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11 mai 2016 3 11 /05 /mai /2016 18:28

http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/05/11/quand-le-depute-jean-lassalle-vient-soutenir-nuit-debout-devant-l-assemblee-nationale_4917431_823448.html

Quand le député Jean Lassalle vient soutenir le mouvement de la Nuit Debout parisienne devant l'assemblée nationale

Par Etienne Girard

Comme une vague, ils déferlent sur le bitume mouillé de la place de la Concorde. « Ce n'est pas au patronat de faire sa loi, la vraie démocratie, elle est ici » s’époumonent ces jeunes habitués des rassemblements du mouvement de la Nuit Debout parisienne, le mouvement d’occupation de la place de la République. Il est 18 heures pétantes. Ce Mardi 10 Mai 2016 pluvieux, ils ont décidé de délocaliser exceptionnellement le rassemblement devant l'assemblée nationale, afin de dénoncer le recours de l’exécutif au troisième alinéa du quarante neuvième article de la constitution pour faire adopter la loi travail. « Hier soir, déjà il y avait quelques personnes. Aujourd’hui, nous avons commencé à parler d’un appel à se rassembler vers 11 heures, quand nous avons su que le troisième alinéa du quarante neuvième article allait être utilisé », raconte Théo, vingt trois ans, un habitué de la place de la République qui souhaite « faire la révolution ».

Ils sont plusieurs centaines, cinq cent selon la police, à avoir répondu à l’appel du mouvement de la Nuit Debout parisienne sur les réseaux sociaux. Parmi eux, des militants de la Confédération Générale du Travail (CGT), du Syndicat Unitaire et Démocratique (SUD), du Parti Communiste Français (PCF), du Parti de Gauche et du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), mais aussi de simples citoyens opposés à la loi travail. « Je ne suis jamais allé place de la République. Mais j’ai été sensible à la démarche, le peuple doit s’adresser directement aux députés pour empêcher cette très mauvaise loi pour les salariés », explique Julien, trente sept ans, fonctionnaire, en observant le rassemblement un peu en retrait. Les manifestants savent que l’initiative n’a aucune chance de faire plier le gouvernement mais entendent maintenir l’exécutif sous pression, à l’instar de Julien, trente ans, membre de la commission écologie du mouvement de la Nuit Debout parisienne, « en étant là ce soir devant l’Assemblée nationale, nous montrons que le peuple, c’est nous, et que nous sommes actifs et pas d’accord. Jeudi 12 Mai 2016, il y aura un mouvement de grande ampleur pour faire tomber la loi travail ».

Absence de « casseurs »

Devant le Palais Bourbon, les participants entonnent des chants hostiles au gouvernement et à l'article quarante neuf. « Assemblée nationale, assemblée du capital » vire en tête du hit-parade de la soirée, devançant de peu « tout le monde emmerde l'article quarante neuf ». Dans le même temps, une vingtaine de personnes bloque la circulation à l’entrée du pont de la Concorde, en s’accroupissant en file indienne. « Sans haine et sans violence », clament ces militants devant les Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS). Beaucoup constatent, parfois incrédules, l’absence totale de « casseurs », parmi les participants au rassemblement. « Ils n’ont sûrement pas eu le temps de s’organiser. Mais Jeudi 12 Mai 2016, ils seront là et ils ont déjà leur billet de train », imagine Sylvain, un photographe, habitué des mouvements sociaux.

Même si l’ambiance est relativement sereine, les policiers n’hésitent pas à gazer les manifestants qui s’approchent trop de l'assemblée nationale.

Ce qui exaspère Danielle Simonnet, coordinatrice du Parti de Gauche, « utiliser les gaz lacrymogènes quand il y a une bonne ambiance, c’est lamentable ».

La conseillère de Paris est une des rares responsables politiques à voir faire le déplacement, en compagnie du conseiller régional Eric Coquerel ou de Martine Billard, une ancienne députée du Parti de Gauche. Olivier Besancenot est lui aussi présent, encapuchonné, en anorak bleu. Mais pas un parlementaire en exercice à l’horizon. « Ils sont juste à côté, il faut qu’ils descendent », râle un militant communiste en constatant l’absence de députés de son parti parmi les manifestants. Selon plusieurs participants, seul André Chassaigne, le président des députés du Front De Gauche (FDG), serait passé pour saluer les militants. Danielle Simonnet en remet une couche, « moi, je considère que ma place en tant qu’élue est ici, aux côtés du peuple. Après, chacun fait son examen de conscience. Demandez aux communistes pourquoi ils ne sont pas là ».

« Ces jeunes ont raison »

Vers 20 heures, une rumeur parcourt la foule, un parlementaire est là, parmi les manifestants. Il s’agit de Jean Lassalle, récent démissionnaire du mouvement démocrate (MODEM) de François Bayrou et candidat aux élections présidentielles de 2017.

Sous le regard interloqué des CRS, le député en costume cravate discute avec quelques jeunes en colère. Il en prend même certains dans ses bras. Le député des Pyrénées-Atlantiques a beau avoir voté pour Nicolas Sarkozy au deuxième tour des élections présidentielles de 2012, il se sent aujourd’hui en phase avec les manifestants, « Je soutiens le mouvement de la Nuit Debout parisienne de tout mon cœur. Je vais d’ailleurs place de la République presque tous les soirs. Ces jeunes ont raison, la finance a pris trop de place dans notre société. La loi travail est une loi au service du monde de l’argent ».

Comme la plupart de ces jeunes manifestants, le député souhaite-t-il faire la révolution ? « Je suis pour une transition pacifique, mais le régime doit changer. C’est pour cela que je voterai la motion de censure. Et je suis favorable à une dissolution, il est aujourd’hui trop tard pour le président François Hollande ».

Quelques accolades plus tard, Jean Lassalle doit repartir, on l’attend à l'assemblée nationale. Une jeune femme s’agrippe à lui, « ne partez pas. Quand vous êtes là, la police n’ose pas nous gazer », lance-t-elle. Le député promet de revenir. Un autre manifestant s’approche et lui demande de rapporter de l’alcool. Le candidat à l’élection présidentielle fouille dans sa poche et en ressort quelques pièces, « voilà quatre euros pour toi ». Puis il repart pour l'assemblée nationale, cette fois pour de bon. Certains manifestants sont conquis. « Il est peut-être centriste mais au moins il a le courage de venir nous voir », affirme un jeune homme en tête de cortège.

Quand un de ses amis lui fait remarquer que Jean Lassalle est candidat à l’élection présidentielle, son visage se ferme. « Oui d’accord, il est venu pour nous récupérer. Mais cela reste courageux de sa part ».

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