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3 juillet 2019 3 03 /07 /juillet /2019 17:14

 

 

https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/mort-a-marseille-d-une-octogenaire-touchee-par-une-grenade-lacrymogene-les-zones-d-ombre-qui-persistent-dans-l-enquete_3517573.html

 

Mort à Marseille d'une octogénaire touchée par une grenade lacrymogène, les zones d'ombre qui persistent dans l'enquête

A ce jour, Zineb Redouane est la seule personne morte en marge d'une manifestation des Gilets Jaunes pour laquelle la police est mise en cause. Ces derniers jours, plusieurs éléments nouveaux ont relancé l'enquête.

Elle est devenue un symbole de la répression policière contre les Gilets Jaunes. Zineb Redouane, une octogénaire algérienne vivant à Marseille, est morte après avoir été touchée par une grenade lacrymogène alors qu'elle se trouvait dans son appartement, le premier décembre 2018. Le projectile a été tiré par des policiers d'une Compagnie Républicaine de Sécurité (CRS) en intervention au pied de son immeuble contre une manifestation des Gilets Jaunes à Marseille. La femme de quatre vingt ans fermait sa fenêtre pour se protéger des gaz lacrymogènes au moment où elle a été touchée par une grenade en plein visage.

Grièvement blessée, Zineb Redouane est morte le 2 décembre 2018, à l'hôpital, sur la table d'opération. Une information judiciaire a été ouverte le 4 décembre 2018 pour déterminer les causes de la mort mais, sept mois plus tard, plusieurs zones d'ombre persistent dans ce dossier.

La famille de l'octogénaire a de son côté porté plainte, au mois d'avril 2019, pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. France Info fait le point sur cette affaire.

Après la mort de Zineb Redouane, le procureur de Marseille, Xavier Tarabeux, avait d'abord affirmé que l'octogénaire avait succombé d'un arrêt cardiaque sur la table d'opération. « A ce stade, nous ne pouvons pas établir de lien de cause à effet entre la blessure et le décès », avait-il affirmé. L'autopsie, réalisée le 3 décembre 2018 à la demande du parquet, a mis en évidence un traumatisme facial sévère avec fractures, ainsi que des fractures costales et un œdème pulmonaire aigu qui serait la cause du décès, après tentative de réanimation, selon un communiqué de la cour d'appel. Rédigé par deux médecins légaux du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de la Timone, le document, cité par Mediapart, précise que seul le dossier médical de la victime pourrait déterminer avec plus de précision les circonstances de survenue du décès.

Une autre autopsie, menée en Algérie vingt-cinq jours après la mort, à la demande du tribunal de Dar al Baida et révélée par le Media, Mardi 2 Juillet 2019, ne prend pas autant de précautions dans son analyse des faits constatés.

Plus péremptoire, la contre-expertise évoque ainsi un important traumatisme facial imputable à l’impact d’un projectile non pénétrant, pouvant correspondre à une balle lacrymogène. D'après ce document, ce traumatisme est directement responsable de la mort par aggravation de l'état antérieur.

« J'espère que cette expertise va faire bouger les choses », a commenté auprès de l'Agence France Presse (AFP) Brice Grazzini, l'avocat de Sami Redouane, l'un des fils de la victime. Regrettant un manque de diligence de l'autopsie française, il a dit sa volonté de verser cette contre-autopsie algérienne à l'instruction.

Le premier décembre 2018, lors de la manifestation qui se tient autour du domicile de Zineb Redouane, cinq policiers étaient dotés de lanceurs de grenades. Avec le capitaine qui les dirigeait, ils ont été entendus par l'Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) à la fin du mois de janvier 2019, indique Mediapart, qui publie des extraits des auditions. Tous les policiers ont affirmé ne pas savoir lequel d'entre eux avait tiré la grenade qui a touché l'octogénaire. Des propos confirmés à France Info par une source proche du dossier.

Même confrontés aux images de vidéo surveillance, ils ont affirmé ne pas être en mesure d'identifier le tireur. « Cela peut être moi ou pas, je n’ai aucune certitude », a notamment affirmé l'un d'entre eux, cité par Mediapart. « La grenade retrouvée provenait d’un gilet de recomplètement. Nous nous en sommes rendus compte par le numéro. Mais il est impossible de dire qui était le porteur », a affirmé aux enquêteurs un des cinq policiers.

« Je pense que l'identité du tireur est en réalité bien connue. Quand ils disent qu'ils sont cinq à avoir des lance-grenades ce jour-là, mais qu'ils ne sont pas capables de savoir qui a tiré, je ne peux pas y croire », s'indigne  auprès de France Info Yassine Bouzrou, l'avocat de la famille de Zineb Redouane, « lorsque des suspects donnent des explications invraisemblables et fantaisistes, la pratique judiciaire et policière classique, c'est de les placer en garde à vue et de les mettre en examen. Cela n'a pas été le cas ici. Comment ne pas douter de la qualité de l'enquête menée par l'IGPN ».

Un autre élément crée la confusion dans cette enquête. Le 27 juin 2019, Mediapart a révélé la présence d’André Ribes, le vice-procureur du parquet de Marseille, aux côtés des policiers sur le terrain le premier décembre 2018. Sa présence a été signalée par les policiers lors de leurs auditions, menées à la fin du mois de janvier 2019. Lui n'en avait informé ni les enquêteurs, ni la juge d'instruction marseillaise en charge du dossier, selon le site d'information.

« Il n'est pas normal qu'un membre du parquet qui était présent sur les lieux au moment où Zineb Redouane a été touchée par la grenade n'a pas fait état de sa présence au magistrat instructeur. Il aurait pu fournir des éléments utiles à l'enquête », regrette Yassine Bouzrou. Fait encore plus troublant selon l'avocat, André Ribes était en charge de l'enquête jusqu'à ce que celle-ci soit confiée à un juge d'instruction, le 5 décembre 2018.

Persuadé que, dans ce contexte, une enquête objective n'était pas possible à Marseille, Yassine Bouzrou a réclamé le dépaysement des investigations. Une demande soutenue par le parquet général d'Aix-en-Provence et désormais transmise à la cour de cassation, qui pourra choisir quelle juridiction prendra le relais.

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