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1 juillet 2008 2 01 /07 /juillet /2008 21:34
Les dirigeants africains refusent de désavouer Robert Mugabe


LE MONDE | 01.07.08 | 15h12  •  Mis à jour le 01.07.08 | 16h13


onduites par le Sénégal et l'Afrique du Sud, des tractations devaient se poursuivre, mardi 1er juillet, au deuxième et dernier jour du sommet de l'Union africaine (UA), à Charm El-Cheikh (Egypte), pour amener le président Robert Mugabe à accepter un partage du pouvoir au lendemain d'une réélection contestée. Le chef de l'Etat resterait formellement à la tête du pays mais l'essentiel du pouvoir passerait entre les mains de son rival, Morgan Tsvangirai, nommé vice-président.

 


"ACCUEILLI COMME UN HÉROS"


Au Conseil de sécurité des Nations unies, les Etats-Unis ont fait circuler lundi un projet de résolution contre le Zimbabwe. Le texte prévoit un embargo sur les armes et des sanctions ciblées contre des personnes accusées d'avoir entravé "le processus démocratique" dans le pays. La négociation pour obtenir le vote de la résolution sera "dure", a admis le représentant américain à New York. Mais c'est au sommet africain que les divisions sur la conduite à tenir pour sortir de la crise s'étalent au grand jour.


"Nous avons
(...) accueilli Mugabe comme un héros", a lancé, goguenard, le président du Gabon, Omar Bongo, peu après l'ouverture du sommet, avant d'ajouter : "Il a été élu, il a prêté serment, il est là avec nous. Alors, il est président." Une provocation de la part du doyen des chefs d'Etat africains ? Pas complètement. Manipuler les élections pour l'emporter tout en sauvant les apparences par des gestes (la prestation de serment) ou un comportement (l'apparition au milieu de pairs) est une recette familière à nombre de présidents.


Même si la démocratie gagne du terrain en Afrique à chaque scrutin, parmi les 53 pays membres de l'UA, une douzaine est dirigée par des présidents élus dans des conditions aussi contestables que Robert Mugabe, au pouvoir depuis 1980. Qui peut croire que Zine El-Abidine Ben Ali rassemble sur son nom 95 % des suffrages en Tunisie ? Hosni Moubarak en Egypte, Omar Al-Bachir au Soudan, Teodoro Obiang Nguema en Guinée-Equatoriale affichent des scores aussi improbables. Ils ne sont pas les seuls. Des résultats aussi peu crédibles vont de pair avec des mandats qui s'éternisent. Le Burkinabé Blaise Compaoré est au pouvoir depuis vingt et un ans tout comme son homologue ougandais, Yoweri Museveni, et le Tunisien Ben Ali ; Lansana Conté - un autre militaire - dirige la Guinée depuis vingt-quatre ans. La palme de la longévité revient à l'insubmersible Bongo arrivé au pouvoir en 1967...


SE DRAPER DANS LES HABITS DE DÉFENSEUR DE L'AFRIQUE NOIRE


A ce club de présidents inamovibles, prêts à s'accommoder d'un Robert Mugabe parti pour un cinquième quinquennat présidentiel, s'opposent d'autres dirigeants conscients que la crise du Zimbabwe - une inflation hors de contrôle, une monnaie en chute libre, des problèmes alimentaires - pèse sur les pays voisins et au-delà. Le premier ministre du Kenya, Raila Odinga, illustre ce changement d'attitude. Peut-être parce qu'il est lui-même contraint de cohabiter avec un président qui a manipulé les urnes pour se maintenir au pouvoir (au prix de 1 500 morts), le chef du gouvernement a parlé samedi, à Nairobi, d'élections "truquées" au Zimbabwe. Lundi, M. Odinga a récidivé et exhorté l'organisation africaine à "suspendre le président Mugabe jusqu'à ce qu'il permette à l'UA de faciliter (la tenue) d'élections libres et équitables". Le président de la Sierra Leone a également tenu des propos très fermes.


Les précautions des dirigeants de l'UA, le souci de ménager le vieux chef d'Etat zimbabwéen contrastent avec l'hostilité des Occidentaux. Et, en particulier, celle de la Grande-Bretagne, l'ancienne puissance coloniale qui, épaulée par les Etats-Unis et, dans une moindre mesure, l'Union européenne, a pris la tête de la croisade anti-Mugabe.L'hostilité affichée de Londres et du premier ministre Gordon Brown à l'endroit de M. Mugabe et de sa "coterie" est telle que le président du Zimbabwe, jouant de son passé de combattant nationaliste, a pu se draper dans les habits de défenseur de l'Afrique noire face au retour du colon blanc.


Dès lors, oser dénoncer à Charm El-Cheikh le potentat au pouvoir à Harare, c'est courir le risque d'apparaître comme un allié des Occidentaux. Très peu de chefs d'Etat présents dans la station balnéaire égytienne ont osé le prendre.

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