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31 mars 2012 6 31 /03 /mars /2012 13:16

 

http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2012/article/2012/03/29/nicolas-sarkozy-et-la-cgt-un-amour-decu_1677523_1471069.html#xtor=AL-32280515

 

Nicolas Sarkozy et la CGT, « un amour déçu »

 

LE MONDE | 29.03.2012 à 11h43 • Mis à jour le 29.03.2012 à 17h32

 

Par Alexandre Lemarié et Arnaud Leparmentier

 

Bernard Thibault était le meilleur allié du président. La CGT est devenue le meilleur ennemi du candidat Sarkozy. Pas un jour ne passe sans que le président sortant s'en prenne à la centrale syndicale, qui fut pendant des années son interlocuteur privilégié.

 

Tradition gaulliste exige.

 

C'est flagrant depuis mardi 27 mars. Ce jour-là, Nicolas Sarkozy peaufine avec sa plume, Henri Guaino, le discours qu'il doit tenir le soir à Nantes. Le matin, la CGT a empêché la parution partielle du quotidien Ouest-France, auquel il a accordé un entretien. Le 20 mars, la diffusion d'un entretien de François Hollande avait elle aussi été perturbée.

 

Le président-candidat n'hésite pas longtemps et rédige une charge contre la centrale.  

 

"J'ai un message pour les permanents de la CGT, qui ont scandaleusement empêché la diffusion de Ouest-France, qui avait commis un crime : prendre une interview que je leur ai donnée. Voilà la conception de la démocratie par les permanents de la CGT. Honte sur les gens qui se comportent ainsi. Je leur dis : faut-il que vous ayez peur pour nous empêcher de parler ? Mai vous n'y arriverez pas !", accuse-t-il.

 

Triomphe devant les militants UMP.

 

Pas de censure

 

Officiellement, le quotidien n'est pas paru en raison d'un mouvement de solidarité envers le pôle normand, en redressement judiciaire, du groupe Hersant, dont Paris-Normandie, mais la moitié des cent vingt mille lecteurs de Loire-Atlantique, lieu du déplacement de Nicolas Sarkozy, n'ont pas pu lire Ouest-France. "Le but n'était pas de censurer Sarkozy, mais de défendre des emplois menacés dans la presse", explique Marc Peyrade, secrétaire général de la Fédération des travailleurs des industries du livre, du papier et de la communication CGT (Filpac-CGT). Avant d’ironiser : "Mais si ça l'a embêté, tant mieux ! Et s'il pense que la CGT est contre sa politique, il a peut-être raison..." La centrale de Bernard Thibault a de nouveau eu droit aux attaques de Nicolas Sarkozy mercredi 28 mars, lors du meeting d'Elancourt, dans les Yvelines, promettant de révéler le "dessous des cartes".

 

Explication de ce retournement d'alliance : "C'est un amour déçu", assure un visiteur du soir. "Sarkozy avait compris que Bernard Thibault flingue la réforme des retraites, mais là, il trouve qu'il en fait trop. Il faut se rappeler comment Sarkozy l'a aidé à sortir du conflit des régimes spéciaux en 2007, et qu'ils ont cogéré le pays pendant la crise de 2009", poursuit ce proche du chef de l'Etat.

 

Une paix armée

 

Le pacte fut scellé lors de la réforme des régimes spéciaux. A l'automne 2007, Bernard Thibault est débordé par la Fédération cheminots, dirigée par son adversaire Didier Le Reste. Nicolas Sarkozy l’aide à sortir la tête haute du conflit. Le ministre du travail, Xavier Bertrand, et le conseiller social de l'Elysée, Raymond Soubie, inventent le concept de "signe de reprise du travail", pour sceller un accord sans que nul ne perde la face. Au prix de lourdes concessions financières en faveur des cheminots.

