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Dans les coulisses des négociations intenses sur l’accord de libération des otages
Une cellule multilatérale établie par le Qatar, peu après le 7 octobre 2023, a été efficace grâce à l'implication personnelle de Joseph Biden, avec des pourparlers qui ont pris la forme de montagnes russes
Le 13 octobre 2023, le président américain Joseph Biden s’est entretenu par visioconférence avec les familles de certains otages retenus en captivité par les terroristes dans la bande de Gaza, avant même que le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu n’entre en contact avec elles.
Cette discussion par Zoom aura aidé à établir le cadre des efforts intensifs de Washington pour garantir la remise en liberté des otages, des efforts qui ont atteint leur apogée Mercredi 22 Novembre 2023 avant l’aube, lorsqu’Israël et le Hamas ont annoncé qu’ils avaient accepté les dispositions d’un accord négocié par le Qatar. Cet accord prévoit de libérer cinquante femmes et enfants israéliens des prisons des factions terroristes de Gaza en échange d’un cessez-le-feu de quatre jours.
« Cela a été l’une des choses les plus poignantes à laquelle j’ai assisté dans le cadre de mon travail à cette fonction », a commenté un haut-responsable de l’administration de Joseph Biden qui s’est exprimé, Mardi 21 Novembre 2023, devant les journalistes, évoquant l’appel entre le président américain et les familles du mois d’octobre 2023, « Joseph Biden a donné le temps à chaque membre de chaque famille de laisser libre cours à ses émotions et de raconter des histoires au sujet de leurs proches qui avaient été kidnappés par les terroristes du Hamas, six jours plus tôt ».
Le 13 octobre 2023, les négociations sur la libération des captifs n’en étaient qu’à leurs balbutiements. Le Qatar s’était tourné vers les États-Unis et vers Israël peu après l’attaque meurtrière commise par le Hamas sur le sol israélien, un assaut qui a fait mille deux cent morts dans les communautés du sud de l’état juif. Il avait proposé son aide dans la mission délicate d’obtenir la remise en liberté des deux cent quarante personnes environ qui, Samedi 7 Octobre 2023, avaient été enlevées et emmenées à Gaza.
Doha avait soumis l’idée d’une cellule multilatérale qui réunirait des représentants qataris, américains et israéliens. L’objectif était de négocier dans le plus grand secret les termes d’un accord, a expliqué le responsable de l’administration. Dans cette cellule multilatérale, il y avait le directeur de la Central Intelligence Agency (CIA), William Burns, il y avait le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, il y avait le conseiller de la Maison-Blanche pour la politique au Moyen-Orient, Brett Mac Gurk, et il y avait un aide de Joseph Biden, Josh Geltzer. Ils ont tenu un rôle déterminant dans la finalisation de l’accord du côté américain.
C’est le numéro un du Mossad, David Barnea, qui a chapeauté les pourparlers pour Israël avec l’aide du ministre des affaires stratégiques Ron Dermer et du conseiller à la sécurité nationale Tzachi Hanegbi.
Du côté du Qatar, c’est le premier ministre Mohammed Bin Abd al Rahman al-Thani qui a principalement été en charge des contacts. L’Égypte a, elle aussi, tenu un rôle crucial en remédiant aux lacunes, par l’intermédiaire du directeur de ses services de renseignements, Abbas Kamel, selon l’officiel américain.
En plus d’une équipe de conseillers qui ont travaillé sur le dossier vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, Joseph Biden s’est personnellement impliqué lorsque des difficultés particulières ont pu faire leur apparition et il a pris soin de rencontrer les familles des otages pendant son voyage à Tel Aviv, le 18 octobre 2023.
Le 18 octobre 2023, les ministres israéliens exerçaient de fortes pressions en faveur d’un siège total de la bande de Gaza. Joseph Biden, pour sa part, a œuvré à convaincre Benjamin Netanyahu de la nécessité de commencer à laisser entrer des aides humanitaires à Gaza depuis l’Égypte, trois jours plus tard, le 21 octobre 2023.
