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31 mars 2020 2 31 /03 /mars /2020 10:51

 

 

https://www.revolutionpermanente.fr/70-contaminations-et-un-premier-deces-a-la-RATP-langue-de-bois-de-la-direction-et-colere-des-agents

 

L'épidémie gagne du terrain

Soixante dix contaminations et un premier décès à la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP), langue de bois de la direction et colère des agents

Nous avons appris Dimanche 29 Mars 2020 avec grande tristesse la mort de notre collègue Georges Merlot du dépôt de bus d'Aubervilliers, après une longue hospitalisation. Quand la réalité frappe si près, elle nous rappelle à quel point nous avons raison de refuser le silence et d'alerter sur la mise en danger des agents de la RATP face au coronavirus.

Le tableau de l’avancée du coronavirus au sein de la RATP vient de s’alourdir d’une triste nouvelle, la mort de notre collègue et camarade Georges Merlot, cadre sur le dépôt de bus d’Aubervilliers. Georges Merlot est un camarade que j’appréciais beaucoup, et j’adresse toutes mes pensées à ses proches dans cette épreuve douloureuse. Mais nos émotions ne peuvent mettre sous silence notre colère, face à une direction qui met en danger ses agents. Face à ce drame, nous ne pouvons nous empêcher de nous demander qui d’entre nous sera le prochain sur la liste ?

Tandis que la courbe des contaminations monte en flèche parmi les agents de la RATP, la direction persiste dans sa gestion catastrophique de la crise sanitaire. Le chiffre de soixante neuf agents de la RATP testés positifs au coronavirus, dont trois dans un état critique, a été communiqué en séance de la Commission de la Santé, de la Sécurité et des Conditions de Travail (CSSCT) centrale du Vendredi 27 Mars 2020. Mais nous savons que ces chiffres déjà dramatiques ne sont que la face émergée de l’iceberg, puisque les suspicions ne sont même plus comptabilisées et que les tests sont réalisés au compte-goutte, même en présence de symptômes.

Lorsque tout porte à croire qu’un collègue est infecté, plutôt que d’en informer les agents et prendre toutes les dispositions pour protéger ses salariés, la RATP préfère pratiquer la langue de bois. Le cas s’est encore présenté Samedi 28 Mars 2020 sur le dépôt de Flandre, où une machiniste a fini à l’hôpital en plein service, après intervention des pompiers. En guise d’information, les collègues ont trouvé les locaux balisés au rubalise, telle une scène de crime, avec une simple note selon laquelle le centre bus et les terminus du Bourget et de Porte de Pantin seraient désinfectés dans la nuit du Samedi 28 Mars au Dimanche 29 Mars 2020.

Imaginez l’angoisse. Nous avons dû réclamer nous-mêmes des informations pour savoir ce qu’il s’était passé. La direction du centre n’a pris aucune mesure pour informer les collègues qui avaient été en contact avec la machiniste les jours précédents, ni même le président de la CSSCT pour qu’il puisse prévenir les élus et contacter la médecine du travail pour déclencher les mesures obligatoires et les préconisations de l’Agence Régionale de Santé (ARS).

Depuis, j’ai eu l’agent au téléphone et elle est physiquement très faible. L’hôpital ne la garde pas en observation faute de lits et on lui a dit que les tests étaient réservés exclusivement au personnel médical et que la seule chose à faire était de rester confinée chez elle. Autrement dit, à moins d’être à l’agonie c’est débrouille-toi. Une grosse pensée à notre collègue machiniste, à qui nous souhaitons un bon rétablissement.

Rien d’étonnant encore, il ressort que les métiers les plus touchés par l’épidémie sont ceux du département BUS, conducteurs de bus et tramways, du département SEM, animateurs agents mobiles et agents des gares, dédiés à la vente et à l’information des usagers, et du département SEC, agents de sécurité. Autrement dit, les métiers les plus en contact avec les usagers, comme nous n’avons cessé de l’alerter depuis le début de la crise.

