Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

actualité politique nationale et internationale

PARIS BEYROUTH ET TEHERAN


http://www.collectif-communiste-polex.org/bulletin/bulletin_58_art1.htm


Elections de juin à Paris, Beyrouth et Téhéran : suffrage universel et manipulation des opinions.

Le suffrage universel fut une grande conquête politique, pour laquelle les révolutionnaires, dans tous les pays d’Europe, combattirent et moururent aux 19ème et 20ème siècles ; nous ne pouvons qu’y être attachés, sans le sacraliser en croyant naïvement qu’un droit de vote à chaque adulte suffit à assurer la démocratie politique. Le capitalisme actuel, maître des capitaux, du pouvoir politique et de médias capables de faire croire aux opinions n’importe quoi durant quelques jours, manipule à son gré les résultats du vote, au point d’en inverser le sens : la droite française, sur ce plan, est spécialiste, avec un président qui joue des sondages, des mots, prétend faire « réformes » quand il démolit les acquis sociaux au profit des plus riches ; bien maladroit en d’autres occasions, il a su par ses dérapages xénophobes contrôlés, capturer en 2007 le plus gros de l’électorat du Front national ; les européennes de 2009 ont été l’occasion d’une opération similaire à l’encontre de ses concurrents majeurs, le PS et le Modem. Le 5 juin, deux jours avant le vote, la télévision nationale aux ordres du monarque - président, a projeté , après une grande campagne publicitaire, le film « Home » de Yann Arthus- Bertrand, à plus de 8 millions de citoyens français ; un catalogue de belles images relativement faciles à réaliser quand on a quelques talents de photographe et surtout des moyens techniques coûteux, du personnel et des hélicoptères (lutte contre la pollution oblige…) ; agrémenté d’un discours « écologiste » assez primaire (tout le monde est coupable de la dégradation des continents): c’était le programme minimum de la liste Europe - Ecologie, mélange irrationnel d’anticapitalistes comme José Bové, de chevaliers blancs de l’anti-corruption comme l’ex-juge Eva Joly, au profit d’un Cohn-Bendit, dont le passé de révolte étudiante fait oublier qu’il est aujourd’hui un soutien convaincu des aventures guerrières de l’OTAN et des USA. Cette manipulation à l’échelle d’un état a été, de toute évidence, d’une grande efficacité pour promouvoir à 16% une nébuleuse « verte » française largement tirée vers le conservatisme : un « joli coup » politicien monté par Sarkozy, grâce aux médias à son service.


Au lendemain du 7 juin, les mêmes trompettes médiatiques, télévisions, radios, journaux, claironnent sans vergogne la victoire « historique » de la droite UMP, alors qu’elle n’a réussi à faire voter pour elle que 11% des électeurs !

Le même 7 juin, les citoyens du Liban devaient choisir par les urnes de reconduire la majorité parlementaire sortante, pro-occidentale, parée de toutes les vertus par nos médias conservateurs, et une opposition plurielle, « parti chrétien » de Michel Aoun, parti communiste libanais et mouvement de résistance armée Hezbollah, très influent dans les milieux populaires du Liban musulman, et très diabolisé en Occident. Il est vrai que les positions islamistes de ce mouvement sont plus que discutables, mais c’est oublier qu’il est aussi le barrage essentiel contre l’impérialisme israélien.

Nos « élites » occidentales et leurs alliés du Moyen-Orient ont fait leur choix, et hurlent à l’ingérence syrienne, iranienne, à chaque manifestation de l’opposition nationale au Liban : ces vertueux protecteurs de l’intégrité libanaise ont donc préparé comme il se doit les élections ; tous les spécialistes de la région ont signalé les financements massifs venus notamment d’Arabie Saoudite, les centaines d’avions amenant à Beyrouth les électeurs expatriés, etc. : ce n’est pas sans efficacité dans un pays où les inégalités sociales sont énormes entre les affairistes pro-américains de la capitale et les miséreux peuplant certains quartiers. Voilà un suffrage universel estampillé démocratique à l’Elysée : il a confirmé l’emprise occidentale.

La manipulation n’est pas toujours aussi réussie, quand les peuples s’en mêlent ; depuis plusieurs semaines les « grands »médias français, prenant leurs désirs pour la réalité, annonçaient la défaite du président iranien aux élections du 12 juin ; nous étions inondés de reportages télévisés montrant la foule des opposants en meetings, et de jeunes bourgeois iraniens bien mis annonçaient leur désir, enfin, de liberté vestimentaire. La palme de l’imbécillité journalistique revenait au « Courrier international » qui titrait en couverture « en finir avec Ahmadinejad » ; au sujet de ce pelé, ce galeux, la moindre contrevérité devenait une évidence proclamée, l’Iran une dictature absolue, alors que des opposants y manifestent par centaines de milliers malgré la répression, que la presse, le cinéma, pourraient parfois donner des leçons d’indépendance aux confrères de France. Ahmadinejad est proclamé antisémite dès qu’il dénonce la colonisation israélienne ; ses maladresses et dérapages ne gênent pas nos rigides censeurs qui n’hésitent pas à reprendre à son égard le plus ringard des discours coloniaux : rappelons-nous Ségolène Royal interdisant à Téhéran l’industrie nucléaire civile !

L’homme providentiel, selon nos faiseurs d’opinion, qui allait être élu, se nommait Moussavi, un « islamiste modéré », modéré en cela seulement qu’il s’affirme aujourd’hui pro-américain. Les citoyens français sont rétifs à juste titre envers la théocratie iranienne, les mauvais traitements infligés aux femmes, l’inégalité sociale grandissante au pays des mollahs : leur faire croire qu’un Moussavi instaurerait la démocratie revient à les prendre pour des benêts ; il fut premier ministre de l’imam Khomeiny de 1981 à 1989 et à ce titre il organisa la destruction physique des militants de la gauche iranienne, démocrates ou communistes du Toudeh.

Nos « penseurs » parisiens ignorent tout du peuple iranien et ne comprennent pas notamment que les insultes méprisantes et les menaces venues d’Occident renforcent à Téhéran les réactions nationalistes. Le 12 juin, le peuple iranien a réélu Ahmadinejad dans un scrutin moins falsifié qu’on ne le dit à Paris ou à Washington. Compte tenu des candidats en lice, tous quatre choisis par les chefs religieux, pouvait-il en être autrement ?

Les étudiants, les salariés progressistes d’Iran ont raison de crier au grand jour leur dégoût du régime théocratique, des inégalités sociales et des atteintes aux libertés ; mais Moussavi, le pro-occidental n’est pas qualifié pour être leur porte-parole, tout au plus pour les conduire à une impasse, voire au massacre : certains stratèges à Washington, Londres ou Paris sont prêts à combattre pour la « démocratie libérale » jusqu’au dernier Iranien ! Et la presse israélienne annonce ces jours-ci qu’une attaque aérienne contre l’Iran est toujours une éventualité envisagée à Tel-Aviv !

Nous sommes solidaires des progressistes d’Iran, pas des faucons occidentaux, même déguisés en colombes.

Francis Arzalier



Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article