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29 octobre 2016 6 29 /10 /octobre /2016 14:55

 

http://www.lemonde.fr/syrie/article/2016/10/29/les-rebelles-tentent-de-briser-le-siege-d-alep_5022405_1618247.html

 

Les rebelles tentent de briser le siège d’Alep

Par Madjid Zerrouky et Benjamin Barthe

La météorologie sourit aux rebelles d’Alep. Leur grande offensive destinée à briser le siège des quartiers orientaux, évoquée depuis des semaines sur les réseaux sociaux, a débuté Vendredi 28 Octobre 2016 sous un ciel grisâtre, limitant l’activité de l’aviation russe et syrienne.

Orchestré par Jaish al Fatah, une coalition djihado-salafiste, avec l’appui de groupes moins radicaux affiliés à l’Armée Syrienne Libre (ASL), cet assaut d’une grande violence, mené à l’artillerie lourde et aux voitures piégées, a permis aux assaillants venus de la campagne du sud d’Alep de s’emparer d’un secteur de l’ouest de la ville, jusqu’alors sous contrôle gouvernemental.

Cette attaque « va mettre fin à l’occupation des quartiers ouest par le régime et au siège imposé à notre peuple dans Alep », a promis Abou Youssef al Mouhajir, le chef militaire d'Ahrar al Cham, un puissant groupe armée salafiste. Du résultat de la bataille, qui a l’allure d’une opération de la dernière chance, dépend le sort des quartiers orientaux, la seule grande possession urbaine de la rébellion, assiégés et affamés depuis trois mois par les forces loyalistes. C’est dire l’importance de ces combats pour les anti Assad, qui ne cessent de perdre du terrain depuis le début de l’intervention russe en Syrie, à la fin du mois de septembre 2015.

Le coup d’envoi de l’offensive a été donné à l’aube par une série de déflagrations qui ont propulsé d’énormes champignon de fumée noire au-dessus d’Alep. Au moins quatre véhicules blindés, chargés à ras bord d’explosifs, ont foncé sur les positions de l’armée régulière et de ses alliés en lisière de la Nouvelle Alep, un ensemble de complexes résidentiels, sur le flanc sud-ouest de la métropole.

Volées de missiles Grad

Comme c’est presque toujours le cas dans les offensives rebelles de grande envergure, l’essentiel du travail de perforation des lignes ennemis a été conçu et réalisé par le Front Fatah al Cham, une émanation d'al Qaïda qui codirige Jaish al Fatah avec Ahrar al Cham.

Le parti islamique du Turkistan, une formation à dominante ouïghour, satellite de Fatah al Cham, a aussi contribué à la manœuvre. Ces deux organisations djihadistes ont fourni trois conducteurs kamikazes, présentés comme des ressortissants de nationalité égyptienne, saoudienne et turc. La quatrième explosion serait le fait d’une pelleteuse télécommandée mise au point par Ahrar al Cham.

Parallèlement à ces opérations suicide, des volées de missiles Grad, tirées depuis des batteries mobiles positionnées dans la périphérie sud d’Alep, se sont abattues sur trois secteurs, le quartier de Jamaat Az-Zahra, dans l’ouest d’Alep, siège de nombreux services de sécurité, l’aéroport militaire de Nayrab, tout à l’est, d’où décollent les chasseurs-bombardiers syriens et les hélicoptères larguant des barils explosifs, et le quartier d’habitations d'Hamdaniya, au sud-ouest, intégré à la Nouvelle Alep. Ces tirs de barrage ont causé la mort de quinze civils selon l’Observatoire Syrien des Droits de l'Homme (OSDH).

Après ce déluge de feu, les troupes de choc de Fatah al Cham sont passées à l’action. Vendredi 28 Octobre 2016, en fin de matinée, elles avaient pris le contrôle de Dahyat al Assad, un triangle d’immeubles d’environ deux kilomètres carrés, en bordure de l’autoroute nord-sud menant vers Hama. Cette percée a été facilitée par un effet de surprise, les forces pro-gouvernementales s’attendaient à ce que leurs adversaires les attaquent au niveau de Ramoussah, plus au sud, le maillon faible de leur dispositif d’encerclement, que Jaish al Cham avait brièvement réussi à casser au mois d'août 2016.

L’image des rebelles entachée par les exactions

« Nous savions que le régime s’était préparé pour ce scénario, alors nous avons décidé d’utiliser une autre option », confie Labib Nahhas, porte-parole d’Ahrar al Cham. Le choix de porter l’attaque sur des quartiers de l’ouest, densément peuplés, comme ceux de la Nouvelle Alep, où résident notamment des familles déplacées par la guerre, présente aussi l’avantage de limiter les possibilités de frappes des aviations russes et syriennes.

Mais ce pari, pour l’instant payant, pourrait vite se retourner contre les assaillants. Ceux-ci prennent le risque d’être accusés de la même indifférence à l’égard des victimes civiles que leur bête noire, Bachar al Assad, et son allié russe. Ces pertes risquent de brouiller l’image des rebelles, déjà entachée par de nombreuses exactions, et de nuire à la cause des habitants d’Alep-Est, où les conditions de vie deviennent chaque jour plus insupportables.

A l’Organisation des Nations Unies (ONU), la colère éprouvée à l’encontre de Damas et de Moscou, après le massacre de vingt deux enfants et de six enseignants, dans le bombardement aérien, Mercredi 26 Octobre 2016, d’une école de la région d’Idlib, a ainsi été contrebalancée par la mort, le lendemain, de trois enfants dans l’explosion d’une roquette lancée par les insurgés sur leur établissement d’Alep-Ouest. Dans les deux cas, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki Moon, a parlé de possibles crimes de guerres.

« Prolonger la pause humanitaire »

Les planificateurs de l’attaque sur la Nouvelle Alep assument ces dangers, en laissant entendre qu’elle vise autant à lever l’encerclement des quartiers est qu’à conquérir ceux de l’ouest. « C’est une tactique très risquée », s’inquiète Sinan Hatahet, analyste au centre de recherches Omran, basé à Istanbul. « L’impact médiatique risque d’être très négatif ».

Vendredi 28 Octobre 2016, le Kremlin a annoncé que les raids russes sur Alep resteraient suspendus, comme ils le sont peu ou prou depuis dix jours. Le président russe Vladimir Poutine a estimé « nécessaire de prolonger la pause humanitaire ». Cette retenue se prolongera-t-elle si les rebelles continuent leur avancée ? « Au mois d’août 2016, c’est l’intervention de la chasse russe qui avait permis de refermer la brèche de Ramoussah », se remémore Sinan Hatahet. « Les factions avaient été incapables de se coordonner pour résister à ces frappes. Aujourd’hui, c’est quitte ou double. Si la nouvelle offensive échoue, cela accélérera la chute des quartiers d’Alep Est »

 

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