https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/en-soutien-a-daniele-obono-contre-le-racisme-decomplexe-de-valeurs-actuelles
https://www.ldh-france.org/en-soutien-a-daniele-obono-contre-le-racisme-decomplexe-de-valeurs-actuelles/
https://fondation-frantzfanon.com/en-soutien-a-daniele-obono-contre-le-racisme-decomplexe-de-valeurs-actuelles
En soutien à Danièle Obono, contre le racisme décomplexé de Valeurs Actuelles
Rassemblement Place du Trocadéro à Paris Métro Trocadéro
Samedi 5 Septembre 2020 à 17 heures
Une députée noire portant les chaînes de l’esclavage au cou, c'est par cette image que Valeurs Actuelles a illustré son roman-fiction de cette semaine, intitulé « Danièle Obono au temps de l’esclavage ».
Le journal d’extrême-droite, qui n’en est pas à son coup d’essai en matière de racisme, pousse ici sa nostalgie du colonialisme et de la mise en esclavage à son paroxysme, entre iconographie esclavagiste et révision de l'histoire.
Alors que cet essai-fiction a pour objet d’imaginer que, chaque semaine, un personnage emprunte les couloirs du temps, Valeurs Actuelles choisit, pour le premier personnage noir de cette série, de le renvoyer en Afrique au temps de l’esclavage et de lui faire porter les chaînes.
L’Afrique y est ici décrite selon les clichés européens les plus communs. Elle réunit des femmes dont les lèvres sont écartelées et des hommes rétrogrades, au milieu de cafards grouillants et de tam-tam chantant.
Des silhouettes d'africains ornent la mise en page du roman, des femmes et des hommes nus autour d’un feu de bois, d’autres marchant les poings liés et Danièle Obono la chaîne autour du cou.
Le récit fictif se vautre dans le révisionnisme et le négationnisme historique, puisqu’il exonère les européens de toute responsabilité dans la traite transatlantique négrière.
Plus encore, c’est finalement un chrétien français qui sauvera Danièle Obono de sa condition, un comble pour qui sait que c’est au nom de la chrétienté que l’Europe mit en esclavage les noirs et les indigènes, ce qui fût consacré en France en 1685 par le Code Noir de Jean Baptiste Colbert qui les relégua au statut de biens meubles.
Alors que, aux Etats Unis, un afro-américain vient de recevoir sept balles dans le dos par un policier blanc et que, en France, des dizaines de milliers de personnes se sont réunies à plusieurs reprises ces derniers mois contre le racisme, c’est ainsi que Valeurs Actuelles réagit aux mobilisations récentes des Black Lives Matter, en mettant les chaînes à une députée noire à qui il compte faire payer ses positions courageuses contre le racisme en France et son soutien à ses victimes.
Valeurs Actuelles, dont Geoffroy Lejeune, son rédacteur en chef, est recruté sur une chaîne de télévision à partir du mois de septembre 2020, insère par ailleurs ce roman-fiction dans un numéro consacré à l’ensauvagement, thématique chère à l’extrême-droite et au gouvernement d'Emmanuel Macron, pointant du doigt les noirs et les arabes de France en feignant d’oublier que ce sont avant tout les orientations ultra libérales du gouvernement ainsi que le racisme structurel et systémique qui ensauvagent la société dans son ensemble.
En soutien à Danièle Obono, et pour lutter contre la banalisation du discours raciste et de ses promoteurs médiatiques, nous appelons à un large rassemblement, Samedi 5 Septembre 2020 à 17 heures, Place du Trocadero à Paris.
Premiers signataires
Amal Bentounsi, Olivier Besancenot, Houria Bouteldja, Patrick Braouezec, Judith Butler, Annick Coupé, Christian Delorme, Doudou Diene, Eli Domota, Mireille Fanon Mendès-France, Jacques Gaillot, Nacira Guénif, Cédric Hérou, Anasse Kazib, Pierre Khalfa, Franco Lollia, Achille Mbembe, Marwan Muhammad, Pap Ndiaye, Younous Omarjee, Louis Sala-Molins, Michèle Sibony, Lilian Thuram, Aurélie Trouvé, Françoise Vergès, Marie-Christine Vergiat, Ludivine Bantigny, Tarek Ben Hiba, Alain Bertho, Véronique Bontemps, Said Bouamama, Sebastian Budgen, Mouhieddien Cherbib, Marie-France Cohen Solal, Alain Cyroulnik, Sonia Dayan-Herzbrun, Laurence De Cock, Christian Delarue, Eric Fassin, Isabelle Garo, Jean Malifaud, Aline Pailler, Ugo Palheta, Jacques Perreux, Luc Reinette, Théo Roumier, Catherine Samary, Patrick Saurin, Patrick Silberstein, Omar Slaouti, Eric Toussaint, Jean Paul Vanhoove, Marie Pierre Vieu Martin, Sophie Zafari
DE MONSANTO A GILEAD
Vous trouverez ci-dessous la deuxième et dernière partie du dernier message de Laurent Mucchielli relatif au dernier livre de Jean Dominique Michel contre la crise sanitaire. Le message est disponible en totalité si vous consultez le site Mediapart de Laurent Mucchielli à l’adresse ci-dessous.
