Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 mars 2020 2 24 /03 /mars /2020 12:00

 

 

https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-4-questions-sur-la-chloroquine-presentee-par-le-professeur-raoult-comme-la-meilleure-arme-contre-le-covid-19_3880689.html

 

 

Coronavirus, quatre questions sur la chloroquine, présentée par le professeur Didier Raoult comme la meilleure arme contre le coronavirus

 

Des spécialistes s'insurgent contre la promotion, par le professeur Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses à Marseille, de ce médicament antipaludique.

 

La chloroquine, un remède miracle contre le coronavirus, spécialiste des maladies infectieuses à Marseille, le professeur Didier Raoult le proclame partout, après avoir testé ce médicament antipaludique sur vingt quatre patients. Selon lui, les trois quarts étaient guéris au bout de six jours.

 

Ce chercheur, qui fait partie du conseil scientifique chargé d'éclairer l'exécutif sur la pandémie, a d'ailleurs convaincu le gouvernement de tester plus largement ce médicament et le ministre de la Santé, Olivier Véran, a donné son feu vert, Mardi 17 Mars 2020, « pour qu'un essai plus vaste par d'autres équipes puisse être initié dans les plus brefs délais sur un plus grand nombre de patients ». Lundi 23 Mars 2020, le ministre a annoncé qu'il allait prendre un arrêté pour encadrer l'utilisation de la chloroquine, qui sera accessible aux équipes médicales hospitalières uniquement pour traiter des formes sévères et sur décision collégiale des médecins.

 

Mais sans recul ni étude validée, certains scientifiques ne comprennent pas que la chloroquine soit déjà présentée comme l'arme suprême pour lutter contre le coronavirus, le professeur Didier Raoult est un spécialiste incontesté des infections. Grand prix de l’institut national de la santé et de la recherche scientifique (INSERM) en 2010 pour l'ensemble de sa carrière, ce spécialiste des maladies infectieuses de soixante huit ans dirige l’Institut Hospitalo Universitaire (IHU) Méditerranée Infection à Marseille. Et il se dit convaincu de la pertinence de l'hydroxychloroquine pour traiter les patients atteints de coronavirus, indique le quotidien régional de la Provence, Samedi 21 Mars 2020.

 

Le médecin se montre encore plus affirmatif dans une interview au Parisien. « Avec mon équipe, nous estimons avoir trouvé un traitement. Et sur le plan de l'éthique médicale, j'estime ne pas avoir le droit, en tant que médecin, de ne pas utiliser le seul traitement qui ait jusqu'ici fait ses preuves. Je suis convaincu que, à la fin, tout le monde utilisera ce traitement. C'est juste une question de temps avant que les gens acceptent de manger leur chapeau et de dire que c’est cela qu'il faut faire », assure-t-il, disant n'attendre rien de nouveau des essais. 

 

Se présentant comme une star mondiale dans son monde, Didier Raoult affirme à la Provence que, sur vingt quatre patients qu'il a suivis dans son essai clinique, après six jours de traitement, soixante quinze pour cent des patients sont guéris du virus. Interrogés sur les vingt cinq pour cent de cas qui sont toujours positifs, il affirme n'avoir pas eu d'aggravation dans les cas traités. Les données de son étude sont publiées en anglais.

 

Sauf que si on entre davantage dans les détails, Didier Raoult prône, en fait, l'association de deux médicaments, la chloroquine, ou hydroxychloroquine, connue sous son nom de médicament, le Plaquenil, et un antibiotique appelé l'azithromycine. Sur France Info, un membre de son équipe, Philippe Parola, chef du service des maladies infectieuses de l'IHU à Marseille, estime que les essais cliniques en cours sur une large échelle doivent tester l'association des deux produits, « cela marche encore mieux. Il faut savoir que ces molécules, la chloroquine comme l'azithromycine, sont utilisées depuis des années et que nous en connaissons les effets secondaires, y compris de cette association ».

 

Son efficacité est sujette à caution pour une raison simple. Il n'y a pas encore d'étude conduite dans les règles de l'art qui viennent prouver cette efficacité. Tout en autorisant des essais plus larges, Mardi 17 Mars 2020, le ministre de la santé, Olivier Véran, l'a rappelé, « il est absolument fondamental d'asseoir toute décision de politique publique en santé sur des données scientifiques validées, et les processus de validation, nous ne pouvons pas négocier avec ». « Il est pour le moment difficile de se prononcer sur l’efficacité d’un traitement antipaludique à base de chloroquine contre le coronavirus », résume l’INSERM, sur sa page contre les fake news.

 

« Si la possibilité de pouvoir utiliser des traitements antipaludiques sûrs, déjà bien connus et peu coûteux chez les patients atteints de coronavirus est intéressante, il est primordial d’avoir une visibilité sur des données issus d’essais cliniques impliquant des patients infectés par le coronavirus, publiées et donc rendues accessibles à la communauté scientifique internationale », poursuit l'INSERM. En clair, il est trop tôt pour se prononcer.

 

Pour le même motif, Karine Lacombe, infectiologue et cheffe de service à l'hôpital Saint-Antoine à Paris, explique à la deuxième chaîne de la télévision française qu’elle est écœurée et que le docteur Disdier Raoult expose les gens à un faux espoir.  « Cet essai est contestable et il ne montre absolument rien sur le plan scientifique », s'indigne-t-elle, « ce qui se passe à Marseille est scandaleux. Utiliser un médicament comme cela sans autorisation de mise sur le marché en exposant les personnes qui le prennent à des complications sans avoir vérifié les conditions d'utilisation de base, c'est en dehors de toute démarche éthique. Même si ce médicament peut potentiellement avoir une activité, nous ne pouvons pas le donner comme cela à n'importe qui dans n'importe quelles conditions, sans base scientifique correcte. Il faut faire extrêmement attention ».

 

A le lire attentivement, le professeur Didier Raoult pointe lui-même les limites de son étude. Dans son interview à la Provence, il dit ainsi n'avoir pas eu affaire à des cas graves, « nous n'avons pas eu d'aggravation dans les cas traités, mais nous ne voyons pas de personnes dans des états graves. Pour l'instant, les cas graves sont ceux qui ne sont ni détectés, ni traités, et qui arrivent avec une insuffisance respiratoire très grave. Ils vont directement en réanimation et ils vont mourir là-bas ». D'où le danger de brandir un médicament miracle, une démarche qui risque aussi de dissuader les personnes de prendre les précautions nécessaires, gestes barrières et distance de plus d'un mètre.

 

L'étude sur la chloroquine menée en France ailleurs qu'à Marseille donnera des résultats d'ici à quinze jours, selon le ministère de la santé. Elle s'inscrit dans le cadre d'un essai clinique européen destiné à évaluer quatre traitements expérimentaux pour lutter contre le coronavirus. Baptisée Discovery, cet essai a pour but d’analyser l’efficacité et la tolérance des options thérapeutiques pour les patients dans un temps limité, explique l'INSERM dans un communiqué du Dimanche 22 Mars 2020.

 

Outre la chloroquine, cet essai européen doit évaluer le remdesivir, le lopinavir en combinaison avec le ritonavir, ce dernier traitement étant associé ou non à l’interféron bêta. Dans son volet français, l'essai inclura au moins huit cent patients atteints de formes sévères du coronavirus. Au total, trois mille deux cent patients européens seront inclus dans l'étude qui associe la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Espagne. Les données obtenues seront partagées avec un autre essai international baptisé Solidarity, conduit sous l'égide de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Il convient donc désormais d'attendre les résultats validés.

Partager cet article
Repost0

commentaires