L'armée turque pénètre en Syrie, mais elle se heurte aux miliciens kurdes (Reuters)
Des troupes turques sont entrées Dimanche 21 Janvier 2018 en territoire syrien, dans la région d'Afrin, a annoncé le commandement turc au troisième jour d'une opération visant à chasser les milices kurdes des unités de protection du peuple (YPG) de cette enclave du nord de la Syrie.
Les YPG, soutenues par les Etats-Unis mais considérées par Ankara comme une organisation terroriste, affirment avoir repoussé l'armée turque et ses alliés au prix de combats farouches.
L'opération Rameau d’Olivier, préparée dans la nuit du Jeudi 18 Janvier au Vendredi 19 Janvier 2018 par des tirs de barrage d'artillerie, a été suivie Samedi 20 Janvier 2018 par des raids de l'aviation et elle a été formellement lancée par le président Recep Tayyip Erdogan.
Selon Birusk Hasaka, porte-parole des YPG à Afrin, plusieurs localités ont encore été visées Dimanche 21 Janvier 2018 par des pilonnages d'artillerie et des frappes aériennes, tandis que des combats au sol se déroulaient au nord et à l'ouest d'Afrin.
« L'opération Rameau d’Olivier se poursuit comme prévu et les opérations au sol ont commencé », a annoncé l'armée turque, deuxième plus gros contingent de l'Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) derrière celui des Etats-Unis.
Cité par la chaîne de télévision Haber Turk, le premier ministre turc Binali Yildirim a déclaré qu'Ankara entendait créer une zone de sécurité s'avançant d'une trentaine de kilomètres en territoire syrien.
« Nos avions ont décollé et commencé à bombarder et l'opération au sol est en cours. On voit les YPG fuir Afrin », a déclaré le président Recep Tayyip Erdogan, « nous les pourchasserons. Si dieu le veut, nous achèverons cette opération très rapidement ».
Environ vingt cinq mille rebelles de l'Armée Syrienne Libre (ASL) participent à l'opération au côté de l'armée turque dans le but de reprendre la ville arabe de Tal Rifaat et des localités alentour capturées par les YPG au mois de février 2016, a déclaré Dimanche 21 Janvier 2018 à Reuters un officier de l'ASL.
Le commandant Yasser Abdoul Rahim, chef de Failak al Cham, l'une des principales factions de l'ASL, a assuré que ses forces ne chercheraient pas à entrer dans Afrin, ville à majorité kurde, mais qu'elles espéraient l'encercler et forcer ainsi les YPG à la quitter.
Une roquette a été tirée de Syrie sur la ville-frontière turque de Reyhanli, Dimanche 21 Janvier 2018, faisant un mort, un ressortissant syrien, et trente deux blessés, selon le maire de la ville cité par la chaîne de télévision turque NTV. Trois roquettes au total ont été tirées sur Reyhanli, a rapporté la chaîne de télévision CNN Turk.
Recep Tayyip Erdogan a accusé certains alliés de la Turquie d'avoir fourni en munitions aux YPG l'équivalent de deux mille cargaisons d'avion et cinq mille cargaisons de camions.
Son ministre des affaires étrangères Mevlut Cavusoglu a déclaré que quiconque s'opposerait à l'intervention turque serait considéré par Ankara comme complice de groupes terroristes et traité en conséquence.
Le chef de la diplomatie turque, qui s'adressait à des journalistes, a également dit attendre de la France qu'elle soutienne l'opération.
Paris a exhorté Dimanche 21 Janvier 2018 Ankara à agir avec retenue et demandé une réunion urgente du conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU) sur la situation dans l'ensemble de la Syrie.
L'Iran, allié de Damas, a de son côté réclamé l'arrêt immédiat de l'intervention.
Des membres de l’ASL ont dit s'être emparés d'un village kurde sans qu'on leur oppose de résistance et avoir entamé des opérations de déminage.
Du côté des YPG, on affirme toutefois avoir repoussé l'offensive terrestre turque.
« Toutes les attaques terrestres contre Afrin ont pour l'heure été repoussées et ils ont été contraints à la retraite », a déclaré Nouri Mahmoudi, un responsable des YPG.
Des milliers de personnes se sont rassemblées dans la ville frontalière d'Amouda dans le nord-ouest de la Syrie en promettant de résister à l'occupation turque, a rapporté un témoin.
A Ankara et à Istanbul, les forces de sécurité turques ont dispersé à l'aide de gaz au poivre des manifestants kurdes protestant contre l'opération.
L'armée turque a déclaré que ses avions de combat avaient touché Dimanche 21 Janvier 2018 quarante cinq cibles, abris et dépôts d'armes, liées aux YPG.
Présent du côté turc de la frontière, un journaliste de Reuters a pu entendre dans la matinée les détonations des projectiles lancés par l'armée turque, au rythme d'environ un tir toutes les trois minutes.
Plusieurs convois militaires ont en outre été aperçus prenant la direction de la frontière. L'un transportait plusieurs chars.
Ankara assimile les YPG aux séparatistes du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui combat les forces turques depuis 1984 dans le sud-est de la Turquie. Mais les YPG sont aussi les alliés de Washington au sein des Forces Démocratiques Syriennes (FDS), dont elles sont le fer de lance de la lutte contre les groupes djihadistes.
L'offensive fait suite à de nombreux avertissements lancés ces dernières semaines par le pouvoir turc. Ankara a été particulièrement heurtée par l'annonce que les Etats-Unis allaient prendre en charge la formation d'une force de trente mille hommes dans l’est syrien contrôlé par les FDS.