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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 16:23

 

Villiers-le-Bel : l'élu socialiste Ali Soumaré témoigne en faveur de l'un des accusés

LE MONDE | 27 juin 2010 | Marie-Pierre Subtil | 637 mots

En 2007, il était porte-parole des familles des adolescents tués dans l'accident à l'origine des émeutes.

Docteur Jekyll ou Mister Hyde ? Adama Kamara a-t-il tiré sur les policiers, ou au contraire tenté de ramener le calme, lorsque la ZAC de Villiers-le-Bel s'est embrasée les 25 et 26 novembre 2007 ? Des quatre hommes dans le box des accusés, il est celui qui focalise l’attention ce vendredi 25 juin à la cour d’assises de Pontoise (Val d’Oise). Dans un procès pourtant chiche en témoins, les jurés entendent les versions les plus contradictoires.

Les experts, psychiatre et psychologue, dressent le portrait d’un homme, aujourd’hui âgé de vingt neuf ans, à la jeunesse compliquée, qui maîtrise mal ses émotions, et est sujet à « des fragilités narcissiques ». Né dans le Val d’Oise, il a grandi dans la ZAC de Villiers le Bel dans une famille polygame d’origine sénégalaise, et a vécu « comme une ligne de fracture » la séparation des fratries, lorsque l’administration a contraint ses demi frères et sœurs et leur mère à partir. Marié religieusement à l’âge de dix sept ans, il est père de trois enfants.

Très attaché à son image, Adama Kamara se défend d’être un délinquant, se pose en médiateur et fait valoir son désir de changement, assurent les expertes. Il a raté son CAP de cuisinier, a été condamné plusieurs fois à quelques mois d’emprisonnement au début des années 2000, puis a cherché, sans succès, à créer une entreprise de sécurité. Il fut un temps médiateur pour la ville, ce qui, selon lui, a suscité des jalousies dans le quartier.

Le portrait s’assombrit lorsque Maître Laurent Franck Lienard, avocat des policiers blessés, cite l’administration de la prison de Fleury Mérogis, où Adama Kamara est détenu depuis février 2008 : le voilà « insultant, provocateur, leader charismatique négatif, meneur de bagarre entre détenus »

« C’est comme ça que vous le voyez ? », demande l’avocat au témoin alors à la barre. « Non »

« Des noms »

Catégorique et ferme, la réponse vient d’un ami d’enfance de l’accusé. Leurs familles viennent de la même région subsaharienne, ils partagent le même dialecte. Ce témoin, c’est Ali Soumaré, élu conseiller régional d’Ile de France à l’issue d’une campagne électorale malgré lui très médiatisée. En février, ses adversaires de l’UMP l’avaient qualifié à tort de « délinquant multirécidiviste ». Et Ali Soumaré, qui a joué le rôle de porte parole des familles des deux jeunes tués dans l’accident à l’origine des émeutes, assure qu’Adama Kamara était alors à ses côtés en tant que pacificateur.

Lorsque Michèle Alliot Marie, alors ministre de l’intérieur, a invité quelques jeunes de la cité au ministère de l’intérieur, place Beauvau, le vendre di suivant les évènements, Ali Soumaré n’avait pas envie d’y aller. « C’est Adama Kamara qui m’a convaincu », dit il. Tous deux ont fait partie de la délégation, après avoir organisé le concert des « marches citoyennes » dans la cité. « Il a mis beaucoup d’énergie à faire en sorte que la journée se passe bien, je ne vois pas comment il aurait pu se transformer la nuit en délinquant et même en tueur de flics », témoigne Monsieur Soumaré.

Mais la présidente, Sabine Foulon, veut des détails. Dès le début, le ton est agressif. La présidente veut « des noms ». Qui était sur les lieux de l’accident lorsqu’il est arrivé ? Monsieur Soumaré esquive. « Vous n’avez pas à retenir des informations ! » s’indigne Madame Foulon. «Vous avez fait de l’ironie sur ce que j’ai dit », se défend Monsieur Soumaré. Maître Patrick Arapian, avocat de la défense, l’incite à parler de la difficulté d’avoir un pied dans chaque monde, celui de la cité et l’autre. « Les gens se demandent pourquoi on fait ça (une médiation entre autorités et habitants), si on est payés, qui est une taupe, qui est une balance », explique Ali Soumaré.

Manuel Martins, agent de médiation pour la municipalité, est lui aussi venu témoigner en faveur d’Adama Kamara. Comme d’autres, il le décrit comme un bagarreur qui s’est rangé. La présidente s’attarde longuement sur des détails, semble mettre en cause sa parole. « Il n’y a beaucoup de témoins qui viennent de Villiers le Bel, s’insurge alors Maître Arapian, et quand il y en a un, il y a automatiquement une suspicion ».

Marie Pierre Subtil     





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