Le 20 octobre 2023, le Hamas a accepté de libérer deux otages, deux ressortissantes américano-israéliennes, Judith et Natalie Raanan, dans le cadre d’un essai pilote qui aura mis à l’épreuve les capacités du Qatar à obtenir des résultats concrets.
« Pendant leur libération, la cellule multilatérale a été en mesure de suivre la mère et sa fille alors qu’elles traversaient Gaza pour se rendre à la frontière », a dit l’officiel de l’administration de Joseph Biden.
Le président américain a téléphoné au père de Natalie Raanan une fois que cette dernière s’est trouvée sur le sol israélien, en sécurité, et il s’est entretenu ensuite avec elle et avec Judith Raanan.
« Cette libération réussie nous a donné une certaine assurance des capacités réelles du Qatar à obtenir des résultats concrets par le biais de la cellule que nous avions établie », a expliqué le responsable de l’administration.
« Le 21 octobre 2023, le Hamas a informé la cellule qu’il était prêt à libérer un plus grand nombre de femmes et d’enfants, si l’état juif acceptait de suspendre son incursion terrestre imminente », a déclaré un autre responsable américain.
Le 22 octobre 2023, deux autres femmes qui étaient retenues en otages ont été libérées, Nurit Cooper, âgée de soixante-dix-neuf ans, et Yocheved Lifshitz, âgée de quatre-vingt-cinq ans.
« Quand Washington a demandé aux israéliens, à Jérusalem, s’ils seraient prêts à repousser l’offensive terrestre de l’armée israélienne à Gaza, ces derniers ont répondu par la négative, faisant remarquer que le Hamas n’avait pas encore donné de preuve de vie de la majorité des captifs et que le groupe terroriste tentait simplement de gagner du temps », a dit l’officiel de l’administration de Joseph Biden.
La cellule a renforcé ses efforts de négociation en conséquence. David Barnea s’est entretenu au téléphone à de multiples reprises avec William Burns et Joseph Biden a parlé quatre fois à Benjamin Netanyahu entre le 20 octobre et le 25 octobre 2023.
Ce n’est que lorsque les États-Unis ont réclamé des pauses humanitaires dans le conflit que Joseph Biden a réalisé que l’état juif ne consentirait à un arrêt temporaire des combats que s’il avait lieu dans le cadre d’un accord important pour la libération des otages. « Les États-Unis se sont alors adaptés, après avoir constaté que les cinq membres et observateurs du cabinet de guerre israélien se montraient unis et unanimes sur cette question », a dit l’officiel de l’administration de Joseph Biden.
« Le 25 octobre 2023, Brett Mac Gurk a échangé au téléphone avec le premier ministre qatari et les deux hommes, pour la toute première fois, ont évoqué l’idée de la libération de femmes et d’enfants en différentes phases en échange de la libération de prisonniers palestiniens. Brett Mac Gurk a ensuite informé Joseph Biden de la teneur de sa discussion et le président américain a demandé à pouvoir s’entretenir directement avec le ministre qatari des affaires étrangères pour travailler sur un tel accord. Les israéliens ont, à juste titre, insisté sur le fait que les femmes et les enfants devaient être libérés dans cette première phase et nous avons souscrit à ce point de vue », a dit l’officiel, qui a noté que les États-Unis avaient réclamé, par l’intermédiaire du Qatar, que le Hamas donne des preuves que les femmes et les enfants qui se trouvaient entre ses mains étaient encore en vie, ainsi que des informations permettant de clairement les identifier.
« Le Hamas a fait savoir au Qatar qu’il pouvait garantir la libération des cinquante otages, tout en refusant, dans un premier temps, de donner les informations désirées. Le groupe terroriste a ensuite consenti à transmettre des informations sur dix captifs, ce que les États-Unis ont considéré comme insuffisant », a dit le responsable de l’administration américaine.