Bernard Fischer
https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/170820/covid-anatomie-d-une-crise-sanitaire
De la corruption dans la recherche médicale
Le dernier problème posé par l’Evidence Based Medicine (EBM) est celui qu’a révélé l’affaire du Lancet. Jean-Dominique Michel avait déjà terminé son livre lorsque cette affaire a eu lieu, mais elle ne fait que confirmer de façon spectaculaire ce qu’il explique très bien, « l’EBM a d’autres utilités que celle pour laquelle elle a été mise en place et massivement adoptée par le monde de la recherche médicale. Elle fournit des possibilités inépuisables de manipulation et de fraude. Les compagnies pharmaceutiques en particulier en font grand usage pour faciliter différentes opérations lucratives en dépit de l’absence de données réelles probantes. Avec les maladies chroniques, l’industrie pharmaceutique a fourni par supertankers de faux résultats permettant de mettre sur le marché des produits coûteux, inutiles et souvent dangereux. Le tout enrobé d’un vernis de respectabilité scientifique qui fait encore hélas illusion ».
La terrible naïveté des méthodologistes consiste à confondre la fin et le moyen. La statistique n’est qu’un moyen, qui peut être mis au service de n’importe quelle fin. L’EBM est ainsi régulièrement utilisée par les industriels pour prouver l’absence de lien entre un problème de santé et un produit, « c’est évidemment l’industrie du tabac qui a ouvert le bal, suivie par d’autres comme l’agro alimentaire, l’industrie pétrolière et la pétrochimie, en particulier son secteur des pesticides. Les fameux Monsanto Papers, grâce auxquels la multinationale contestait de manière fallacieuse l’évidente toxicité de ses produits par des documents pseudo scientifiques en est un exemple récent ».
Et la même chose fonctionne avec le coronavirus, « nous avons ainsi pu observer que les plus virulents opposants au protocole de Marseille étaient bénéficiaires des largesses de Gilead, une société espérant mettre sur le marché son antiviral Remdesivir au prix de neuf cent à mille dollars par patient. Ces mêmes experts touchent également des enveloppes des autres grands groupes comme Merck, Sharp and Dohme, Roche, Boehringer, Johnson and Johnson, Sanofi, Glaxo Smith Kline (GSK), Abbvie, Pfizer, Novartis ou encore Astrazeneca ». Au passage, Jean Dominique Michel rappelle aussi que ceci concerne la plupart des médecins faisant partie du conseil scientifique et du Comité d'Analyse, de Recherche et d'Expertise (CARE) mis en place par le président de la république française ».
Le problème est général et Jean Dominique Michel le pose dans toute sa crudité, « la recherche médicale est en crise depuis au moins quinze ans. C’est une crise systémique. Sapée par une corruption généralisée qui s’appuie sur un petit nombre de personnes corrompues et une majorité d’acteurs qui sont partie prenante en toute ignorance de cause. Une corruption systémique gangrène la recherche médicale contemporaine. Le système est pourri dans son ensemble, d’une manière qui contraint chaque acteur à s’y résoudre, mais sans avoir à y participer activement ». La chose a déjà été dénoncée à maintes reprises par les rédacteurs en chef des plus grandes revues médicales comme le New England Journal of Medicine (NEJM), le British Journal of Medicine (BJM) et le Lancet. Jean Dominique Michel rappelle aussi que tout ceci est connu de tous depuis le célèbre article du professeur John Ionnadis, de l’université de Stanford, publié en 2005, intitulé « pourquoi la majorité des résultats de recherche scientifique publiés sont faux ». En effet, l’industrie pharmaceutique a non seulement imposé la méthode de l’EBM, des sujets et des hypothèses, mais elle contrôle de surcroît en partie la formation, la recherche, l’édition et les médias ».