 

Depuis, jamais le président n'a dit du mal en public de Bernard Thibault, avec lequel il affichait ostensiblement sa complicité. Pour mieux attaquer  le MEDEF de Laurence Parisot et humilier François Chérèque, leader de la CFDT, coupable du crime d'avoir révélé, dans un livre, des conversations avec le président. La chorégraphie des sommets sociaux de l'Elysée était bien réglée, Nicolas Sarkozy volant au secours des propositions faites par "Bernard" pour réclamer un délai sur la réforme des retraites ou attaquer Laurence Parisot sur l'inéquitable partage de la valeur ajoutée. En début de mandat, l'heure était à la négociation, une social démocratie à la française faite de compromis, comme celle prônée par Raymond Soubie.

 

Chacun trouvait son intérêt à une paix armée. Chacun trouve désormais son intérêt à l'affrontement. La CGT, parce qu'elle souhaite le retour de la gauche au pouvoir; Nicolas Sarkozy, parce qu'il a décidé de faire campagne pour le peuple, contre les corps intermédiaires, à commencer par les syndicats. Au premier rang desquels la CGT, ce qui lui permet d’agiter le spectre du communisme.

 

 « Conquérir la justice sociale »

 

Le candidat UMP fait mine de s’agacer de l'engagement de la CGT, qui a culminé le 13 mars, date à laquelle le syndicat a appelé à voter contre le président sortant. La centrale, longtemps sous la coupe du parti communiste, a pris officiellement position. Depuis 1995, soucieuse de se dépolitiser, elle s'abstenait de donner des consignes de vote explicites. Pour 2012, le syndicat a adopté un réquisitoire anti sarkozyste, intitulé "Changer de politique, conquérir la justice sociale". Tiré à un million d'exemplaires, ce document - distribué par les militants cégétistes - souligne que le maintien de Nicolas Sarkozy au pouvoir "ouvrirait à coup sûr une nouvelle séquence de lourds reculs sociaux".

 

Déjà le 17 janvier, Nicolas Sarkozy avait été furieux que Bernard Thibault se rende aux Lilas, en banlieue parisienne, pour rencontrer Jean Luc Mélenchon à son Quartier Général de campagne. C'était à la veille de l'ultime sommet social de l'Elysée sur la TVA sociale, censé mettre en scène un président réformateur jusqu'au bout. Le 31 janvier, la CGT organise un meeting sur les retraites au Zénith, à Paris, à la tonalité très anti-Sarkozy.

 

Des attaques à but électoraliste

 

Au fond, le chef de l'Etat se satisfait d'un affrontement qui peut s'avérer fructueux. Dans l'entretien du 11 février au Figaro Magazine, qui lance sa campagne, le candidat annonce son intention de recourir aux référendums, pour forcer les chômeurs à accepter une formation et un emploi. Contre les syndicats, qui gèrent le budget de la formation.

 

La première attaque a lieu le 15 mars lors de la visite d'une fonderie à Suippes, dans la Marne. Vers midi, les délégués CGT et CFDT de Florange (Moselle), qui se dirigeaient vers le Quartier Général de campagne parisien de Nicolas Sarkozy, ont été repoussés par des gaz lacrymogènes. "Que les syndicalistes défendent les syndiqués et ne fassent pas de politique et la CGT se portera mieux", attaque Nicolas Sarkozy. Il ajoute : Les gaz lacrymogènes, c'est jamais bien, mais je ne suis pas décidé à laisser casser quoi que ce soit". "Je dis aux vrais salariés de Florange, ceux qui travaillent, que je suis à leur disposition". Pour les recevoir à l'Elysée en tant que président.

 

Car dans cette période, Nicolas Sarkozy espère pouvoir faire des "coups politiques" avec la CGT, en endossant l'habit du chef de l'Etat. Lorsqu'il se rend, jeudi 9 février, à la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin), dont la fermeture est promise par la gauche, il est fêté par les salariés. Il veut répéter la même opération à Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher), lundi 26 mars. Mais entre-temps, le président est devenu candidat.

 

La CGT refuse de participer à la réunion syndicale à huis clos dans une centrale nucléaire, transformée en terrain de campagne. "Curieux", a osé Nicolas Sarkozy.

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