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24 janvier 2016 7 24 /01 /janvier /2016 16:31

http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2016/01/23/comment-halim-a-a-convaincu-le-conseil-d-etat-de-sa-bonne-foi_4852428_1653578.html

Comment Halim a convaincu le conseil d'état de suspendre son assignation à résidence

Scène inaccoutumée, Mardi 19 Janvier 2016, lorsque, sous le regard sévère des portraits d’anciens membres du conseil d'état suspendus aux murs lambrissés, l’assistance se retrouve secouée d’un rire discret.

En s’appliquant à mimer les gestes, Halim, assigné à résidence depuis le 15 novembre 2015 à Vitry-sur-Seine, dans le Val de Marne, dans le cadre de l’état d’urgence, est en train de démontrer au juge des référés et à la représentante du ministère de l’intérieur qu’il est possible de tenir son téléphone à bout de bras quand on est en conversation haut-parleur. Et que ce geste ne saurait être confondu avec celui de la prise d’une photographie.

Comique, la démonstration résume à elle seule les incohérences qui, depuis le début, sous-tendent ce premier cas d’assignation suspendue par la haute juridiction administrative, Vendredi 22 Janvier 2016.

« Si j’avais vraiment eu envie de prendre des photographies douteuses du domicile de Riss, directeur de Charlie Hebdo, je ne me serais pas bêtement posté à l’angle de la rue, en plein jour, et devant un camion des Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS) », insiste Halim en plantant ses yeux dans ceux du juge, Francis Lamy, ancien préfet de région. Est-ce à ce moment précis que le magistrat a commencé à se laisser convaincre de sa bonne foi ?

Il est certain que les audiences n’auraient pas été les mêmes si Halim n’avait pas obtenu de sauf-conduit pour pouvoir y assister et se défendre au côté de son avocat, William Bourdon.

Une note blanche de cinq lignes

Ce dossier d’assignation apparemment semblable aux quelques quatre cent autres a pris la tournure d’une saga. Au soir de la première audience, Mardi 19 Janvier 2016, rien ne laisse présager une issue favorable, le juge invite Halim à réfléchir à demander un aménagement de sa mesure, plutôt qu’une suspension. Ce à quoi il s’est toujours refusé, par principe. Le magistrat demande alors un « supplément d’instruction », des éléments complémentaires que le ministère doit fournir pour le lendemain, à midi. Puis il fixe une nouvelle audience au Jeudi 21 Janvier 2016 et le ministère de l’intérieur est à nouveau prié de fournir des éléments prouvant ses accusations, photographies et procès-verbaux d’audition.

Dans l’urgence, la représentante de la place Beauvau, la sous-directrice du conseil juridique et du contentieux, Pascale Léglise, produit pour la deuxième audience une note blanche de cinq lignes sur un document word, librement modifiable et offrant la possibilité à tout un chacun de connaître sa durée de fabrication, sept minutes. « Un tel bricolage au mépris du juge, je n’avais jamais vu cela en trente-cinq ans de barreau », s’exclame William Bourdon.

Tiraillement du juge

Francis Lamy n’aura laissé passer aucun détail, décortiquant pièce après pièce chacun des trois motifs avancés, repérages supposés autour du domicile de Riss, mise en cause dans une affaire de trafic de véhicules et appartenance présumée à la « mouvance islamiste radicale ».

Plus d’une fois, il a semblé tiraillé entre une défense ne pouvant que clamer sa bonne foi et un ministère de l’intérieur campant sur ses affirmations. « Si les services de renseignement ont écrit tout cela, c’est que c’est vrai. Ils ne se lèvent pas le matin pour écrire de fausses notes blanches. Faut-il attendre, un nouvel attentat », a fini par s’impatienter Pascale Léglise.

En vain, à 16 heures, Vendredi 22 Janvier 2016, la nouvelle tombe, l’assignation à résidence est suspendue. Le juge estime que « l’intéressé a pu justifier sa présence et son comportement aux abords du domicile de la personnalité en question, car il rendait visite à sa mère, qui habite à proximité immédiate et ne prenait pas de photographies mais utilisait son téléphone portable en mode haut-parleur, aucun élément suffisamment circonstancié produit par le ministre de l’intérieur ne permet de justifier qu’il appartiendrait à la mouvance islamiste radicale et, enfin, en ce qui concerne l’affaire de trafic de véhicules, l’intéressé a, en réalité, été entendu comme simple témoin ».

Après presque dix semaines enfermé dans sa prison sans barreau de Vitry-sur-Seine et deux audiences éprouvantes où il s’est senti « mis à nu car obligé de se justifier pour des choses qu’il n’avait pas faites », Halim a « retrouvé confiance dans la justice ».

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