Nous ne pouvons pas reprendre ici tous les arguments et toute la bibliographie que donne Jean Dominique Michel, mais tout ceci est fondamental. Nous insisterons toutefois, pour terminer sur ce point, sur les pages consacrées par l’auteur à la crise du virus de la grippe de 2009, tant la comparaison avec la crise actuelle est fascinante. Nous rappellerons à ce propos l’excellent documentaire de l’Association Relative à la Télévision Européenne (ARTE) que chacun peut revoir sur internet. Il y a onze ans, l’industrie pharmaceutique avait déjà réussi un énorme coup en créant une panique autour d’un virus présenté comme un danger pour l’humanité toute entière alors que, finalement, il ne tua pas plus que les grippes saisonnières. Mais grâce à cette panique, l’industrie pharmaceutique, notamment le laboratoire suisse Roche, parvint à faire acheter par les états des centaines de millions de boites d’un antiviral, le Tamiflu, qui s’avéra par la suite inefficace. Et après le médicament vint bien entendu le vaccin, acheté là aussi par centaines de millions. La France, nous nous en souvenons, battra des records avec l’achat de quatre vingt quinze millions de doses par le ministère de la santé dirigé alors par une certaine Roselyne Bachelot. Nous relirons à cette occasion le rapport de la commission d’enquête du sénat de l’époque, consacrée au rôle des firmes pharmaceutiques dans la gestion par le gouvernement de la grippe de 2009.
Le onzième et avant-dernier chapitre du livre de Jean Dominique Michel pourrait au premier abord paraître hors sujet, d’autant que certains passages du livre le sont quelque peu. Mais il n’en est rien. Le coronavirus n’est dangereux que pour les personnes les plus affaiblies par l’âge, quatre vingt treize pour cent des personnes mortes avaient plus de soixante cinq ans, et par les maladies chroniques, hypertension, diabète, troubles cardiovasculaires et cancer, « il faut oser le dire, ce n’est pas le virus qui tue, ce sont les maladies chroniques qui rendent l’infection du coronavirus potentiellement fatale à certains patients déjà lourdement touchés par les maux de la société »
Outre le vieillissement naturel, ce sont bien des facteurs socio-économiques qui facilitent le développement des maladies chroniques qui elles-mêmes fragilisent les défenses immunitaires contre les virus. Jean Dominique Michel rappelle opportunément les sept grands facteurs que sont la malbouffe, trop salée, trop grasse et trop sucrée, conduisant à l’obésité, la pollution atmosphérique, les substances chimiques présentes dans les habitations et dans l’environnement, les médicaments inutiles ou mal prescrits, les pesticides, le stress au travail et la sédentarité. Il en oublie cependant trois autres, le tabagisme, l’alcoolisme et surtout les élevages intensifs d’animaux qui sont une source majeure de toutes les zoonoses, maladies transmises à l’homme par les animaux, dont le coronavirus n’est sans doute que l’énième épisode.
Le propos de Jean Dominique Michel est cinglant, « la vérité est qu’à peu près rien n’a été réellement fait au cours des décennies écoulées pour protéger la population contre ces facteurs de risque, malgré des dégâts sanitaires monstrueux, et c’est cette population déjà atteinte dans sa santé qui a été le plus frappée par la pandémie du coronavirus. Le vrai problème, c’est que nous avons donné licence aux grands complexes industriels de l’agro alimentaire, de la pétrochimie, des transports et de la pharmacie, de prospérer en inondant le marché de produits qui, pour beaucoup d’entre eux, endommagent ou détruisent la santé de la population, au détriment donc du bien commun et de la santé de la population. Les consortiums qui contrôlent la production agricole, l’alimentation, la chimie, l’énergie, les transports, les médias, la publicité et les médicaments, font le lit de nos cancers, de nos infarctus, de nos Accidents Vasculaires Cérébraux (AVC), de nos diabètes, de nos maladies d’Alzheimer, de nos maladies de Parkinson, de nos dépressions et de nos scléroses en plaques. En fait, nous n’avons pas de système de santé, mais une industrie de la maladie ».
Même s’il tend à euphémiser les phénomènes proprement naturels, le vieillissement et les facteurs génétiques, ce raisonnement sociologique qui caractérise globalement le propos de Jean-Dominique Michel fait tout l’intérêt de son livre.