Depuis le début de l’épidémie, la direction de la RATP cherche à se dédouaner de toute responsabilité à grand renfort de communication, mais force est de constater qu’elle n’a rien fait pour freiner cette contagion. Pire encore, elle envoie ses agents au front sans protection et sans assurer les décontaminations nécessaires à notre sécurité, comme nous l’avons dénoncé à de nombreuses reprises. Inutile de préciser que le constat est le même pour les navettes mises spécialement en place pour le transport des personnels soignants. Derrière les apparentes bonnes initiatives de la RATP, n’allez pas croire que ceux-ci et les machinistes qui les conduisent sont plus protégés.

Ces derniers jours, face à la mise en lumière dans plusieurs médias de cette gestion scandaleuse de la crise sanitaire par la RATP, la direction a compris qu’elle allait devoir apporter des réponses un peu plus convaincantes. A travers des vidéos, elle a ainsi expliqué que mille trois cent personnes procédaient quotidiennement à la désinfection de nos moyens de transports, avec des produits désinfectants et virucides. Alors disons-le tout net. Il va falloir nous expliquer comment il est possible que les agents continuent à retrouver leurs bus dans un état lamentable à leur prise de service. C’est ce qui a été constaté encore Dimanche 29 Mars 2020 par un machiniste du dépôt d’Ivry qui a dû procéder lui-même au nettoyage de son bus, malgré l’affichette selon laquelle il était désinfecté.

En plus de cela, avec les baisses de service planifiées sans prise en compte des besoins réels, certains bus continuent à rouler pleins à craquer, ce qui rend impossible le respect des distances de sécurité et met en danger les usagers. De plus en plus d’agents dénoncent ces situations mais la direction continue à faire la sourde-oreille.

Les agents payent le prix de cette gestion catastrophique. L’épidémie gagne du chemin à la RATP, dans l’opacité la plus totale. Si près de douze mille agents sont actuellement en arrêt de travail, dont un tiers pour garde d’enfants, rien ne garantit que les agents en service soient sains, puisqu’aucun dépistage n’est réalisé. Par ailleurs, avec la pression managériale de chasse aux arrêts maladies que nous subissons toute l’année, nous savons que ne nombreux agents viennent travailler même malades, de peur de se faire sanctionner, en particulier pour les non-commissionnés, première année à la RATP. Ce climat répressif, cumulé à l’absence de moyens de protection, n’est clairement pas propice à la lutte contre la propagation du virus.

Pourtant, ce ne sont pas les moyens qui manquent à la RATP, et tous les agents le savent. La RATP dépense des millions auprès de Médica Europe pour les faire contrôler chez eux quand ils sont en arrêt maladie. De même, lorsqu’il s’agit de nous dépister au cannabis ou à l’alcoolémie, ils savent faire. La RATP ferait mieux d’investir cet argent dans la protection de ses salariés, en mettant ses centres de santé au service de la lutte contre l’épidémie et en réalisant des dépistages massifs auprès des agents. Au moindre soupçon ou symptômes, ceux-ci devraient être arrêtés par principe de précaution et ils devraient être dépistés. Lorsqu’on est en guerre, ce n’est pas un jeu. C'est bien de nos vies dont il s’agit et nous n’avons pas signé pour être de la chair à canon.

Mais comme si cela ne suffisait pas, nous apprenons en séance de la CSSCT que des managers seraient harcelés par le dépôt de Danger Grave et Imminent (DGI). Nous croyons rêver. La RATP croit-elle que les élus du personnel s’amusent à dénoncer la mise en danger des agents ? Nous préférerions ne pas le faire, mais notre engagement pour la santé et les conditions de travail de nos collègues nous donne beaucoup de fil à retordre ces temps-ci.

Et c’est bien ce travail de terrain qui dérange notre hiérarchie, comme elle l’a démontré encore récemment en accusant notre camarade Hassan Hemmouche, élu de la Confédération Générale du Travail (CGT) sur le dépôt de Saint-Denis et membre de la CSSCT, d'attitude irresponsable et sanctionnable, alors qu’il dénonçait l’absence de moyens de protection des agents de nettoyage des bus.

Ce climat répressif contre les syndicalistes complète à merveille le tableau d’une direction peu soucieuse de la santé de ses salariés, mais il ne nous arrêtera pas. A tous mes collègues qui risquent leur vie au quotidien pour assurer la continuité du service public, plus que jamais soyons tous unis et solidaires pour imposer le respect de notre santé et de celle de nos familles. Nos vies valent plus que leurs profits.

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