Le 27 octobre 2023, Israël a lancé son incursion terrestre, ce qui, selon les responsables qataris, a significativement compliqué les négociations.
Après presque deux semaines de progrès très relatifs, William Burns a rencontré le premier ministre qatari et David Barnea à Doha pour évoquer l’esquisse d’un accord, encore largement vidé de toute substance dans la mesure où le Hamas n’avait pas encore transmis les identités des otages en sa possession.
« Insatisfait de l’avancée timide des pourparlers, Joseph Biden a appelé l’émir du Qatar, Mohammed ben Abd al Rahman al-Thani, pour la toute première fois depuis le début de la guerre et il a établi très clairement que l’état des choses était très insuffisant », a dit le responsable, « pendant leur entretien très intense, Joseph Biden a déclaré à l’émir que les deux parties ne pourraient pas aller de l’avant sans informations permettant d’identifier les otages et le leader qatari, en retour, a assuré avec beaucoup de clarté qu’il allait faire tout son possible pour obtenir ces renseignements ».
Peu après l’appel, le Hamas a fourni les identités de cinquante femmes et enfants qui, a-t-il affirmé, pourraient retrouver la liberté dans le cadre de la première phase d’un accord.
« Au cours d’un appel téléphonique du 14 novembre 2023 entre Joseph Biden et Benjamin Netanyahu, l’un des treize échanges téléphoniques entre les deux hommes depuis le début de la guerre, il a été entendu que nous pouvions poursuivre l’accord », a dit le responsable de l’administration américaine, qui a ajouté que Benjamin Netanyahu l’avait soutenu avant même que le cabinet de guerre ne vote en sa faveur, le 15 novembre 2023.
Brett Mac Gurk a rencontré Benjamin Netanyahu en Israël le 16 novembre 2023 et le premier ministre israélien a demandé à Joseph Biden d’exercer de nouvelles pressions contre l’émir du Qatar pour aider à finaliser les dernières dispositions de l’accord.
« Mais au moment même où les négociations semblaient entrer dans leur dernière ligne droite, les communications se sont éteintes et le Hamas a coupé tout contact avec les médiateurs qataris et égyptiens », a dit l’officiel.
Le groupe terroriste ne s’est à nouveau manifesté que pour menacer d’abandonner les pourparlers avec l’entrée des soldats israéliens dans l’hôpital al Shifa, de Gaza City, Israël affirmant que le Hamas y avait installé un centre de commandement majeur.
« Il n’y a très certainement aucune bonne foi s’agissant du Hamas dans le cadre de négociations, le Hamas, ce groupe terroriste qui détient en otage des nouveau-nés et des bébés », a dit le responsable.
L’état juif a continué ses opérations à l’hôpital al Shifa et dans ses alentours, affirmant que le Hamas ne consentirait à libérer des otages que si les pressions exercées à son encontre étaient suffisamment fortes.
« Le 17 novembre 2023, les discussions ont repris et Joseph Biden a, une fois encore, appelé l’émir qatari, l’exhortant à sceller l’accord. Le 18 novembre 2023, Brett Mac Gurk a rencontré le premier ministre du Qatar, à Doha, pour réexaminer certains éléments figurant dans l’accord. L’émirat avait reçu les derniers commentaires du Hamas sur ce dernier et William Burns avait été sollicité pour discuter du document de six pages, notamment des détails concernant sa mise en œuvre pour les deux parties afin que rien ne soit laissé au hasard », a dit l’officiel américain, ajoutant que les otages quitteront Gaza par différents endroits.
Brett Mac Gurk a participé, le 19 novembre 2023, à une autre réunion organisée au Caire où il a rencontré Abbas Kamel, le chef des renseignements égyptiens, qui s’était chargé de combler quelques lacunes restantes. L’accord a ensuite été transmis à Israël pour approbation.
