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3 janvier 2009 6 03 /01 /janvier /2009 19:37

Cuba mise sur une détente graduelle avec les Etats-Unis, après l'investiture de Barack Obama

LE MONDE | 01.01.09 | 15h53  •  Mis à jour le 01.01.09 | 15h53


  L'embargo américain contre Cuba sera-t-il remis en cause par le président américain élu, Barack Obama, qui prendra ses fonctions le 20 janvier ? La Havane, qui fête les 50 ans de la révolution, attribue au "blocus américain", condamné tous les ans par l'Assemblée générale des Nations unies, les problèmes de l'économie cubaine.


En 1996, la loi Helms-Burton, votée à Washington, a tenté d'entraver les relations des entreprises non américaines avec Cuba. Mais la Maison Blanche a régulièrement suspendu les mesures de rétorsion de cette loi, pour éviter des conflits avec les pays d'Europe ou des Amériques, comme le Canada.

Les Cubains importent 84 % des denrées alimentaires consommées dans l'île. En dépit de l'embargo, les Etats-Unis sont devenus leur principal fournisseur. Les exportateurs s'accommodent bien d'une situation qui limite la concurrence et leur vaut d'être payés rubis sur ongle, faute de pouvoir recourir au crédit.

En novembre, une enquête d'opinion réalisée dans le comté de Miami-Dade, coeur de la communauté cubaine de Floride, révélait pour la première fois une majorité pour la levée de l'embargo.

A cause de la loi Helms-Burton, la normalisation des relations semblait suspendue à un éventuel consensus au Congrès. En réalité, la Maison Blanche détient l'essentiel des leviers. Malgré l'inefficacité de l'embargo, sa valeur symbolique reste forte. Personne à Washington ne songe à y mettre fin sans contrepartie, comme l'Union européenne l'a fait pour les sanctions diplomatiques adoptées en 2003.

Tout en fustigeant le "blocus", La Havane mise plutôt sur une approche graduelle. La levée des restrictions aux voyages et aux envois de fonds imposées par l'administration Bush, promise par le président élu américain Barack Obama aux électeurs de Floride, serait la bienvenue. Destinée à satisfaire les Cubains-Américains, cette mesure contribuerait à maintenir le flux touristique, une des principales sources de devises, et les remesas, qui améliorent l'ordinaire d'un foyer cubain sur deux (ou sur trois, selon les estimations).

Pour "créer la confiance" entre les deux parties et engager un dialogue, La Havane espère rétablir la coopération et les contacts réguliers dans deux domaines sensibles, les migrations et la lutte contre le trafic de stupéfiants. Cuba est au carrefour des routes de la drogue.

"Une autre crise de "balseros" (boat people), comme en 1994, serait une catastrophe pour les autorités des deux pays", note le Canadien Hal Klepak, auteur d'un ouvrage sur les militaires cubains. Ces derniers accordent un crédit mitigé à la propagande récurrente sur les dangers d'une intervention américaine. Mais ils n'estiment pas moins que l'attitude des Etats-Unis pourrait changer, si La Havane perdait le contrôle de la situation.

En attendant une normalisation graduelle avec Washington, les Cubains ont infléchi leurs relations diplomatiques dans deux directions. D'une part, un resserrement des liens avec la Chine et la Russie. D'autre part, une ouverture avec l'Union européenne et un rapprochement avec l'Amérique latine.

Fidel Castro et la vieille garde orthodoxe croient que rien ne remplace les affinités idéologiques et l'antiaméricanisme partagé. En revanche, d'autres officiels pensent que la dépendance à l'égard du Venezuela peut s'avérer aussi fatale que celle entretenue vis-à-vis de l'Union soviétique, avant la chute du mur de Berlin. L'alliance entre La Havane et Caracas est liée à la présence au pouvoir du président Hugo Chavez, dont le mandat expire en 2013.


PETITS PAS


Le premier déplacement annoncé de Raul Castro à l'étranger, depuis sa prise de fonctions officielle, en février, avait été réservé au Brésil, lors d'un sommet inédit de l'Amérique latine et des Caraïbes sur le développement, à Bahia, les 16 et 17 décembre. Une visite à Brasilia était prévue à cette occasion. M. Chavez avait alors réagi en annonçant une escale préalable au Venezuela. "Si le neveu l'a dit, ça doit être vrai", avait confié Raul Castro à la presse, ironisant à propos de la relation filiale affichée par le président vénézuélien à l'égard de son frère Fidel.

Le Brésil veut devenir le premier partenaire de Cuba. La diplomatie brésilienne n'est pas une affaire de personnes, mais une politique d'Etat. Selon Marco Aurelio Garcia, conseiller diplomatique du président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, Cuba était invité depuis trois ans à rejoindre le Groupe de Rio, un forum politique né lors des négociations de paix en Amérique centrale. Au sommet de Bahia, Raul Castro a franchi le pas.

Plus discrètement, il a rencontré, en marge du sommet, le socialiste chilien José Miguel Insulza, secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA). Il s'agissait du premier contact officiel avec l'OEA depuis que Cuba a été "suspendu" en 1962. L'OEA et M. Insulza sont régulièrement fustigés par Fidel Castro, Hugo Chavez et le président nicaraguayen, Daniel Ortega. Derrière le mur de l'idéologie, le pragmatisme avance masqué, à petits pas.





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