël pour que cessent les violations des droits de Salah Hamouri.

« À travers Salah Hamouri, les autorités israéliennes intensifient leur assaut tous azimuts contre la société civile palestinienne et elles cherchent à créer un dangereux précédent qui leur permettrait de chasser plus rapidement les Palestiniens », a conclu Omar Shakir, « les autorités françaises devraient faire pression pour qu’Israël cesse de harceler Salah Hamouri ».

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