S’exprimant alors que le cabinet israélien examinait encore la proposition, le responsable américain a estimé que les choses pouvaient encore mal tourner. Il a toutefois ajouté que l’administration américaine optait encore pour un optimisme prudent, « certaines questions importantes ont obtenu des réponses du côté du Hamas au cours des dernières quarante-huit heures, ce qui a donné aux israéliens la confiance nécessaire pour avancer ».
Suite au vote du cabinet, Mercredi 22 Novembre 2023, le public israélien aura vingt-quatre heures pour déposer d’éventuelles requêtes contre ces libérations d’otages, même si aucune volte-face ne devrait se produire et que l’accord devrait entrer en vigueur Jeudi 23 Novembre 2023.
L’accord prévoit la remise en liberté progressive de cinquante femmes et enfants qui ont été kidnappés en échange d’un cessez-le-feu de quatre jours et il prévoit d’offrir de nouvelles journées de répit si le Hamas consent à libérer un plus grand nombre de captifs. « Il y a l’espoir réel d’assister à d’autres libérations et un objectif clair qui est de ramener tous les otages chez eux, près de leur famille », a dit l’officiel américain.
En plus de la pause totale dans les opérations militaires pendant quatre jours, le responsable américain a dit espérer également qu’il y aurait une trêve similaire dans les hostilités qui agitent la frontière nord d’Israël, où les échanges de tirs entre l’armée israélienne et le groupe terroriste du Hezbollah se répètent.
« Nous espérons que la pause entraînera, de la même manière, une réelle augmentation de l’assistance humanitaire à Gaza. Nos équipes œuvrent à se préparer au mieux pour ce moment », a dit le responsable, qui a fait remarquer que les groupes humanitaires pourront travailler plus librement pendant la période qui suivra.
Deux cent camions d’aide humanitaire pourront ainsi entrer à Gaza chaque jour, avec d’importantes quantités de carburant. Le responsable de l’administration de Joseph Biden a toutefois fait savoir qu’il avait la certitude que « le Hamas ne sera pas en mesure de se réapprovisionner à l’extérieur pendant cette phase, en raison du mécanisme rigide d’inspection concernant tout ce qui est amené à pénétrer à Gaza ».
Israël a aussi accepté de libérer cent cinquante femmes et mineurs palestiniens actuellement incarcérés sur son sol dans une liste de trois cent condamnés pour des faits de terrorisme. Aucun n’a néanmoins été reconnu coupable de meurtre.
Parmi les otages qui doivent retrouver la liberté, il y a trois ressortissants des États-Unis et notamment Avigail Mor Idan, âgé de trois ans, dont les parents ont été assassinés devant ses yeux pendant le massacre du Hamas, et deux otages qui ont la double nationalité israélienne et américaine. Elles font partie des dix citoyens américains encore portés-disparus.
Alors que la phase initiale de l’accord ne prévoit que la libération de cinquante femmes et enfants retenus en captivité dans la bande de Gaza, l’état juif estime qu’il en restera une trentaine à Gaza, sans compter les soldats. Le groupe terroriste a annoncé qu’il ne remettrait pas de militaires en liberté à ce stade.
Le Hamas pourra identifier et regrouper d’autres femmes et enfants, a noté l’officiel américain qui a indiqué que le groupe terroriste au pouvoir à Gaza pouvait s’emparer des otages qui se trouvent actuellement entre les mains du Jihad Islamique palestinien ou d’autres familles criminelles qui ont, eux aussi, kidnappé des israéliens, Samedi 7 Octobre 2023, « que les otages soient détenus par le Jihad Islamique ou par le Hamas, c’est au Hamas qu’il revient de les libérer tous. Nous nous attendons à ce qu’il y ait plus de cinquante otages qui soient libérés, au final, mais je ne souhaite pas avancer de chiffre ».
Le responsable a reconnu que les hommes, les soldats et les ressortissants étrangers, ne seront pas libérés au cours des quatre premiers jours de cessez-le-feu, mais il a indiqué que l’accord avait été élaboré de manière à permettre leur libération ultérieure.